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Côte d''Ivoire

Seydou Diarra à Paris pour une semaine

Le Premier ministre Seydou Diarra effectue une visite de travail d’une semaine (28 juillet-1er août) à Paris. Il sera reçu par le président Chirac et par le chef du gouvernement Jean-Pierre Raffarin. Il aura également des entretiens économiques et militaires de haut niveau.
C’est à Paris que le Premier ministre, Seydou Diarra, boucle cette semaine (28 juillet - 1er août) une importante tournée qui l’a conduit d’abord à Bruxelles ( mi-juillet), où il a rencontré les autorités belges, mais surtout le président de l’Union européenne, Romano Prodi, avant de s’envoler pour une audition devant le Conseil de sécurité à New-York, le 25 juillet. Muni de son premier bilan, Seydou Diarra est en quête de financements pour tenir les prochaines échéances de son calendrier de consolidation de la paix. A Paris, il aura des entretiens aux plus hauts sommets politiques avec le président Chirac et le Premier ministre Raffarin. D’ici la fin de la semaine, il verra aussi le ministres des Affaires étrangères, Dominique de Villepin, en tournée en Afrique centrale les 28 et 29 juillet. Le ministre de l’Economie et des Finances, le ministre délégué à la Coopération, le chef d’Etat-major des armées et des investisseurs sont également au programme de cette semaine de travail.

Chef du «gouvernement de réconciliation nationale», Seydou Diarra a reçu mission d’appliquer le programme de Marcoussis. D’ores et déjà, les parrains français de l’accord signé en banlieue parisienne ont annoncé qu’ils prévoyaient de maintenir en Côte d’ivoire le contingent Licorne actuellement fort de près de 4 000 hommes. Pour le reste, en dehors d’une promesse européenne de 30 millions d’euros et d’un engagement international pour les élections prévues à l’horizon 2005, les différents interlocuteurs de Seydou Diarra, notamment l’ambassadeur de France auprès de l’Onu, soulignent que «le processus de paix reste fragile et qu’il reste beaucoup à faire», en particulier l’adoption de la loi d’amnistie, la nomination de ministres de la Défense et de la sécurité intérieure ou la mise en œuvre du programme de «désarmement, démobilisation et réinsertion» (DDR) des ex-belligérants.

Bonne volonté et aide internationale

Le programme de DDR constitue de fait le plat de résistance du calendrier du Premier ministre Diarra. Ce dernier prévoit en préalable l’adoption par l’Assemblée nationale (le 6 août prochain) de la loi d’amnistie déjà soumise au gouvernement (le 4 juillet dernier) et qui prévoit de passer l’éponge sur toutes les «atteintes à la sécurité de l’Etat» commises par des militaires ou des civils depuis septembre 2000, à l’exception des crimes imprescriptibles tombant sous le coup des lois universelles et des «infractions économiques». Les Forces armées nationales de Côte d’Ivoire (Fanci) devraient être «restructurées» le 13 août et cantonnées le 20 août, date à laquelle leurs adversaires devront également l’avoir été pour que démarrent la «vérification des identités des combattants», leur «profilage» et leur orientation vers une nouvelle vie civile ou militaire d’ici la mi-septembre. Depuis le 8 juin dernier, huit sites de regroupement ont été identifiés pour le cantonnement des Fanci et neuf pour les anciens combattants rebelles. Parallèlement à cette très délicate opération, il faudra ramasser des armes et des munitions «par volontariat, par incitation et par coercition», les trier (20 août) voire les détruire (20 septembre). De nouvelles lois «sur la détention et le port d’armes» devront être promulguées ainsi que de nouveaux statuts militaires. Le tout repose bien sûr largement sur la bonne volonté des ex belligérants mais se conçoit difficilement sans aide internationale.

A New-York, Seydou Diarra assurait que «j’ai engagé, avant mon présent voyage, des contacts avec le président de la République et les partis politiques que j’intensifierai pour la désignation des ministres en charge de la défense et de la Sécurité intérieure dès mon retour à Abidjan», après le passage obligé de Paris qui le presse d’agir «sans délai», à l’instar du Conseil de sécurité qui a totalement repris à son compte le programme de Marcoussis. Outre le financement de la rentrée scolaire 2003-2004 et des services de santé démantelés par la guerre, Seydou Diarra escomptait une aide internationale pour le redéploiement de l’administration sur l’ensemble du territoire national. Le retour des 169 préfets et sous-préfets ivoiriens dans leurs circonscriptions est prévu pour septembre et devrait nécessiter 440 agents de sécurité dans 22 départements du centre, du nord et de l’ouest du pays, mais aussi des mesures matérielles et financières.

Selon le ministère français des Affaires étrangères, la visite de Seydou Diarra «permettra de faire le point sur le processus de sortie de crise en Côte d’Ivoire et sur l’appui que continuera d’y apporter la France, en liaison avec la communauté internationale». Et vice versa, tant Bruxelles et New-York sont à l’écoute de la voix de Paris sur ce dossier du pré-carré français en Afrique. Vendredi dernier, de retour de Côte d’ivoire, le chef d’état-major des armées françaises, le général Henri Bentégeat assurait qu’il avait «noté des progrès considérables depuis décembre dernier. Ce qui a le plus changé, ce sont les esprits, qui ne sont plus à l’offensive et à la récrimination, mais au contraire marqué par un souhait réel de faire progresser le processus de paix». Le général français estime aussi que les anciens rebelles désormais «Forces nouvelles» sont un «élément totalement déterminant» pour le retour à la paix. Il n’est pas sûr qu’il ait été bien compris par le porte voix des manifestations anti-françaises de janvier dernier, Charles Blé Goudé qui croit savoir que «la France commence à appréhender la réalité du terrain» et assure que «tant qu’elle comprendra qu’il serait injuste de dérouler le tapis rouge à des rebelles, la France n’aura pas à essuyer les injures des Ivoiriens».

Le chef d’état-major français se déclare «frappé par la confiance qui règne» entre les anciens belligérants et les presse de poursuivre «de façon à ce qu’on puisse enclencher le plus vite possible le regroupement, la démobilisation, le désarmement et la réinsertion de l’ensemble des forces excédentaires par rapport aux besoins de l’armée ivoirienne. Il faut que quelque chose se passe en août». C’est bien ce que Seydou Diarra est allé plaider à Bruxelles et à New-York. Car comme l’explique le général Bentegeat : «La France a déjà beaucoup fait. Licorne est coûteux mais indispensable. Pour la réinsertion, les organisations internationales devront s’impliquer davantage. La France ne pourra pas assumer l’ensemble du financement de l’opération».



par Monique  Mas

Article publié le 28/07/2003