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Corruption

Les juges tirent à nouveau le signal d’alarme

Un appel à la lutte contre la grande corruption internationale a été lancé sous forme d’une Déclaration de Paris, jeudi matin, dans le Grand Amphithéâtre de la Sorbonne. La juge anti-corruption Eva Joly est à l’initiative de cet appel.
C'est un texte dont l’objectif est de s’attaquer à la «grande corruption», décrite comme une «injustice qui mine les vieilles démocraties occidentales et entrave le développement des pays pauvres».

Ce texte initié par la juge française Eva Joly, qui eut en charge l’instruction de l’affaire Elf, en France, et son éditeur Laurent Beccaria, rassemble déjà vingt-quatre signataires, tous des personnalités de stature internationale.

Figurent notamment dans la liste le procureur suisse Bernard Bertossa, le journaliste camerounais Pius Njawé, le prix Nobel de la paix argentin Adolfa Perez Esquivel, l'écrivain Wole Soyinka ou l'Irlandaise Mary Robinson.

Il ne s’agit pas d’une simple déclaration de principe. Cette Déclaration de Paris comprend aussi dix propositions très pratiques pour améliorer la lutte contre la délinquance financière. La première de ces propositions est de «suspendre les immunités diplomatique, parlementaire et judiciaire le temps que durent les enquêtes financières».

Eva Joly

Toutefois la proposition ne s'appliquerait pas aux chefs d'État car le droit coutumier international leur accorde l’immunité lorsqu'ils sont en exercice, comme on l'a encore vu mercredi avec le projet de loi adopté par le Parlement italien qui accorde une immunité pénale aux cinq plus hauts responsables de l'État. La Déclaration veut néanmoins imposer une étroite surveillance des comptes en banque des «dirigeants politiquement exposés» et de ceux de leur entourage afin de les protéger contre la tentation des virements douteux.

Électrochoc

Cette Déclaration de Paris vise aussi les acteurs financiers avec, par exemple, cette proposition qui s'adresse aux banques et leur demande de ne plus ouvrir de filiales ou de ne plus accepter de fonds en provenance de territoires non coopératifs. En clair, les fameux paradis off-shore sans lesquels la corruption ne pourrait prospérer.

Il y a aussi une proposition qui vise à identifier l’origine et le parcours des fonds (la «traçabilité» dans le jargon). Cela permettrait aux juges, dans une enquête, de retrouver automatiquement l'origine et la destination d'un flux d'argent sale.

Concrètement, l'objectif de cette Déclaration de Paris est double. En 1995, lors de «l’appel de Genève» sept magistrats européens avaient lancé un signal d'alarme en direction des politiques afin de les alerter sur les lenteurs de la justice et la gravité de la délinquance en col blanc. Aujourd'hui, la Déclaration de Paris se veut un deuxième électrochoc, une prise de conscience mais, cette fois-ci, adressé au monde entier et avec des mesures pratiques qui permettraient, si elles étaient appliquées, de réduire la face noire de l'économie. La balle est, à nouveau, dans le camp des politiques et des décideurs économiques.



Écouter également :

Christophe Boisbouvier reçoit le journaliste camerounais Pius Njawé.
Bernard Bertossa, ancien procureur de Genève.

Samedi, à 11h10 TU, Eva JOLY sera l'invitée de la semaine de RFI.

Lien utile :
www.declarationdeparis.org



par David  Servenay

Article publié le 19/06/2003