Politique française
Le PS joue la carte sociale
Les socialistes peuvent se féliciter du congrès qu’ils viennent de tenir à Dijon. Sans préjuger de la qualité du consensus et de sa durée auxquels ils semblent être parvenus, ils ne se sont pas disputés publiquement. Il n’y a pas eu de synthèse, certes, mais pas non plus d’affrontements de nature à compromettre l’image du parti au sein de l’opinion publique. Comme prévu, le leader des socialistes français François Hollande, en sort renforcé. Il faut toutefois reconnaître que l’absence de rendez-vous électoraux à brève échéance a certainement contribué à retarder d’autant les décisions stratégiques qui fâchent. Faute d’enjeux, les «éléphants» n’ont pas eu à s’affronter et les querelles de légitimité pour la représentation du parti sont donc différées. Enfin la présence du secrétaire général du syndicat CGT marque la volonté des socialistes de renouer avec leur identité de parti de gauche.
Dès lors que l’état-major du parti avait, par ailleurs, renoncé à tordre les bras des différents courants pour les faire rentrer, par force, dans une motion de synthèse, l’ambiance pouvait se détendre. Et elle fut, de fait, plutôt conviviale, les porteurs de courants contestataires se réservant pour de meilleures occasions, porteuses de vrais enjeux. Ainsi le mot d’ordre du maire socialiste de Dijon, François Rebsamen, d’applaudir tous les orateurs et de n’en siffler aucun a été respecté.
D’autre part, un an après la défaite électorale, le contexte évolue à vive allure. La politique économique et sociale menée par la droite, qui contrôle la présidence et le parlement, commence à porter ses fruits politiques en reconstruisant, contre elle, une dynamique d’opposition. Sidérés et discrédités depuis la disparition de leurs représentants de la scène politique, les socialistes saisissent donc l’occasion pour rappeler qu’ils demeurent l’un des termes de l’équation politique française, version rive gauche.
Libérés d’un calendrier exigeant, débarrassés des conflits de personnes, encouragés par l’usure (relative) de l’adversaire, ils ont pu se concentrer, sans prendre de risques, sur ce qu’ils font le mieux : prononcer des paroles combattives, dénoncer les projets du gouvernement et rappeler la vocation solidaire de leur engagement. Les enseignants et les futurs retraités, qui s’opposent actuellement aux réformes de l’Education nationale et des pensions, s’en souviendront peut-être : le congrès de Dijon exige le retrait des plans Ferry (ministre de l’Education nationale) et Fillon (ministre des Affaires sociales). Et pour faire bonne mesure Bernard Thibault, leader du syndicat le plus radicalement opposé aux réformes en cours, la Confédération général du travail (CGT), a répondu à l’invitation du congrès où son discours à la tribune a été chaleureusement applaudi.
PS et CGT: la raison plus que la passion
La présence du numéro un de la CGT auprès des socialistes est troublante et elle a été très remarquée et commentée. En effet, ce syndicat fut proche du Parti communiste français au point que pèse encore sur lui la réputation d’en avoir été la courroie de transmission dans les entreprises. Les socialistes, pour leur part, se retrouvaient davantage au sein de la Confédération française des travailleurs (CFDT) avec laquelle ils partageaient l’essentiel des projets réformistes. La CFDT continue de labourer ce terrain-là, au prix d’un flirt dangereux avec le gouvernement. En revanche, le Parti socialiste, qui se réclame toujours d’un «réformisme de gauche», semble avoir pris le contre-pied de cette tendance en s’affichant ostensiblement avec la CGT, volontiers qualifiée de «révolutionnaire» ou «communiste».
Cette posture révèle peut-être une tentative de la CGT d’aller draguer en terres socialistes. Mais surtout une volonté des socialistes de se positionner là où il y a, ici et maintenant, un terreau propice à recruter. Et le mouvement social en cours, selon le principe des vases communiquant, en même temps qu’il met le gouvernement en difficulté, repositionne le Parti socialiste dans le champ de ses compétences originelles : parmi les couches populaires, ou qui ceux s’en réclament. D’autant que c’est actuellement un espace où la concurrence n’est pas acharnée: l’ex-grand parti de la classe ouvrière, le Parti communiste, n’a résisté ni à l’air du temps, ni à l’indétermination de ses dirigeants, et il continue de montrer le visage d’un fractionnisme propre à dissuader les mieux disposés à l’égard de la gauche. Quant aux alliés résiduels, écologistes et marxistes-léninistes avérés (dits d’extrême gauche), ils sont loin de former, quantitativement et qualitativement, les bataillons de la reconquête du pouvoir.
