Turquie
Américains et Turcs veulent tourner la page
Le ministre turc des Affaires étrangères Abdullah Gül entame ce mardi une visite cruciale aux Etats-Unis, les relations entre Ankara et Washington étant très tendues depuis plusieurs mois. L’essentiel des discussions devrait porter sur la situation en Irak et l’éventuelle participation de soldats turcs à une force internationale de maintien de la paix.
Dans un contexte très tendu, le geste avait une valeur symbolique importante. C’est par la Turquie que le nouveau chef des forces armées américaines au Moyen-Orient, John Abizaid, a débuté la semaine dernière sa première tournée dans la région. Une visite dont l’un des objectifs était notamment la préparation du voyage du ministre turc des Affaires étrangères à Washington. Un programme chargé attend Abdullah Gül puisqu’il doit notamment rencontrer au cours des trois prochains jours le secrétaire d’Etat Colin Powell, le vice-président Dick Cheney et Condoleeza Rice, conseillère du président Bush pour la sécurité nationale.
Les entretiens qu’il aura avec ces différentes personnalités devraient notamment porter sur une pétition américaine transmise par John Abizaid lors de son récent séjour en Turquie. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a ainsi déclaré dimanche que les Etats-Unis avaient demandé à la Turquie des soldats pour l’Irak, sans livrer de plus de précisions sur la nature d’une éventuelle coopération militaire. Selon la presse turque, Washington souhaiterait que la Turquie mette 10 000 soldats à la disposition d’une force internationale de maintien de la paix. Une éventualité repoussée par certains parlementaires locaux qui estiment qu’il ne serait pas approprié pour la Turquie de soutenir une force d’occupation.
Le gouvernement ne s’est lui pas encore officiellement prononcé. A la différence de pays tels que la Bulgarie ou la Hongrie qui ont annoncé leur intention de fournir des hommes, la Turquie réserve encore sa réponse. Les autorités turques ont préféré s’octroyer le temps de la réflexion et surtout, celui de la négociation. Elles attendent notamment des Américains qu’ils luttent plus activement contre les rebelles séparatistes kurdes installés dans le nord de l’Irak. L’Etat major turc a ainsi indiqué samedi dans un communiqué que les discussions menées à Ankara avec les militaires américains avaient porté sur les «actions pouvant être menées conjointement contre les activités de l’organisation terroriste PKK-Hadek dans le nord de l’Irak». Plusieurs milliers de soldats turcs sont déjà déployés dans cette région frontalière. Mais Ankara redoute que les séparatistes kurdes ne reprennent leur lutte après la chute du régime de Saddam Hussein en demandant la création d’un Etat kurde à cheval sur le nord de l’Irak et le sud de la Turquie.
Une véritable humiliation nationale
La visite d’Abdallah Gül aux Etats-Unis marque le début d’un nouveau cycle des relations américano-turques après plus de quatre mois de grande tension. La décision du Parlement turc de refuser le déploiement de plus de 60 000 soldats américains peu avant le lancement de l’offensive militaire contre l’Irak avait été perçu comme un véritable affront par Washington. Cette décision constituait également un important revers pour les forces armées américaines qui espéraient pouvoir ouvrir un front dans le nord de l’Irak. En représailles, les Etats-Unis avaient alors décidé de suspendre un programme d’aide économique destiné à la Turquie. Une mesure qui n’a pas amené les parlementaires turcs à revenir sur leur décision. Et les Américains n’ont finalement pu compter que sur un appui logistique minimum en utilisant notamment certains ports pour acheminer du matériel vers la région du Golfe.
Après plusieurs mois de brouille, les deux pays ont amorcé un rapprochement au vers la fin du mois de juin, Abdullah Gül ayant notamment eu l’occasion de rencontrer en Jordanie son homologue américain Colin Powell et le chef de l’administration provisoire en Irak, Paul Bremer. Suite à cette réunion, la Turquie a adopté un décret valable un an selon lequel les pays désireux de contribuer à la reconstruction de l’Irak, conformément à la résolution 1483 de l’Onu, peuvent compter sur la coopération de la Turquie qui mettra certaines installations à leur disposition. Un texte qui permet également à des soldats étrangers de séjourner dans le pays.
