Politique française
Grâce partielle pour Bové
Le porte-parole de la Confédération paysanne vient de voir sa peine de prison réduite d’environ quatre mois et demi par le jeu combiné des remises de peines à la fois au titre de la grâce collective accordée chaque année à l’occasion de la fête nationale et de la grâce partielle de deux mois signée en sa faveur par le Président de la République. Incarcéré depuis le 22 juin, le leader du syndicat agricole est désormais libérable début décembre et devrait donc passer Noël en famille.
C’est une étape, mais ce n’est certainement pas la fin de l’histoire. Depuis l’incarcération de José Bové, on s’interrogeait sur la façon dont le pouvoir allait gérer cette affaire bien compliquée. Le prisonnier est un syndicaliste antilibéral de réputation internationale, figure de proue de lutte contre la mondialisation et la «malbouffe» dont il est le porte-parole infatigable dès que l’occasion s’en présente, et notamment lors des réunions de l’Organisation mondiale du commerce (OMC) ou les sommets des pays les plus riches du monde. À ce titre, son mouvement et ses actions bénéficient du soutien de nombre d’organisations politiques et syndicales à travers le monde. Quant aux faits qui lui sont reprochés, même les chercheurs victimes de ses saccages ont récemment publié une tribune dans la presse pour estimer qu’il avait fait œuvre utile en s’attaquant à leurs plantations de maïs génétiquement modifiées afin de porter le débat sur la voie publique.
Mais le porte-parole de la Confédération paysanne exerce également une fonction très exposée en raison des prises de positions et des actions radicales menées par la Confédération paysanne. Le parcours de José Bové est ainsi parsemé d’épisodes judiciaires. À partir de 1998, il multiplie les comparutions et les condamnations pour ses actions commandos contre les semences ou les plants transgéniques et pour la mise à sac d’un restaurant de l’enseigne américaine McDonald’s, en 1999, pour laquelle il est condamné pour la première fois à une peine de prison ferme (trois mois). Il exécute sa peine au cours de l’été 2002 après avoir soigneusement organisé la mise en scène de son incarcération lors d’une parade géante.
Ce séjour (de 44 jours) à la maison d’arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone fut une épreuve particulièrement pénible dont il n’a pas caché qu’il aurait préféré qu’elle ne soit pas rééditée. Convaincu de la justesse de sa cause, il refuse de réclamer sa propre grâce mais espère que les demandes déposées pour lui par ses amis et soutiens aboutiront. Le 22 juin, il est donc incarcéré de nouveau, à la suite d’une spectaculaire opération de police et, depuis cette date, c’était l’incertitude sur le sort qui allait lui être réservé.
Le président et le syndicaliste
José Bové est un prisonnier de droit commun encombrant. Car ils sont rares, de cette espèce, à être capable de mobiliser une fraction de l’opinion publique internationale, comme ces agriculteurs honduriens qui ont manifesté pour sa libération devant l’ambassade de France de Tegucigalpa, mardi 8 juillet. Dans une lettre remis à l’ambassadeur, les paysans honduriens soulignent que «l’incarcération de José Bové porte gravement atteinte à l’image de la France à un moment où les peuples du monde (…) avaient regardé comme positive la position française d’opposition à l’agression anglo-américaine en Irak». Un Français finalement bien embarrassant pour les autorités, puisqu’il symbolise à la fois la résistance (aux multinationales), l’indépendance (vis-à-vis de l’Amérique), l’exception culturelle (contre l’OMC), la solidarité (avec les pays en développement), bref beaucoup de grands principes dont nombre de chefs d’État voudraient être les héros. Parmi lesquels Jacques Chirac dont les interventions sur la scène internationale sont marquées par ses plaidoyers en faveur d’un monde multipolaire, de l’altermondialisation, du tiers monde, du développement durable et de l’environnement. À certains égards, les deux hommes exploitent le même filon et, comme le note pertinemment les paysans honduriens, ne rien faire en faveur de Bové aurait renvoyé une image brouillée de la France.
D’autre part, lors de ses déplacements en province, le président de la République a eu, à maintes reprises, la désagréable surprise de se faire accueillir aux cris de «Libérez Bové ! Chirac en prison !». Car en France le personnel politique jouit d’une présomption d’innocence, voire d’une immunité dans le cas du président de la République, que chaque citoyen peut toujours mettre sur le compte d’une «justice à deux vitesses».