François Hollande (PS) et Bernard Thibault (CGT) d’accord sur l’essentiel ? Certainement pas. Le premier compte parmi les siens quelques notables dont les convictions socialistes se sont émoussées à l’épreuve du temps et du pragmatisme. Le second compte au sein de sa base des puristes qui considèrent avec mépris l’hérésie réformiste des socialistes. Mais l’un comme l’autre peuvent s’épauler utilement dans l’épreuve qu’ils traversent. Ils ont le même adversaire, les temps sont durs et l’heure des choix difficiles est encore loin devant.
D’autre part, un an après la défaite électorale, le contexte évolue à vive allure. La politique économique et sociale menée par la droite, qui contrôle la présidence et le parlement, commence à porter ses fruits politiques en reconstruisant, contre elle, une dynamique d’opposition. Sidérés et discrédités depuis la disparition de leurs représentants de la scène politique, les socialistes saisissent donc l’occasion pour rappeler qu’ils demeurent l’un des termes de l’équation politique française, version rive gauche.
Libérés d’un calendrier exigeant, débarrassés des conflits de personnes, encouragés par l’usure (relative) de l’adversaire, ils ont pu se concentrer, sans prendre de risques, sur ce qu’ils font le mieux : prononcer des paroles combattives, dénoncer les projets du gouvernement et rappeler la vocation solidaire de leur engagement. Les enseignants et les futurs retraités, qui s’opposent actuellement aux réformes de l’Education nationale et des pensions, s’en souviendront peut-être : le congrès de Dijon exige le retrait des plans Ferry (ministre de l’Education nationale) et Fillon (ministre des Affaires sociales). Et pour faire bonne mesure Bernard Thibault, leader du syndicat le plus radicalement opposé aux réformes en cours, la Confédération général du travail (CGT), a répondu à l’invitation du congrès où son discours à la tribune a été chaleureusement applaudi.
PS et CGT: la raison plus que la passion
La présence du numéro un de la CGT auprès des socialistes est troublante et elle a été très remarquée et commentée. En effet, ce syndicat fut proche du Parti communiste français au point que pèse encore sur lui la réputation d’en avoir été la courroie de transmission dans les entreprises. Les socialistes, pour leur part, se retrouvaient davantage au sein de la Confédération française des travailleurs (CFDT) avec laquelle ils partageaient l’essentiel des projets réformistes. La CFDT continue de labourer ce terrain-là, au prix d’un flirt dangereux avec le gouvernement. En revanche, le Parti socialiste, qui se réclame toujours d’un «réformisme de gauche», semble avoir pris le contre-pied de cette tendance en s’affichant ostensiblement avec la CGT, volontiers qualifiée de «révolutionnaire» ou «communiste».
Cette posture révèle peut-être une tentative de la CGT d’aller draguer en terres socialistes. Mais surtout une volonté des socialistes de se positionner là où il y a, ici et maintenant, un terreau propice à recruter. Et le mouvement social en cours, selon le principe des vases communiquant, en même temps qu’il met le gouvernement en difficulté, repositionne le Parti socialiste dans le champ de ses compétences originelles : parmi les couches populaires, ou qui ceux s’en réclament. D’autant que c’est actuellement un espace où la concurrence n’est pas acharnée: l’ex-grand parti de la classe ouvrière, le Parti communiste, n’a résisté ni à l’air du temps, ni à l’indétermination de ses dirigeants, et il continue de montrer le visage d’un fractionnisme propre à dissuader les mieux disposés à l’égard de la gauche. Quant aux alliés résiduels, écologistes et marxistes-léninistes avérés (dits d’extrême gauche), ils sont loin de former, quantitativement et qualitativement, les bataillons de la reconquête du pouvoir.
François Hollande (PS) et Bernard Thibault (CGT) d’accord sur l’essentiel ? Certainement pas. Le premier compte parmi les siens quelques notables dont les convictions socialistes se sont émoussées à l’épreuve du temps et du pragmatisme. Le second compte au sein de sa base des puristes qui considèrent avec mépris l’hérésie réformiste des socialistes. Mais l’un comme l’autre peuvent s’épauler utilement dans l’épreuve qu’ils traversent. Ils ont le même adversaire, les temps sont durs et l’heure des choix difficiles est encore loin devant.
par Georges Abou
Article publié le 19/05/2003