Les mesure prises en faveur de José Bové ne sont pas à la hauteur de l’attente. À l’annonce des grâces en faveur de son client, l’avocat du syndicaliste a fait part de sa «déception». Un porte-parole de la Confédération paysanne a estimé que «cela signifie qu’on a un président qui ne gouverne plus pour une majorité mais pour un petit groupe». Le député Vert de la Gironde, Noël Mamère, parle de «grâce au rabais». En tout cas si, à l’évidence, le président français a du arbitrer entre les éléments les plus conservateurs de sa majorité, son image d’homme d’ouverture et le souci du bien commun pour parvenir à ce résultat qui semble ne satisfaire personne, en France, tout détenu reste libérable une fois la moitié de sa peine accomplie. Ce qui rendrait possible la libération de Bové dès l’automne.
Mais le porte-parole de la Confédération paysanne exerce également une fonction très exposée en raison des prises de positions et des actions radicales menées par la Confédération paysanne. Le parcours de José Bové est ainsi parsemé d’épisodes judiciaires. À partir de 1998, il multiplie les comparutions et les condamnations pour ses actions commandos contre les semences ou les plants transgéniques et pour la mise à sac d’un restaurant de l’enseigne américaine McDonald’s, en 1999, pour laquelle il est condamné pour la première fois à une peine de prison ferme (trois mois). Il exécute sa peine au cours de l’été 2002 après avoir soigneusement organisé la mise en scène de son incarcération lors d’une parade géante.
Ce séjour (de 44 jours) à la maison d’arrêt de Villeneuve-lès-Maguelone fut une épreuve particulièrement pénible dont il n’a pas caché qu’il aurait préféré qu’elle ne soit pas rééditée. Convaincu de la justesse de sa cause, il refuse de réclamer sa propre grâce mais espère que les demandes déposées pour lui par ses amis et soutiens aboutiront. Le 22 juin, il est donc incarcéré de nouveau, à la suite d’une spectaculaire opération de police et, depuis cette date, c’était l’incertitude sur le sort qui allait lui être réservé.
Le président et le syndicaliste
José Bové est un prisonnier de droit commun encombrant. Car ils sont rares, de cette espèce, à être capable de mobiliser une fraction de l’opinion publique internationale, comme ces agriculteurs honduriens qui ont manifesté pour sa libération devant l’ambassade de France de Tegucigalpa, mardi 8 juillet. Dans une lettre remis à l’ambassadeur, les paysans honduriens soulignent que «l’incarcération de José Bové porte gravement atteinte à l’image de la France à un moment où les peuples du monde (…) avaient regardé comme positive la position française d’opposition à l’agression anglo-américaine en Irak». Un Français finalement bien embarrassant pour les autorités, puisqu’il symbolise à la fois la résistance (aux multinationales), l’indépendance (vis-à-vis de l’Amérique), l’exception culturelle (contre l’OMC), la solidarité (avec les pays en développement), bref beaucoup de grands principes dont nombre de chefs d’État voudraient être les héros. Parmi lesquels Jacques Chirac dont les interventions sur la scène internationale sont marquées par ses plaidoyers en faveur d’un monde multipolaire, de l’altermondialisation, du tiers monde, du développement durable et de l’environnement. À certains égards, les deux hommes exploitent le même filon et, comme le note pertinemment les paysans honduriens, ne rien faire en faveur de Bové aurait renvoyé une image brouillée de la France.
D’autre part, lors de ses déplacements en province, le président de la République a eu, à maintes reprises, la désagréable surprise de se faire accueillir aux cris de «Libérez Bové ! Chirac en prison !». Car en France le personnel politique jouit d’une présomption d’innocence, voire d’une immunité dans le cas du président de la République, que chaque citoyen peut toujours mettre sur le compte d’une «justice à deux vitesses».
Les mesure prises en faveur de José Bové ne sont pas à la hauteur de l’attente. À l’annonce des grâces en faveur de son client, l’avocat du syndicaliste a fait part de sa «déception». Un porte-parole de la Confédération paysanne a estimé que «cela signifie qu’on a un président qui ne gouverne plus pour une majorité mais pour un petit groupe». Le député Vert de la Gironde, Noël Mamère, parle de «grâce au rabais». En tout cas si, à l’évidence, le président français a du arbitrer entre les éléments les plus conservateurs de sa majorité, son image d’homme d’ouverture et le souci du bien commun pour parvenir à ce résultat qui semble ne satisfaire personne, en France, tout détenu reste libérable une fois la moitié de sa peine accomplie. Ce qui rendrait possible la libération de Bové dès l’automne.
par Georges Abou
Article publié le 10/07/2003