Si ce décret n’est pas rejeté par le Parlement, des troupes étrangères, et notamment américaines, pourraient donc bientôt fouler le sol turc. Souhaité par Ankara et Washington, le réchauffement des relations semble donc être en bonne voie. A condition bien sûr qu’aucun incident ne vienne perturber ce processus. L’arrestation le 4 juillet dans le nord-est de l’Irak par les forces américaines de onze soldats turcs avait ainsi déclenché une vive crise entre les deux pays. Ces membres des forces spéciales turques étaient soupçonnés de fomenter un attentat contre le gouverneur kurde de la ville de Kirkouk. Arrêtés par une centaine de soldats américains, ils avaient ensuite été transportés vers la capitale irakienne. Et la Turquie avait dû redoubler d’efforts pendant quarante-huit heures pour obtenir leur libération. L’affaire s’était finalement bien terminée, les armées turques et américaines exprimant ensuite dans un communiqué commun leurs regrets et s’engageant à mieux collaborer. Le type d’incident dont se passeraient bien les autorités turques à l’avenir, la population, en grande majorité hostile à la présence militaire américaine en Irak, l’ayant vécu comme une véritable humiliation nationale.
Les entretiens qu’il aura avec ces différentes personnalités devraient notamment porter sur une pétition américaine transmise par John Abizaid lors de son récent séjour en Turquie. Le Premier ministre turc Recep Tayyip Erdogan a ainsi déclaré dimanche que les Etats-Unis avaient demandé à la Turquie des soldats pour l’Irak, sans livrer de plus de précisions sur la nature d’une éventuelle coopération militaire. Selon la presse turque, Washington souhaiterait que la Turquie mette 10 000 soldats à la disposition d’une force internationale de maintien de la paix. Une éventualité repoussée par certains parlementaires locaux qui estiment qu’il ne serait pas approprié pour la Turquie de soutenir une force d’occupation.
Le gouvernement ne s’est lui pas encore officiellement prononcé. A la différence de pays tels que la Bulgarie ou la Hongrie qui ont annoncé leur intention de fournir des hommes, la Turquie réserve encore sa réponse. Les autorités turques ont préféré s’octroyer le temps de la réflexion et surtout, celui de la négociation. Elles attendent notamment des Américains qu’ils luttent plus activement contre les rebelles séparatistes kurdes installés dans le nord de l’Irak. L’Etat major turc a ainsi indiqué samedi dans un communiqué que les discussions menées à Ankara avec les militaires américains avaient porté sur les «actions pouvant être menées conjointement contre les activités de l’organisation terroriste PKK-Hadek dans le nord de l’Irak». Plusieurs milliers de soldats turcs sont déjà déployés dans cette région frontalière. Mais Ankara redoute que les séparatistes kurdes ne reprennent leur lutte après la chute du régime de Saddam Hussein en demandant la création d’un Etat kurde à cheval sur le nord de l’Irak et le sud de la Turquie.
Une véritable humiliation nationale
La visite d’Abdallah Gül aux Etats-Unis marque le début d’un nouveau cycle des relations américano-turques après plus de quatre mois de grande tension. La décision du Parlement turc de refuser le déploiement de plus de 60 000 soldats américains peu avant le lancement de l’offensive militaire contre l’Irak avait été perçu comme un véritable affront par Washington. Cette décision constituait également un important revers pour les forces armées américaines qui espéraient pouvoir ouvrir un front dans le nord de l’Irak. En représailles, les Etats-Unis avaient alors décidé de suspendre un programme d’aide économique destiné à la Turquie. Une mesure qui n’a pas amené les parlementaires turcs à revenir sur leur décision. Et les Américains n’ont finalement pu compter que sur un appui logistique minimum en utilisant notamment certains ports pour acheminer du matériel vers la région du Golfe.
Après plusieurs mois de brouille, les deux pays ont amorcé un rapprochement au vers la fin du mois de juin, Abdullah Gül ayant notamment eu l’occasion de rencontrer en Jordanie son homologue américain Colin Powell et le chef de l’administration provisoire en Irak, Paul Bremer. Suite à cette réunion, la Turquie a adopté un décret valable un an selon lequel les pays désireux de contribuer à la reconstruction de l’Irak, conformément à la résolution 1483 de l’Onu, peuvent compter sur la coopération de la Turquie qui mettra certaines installations à leur disposition. Un texte qui permet également à des soldats étrangers de séjourner dans le pays.
Si ce décret n’est pas rejeté par le Parlement, des troupes étrangères, et notamment américaines, pourraient donc bientôt fouler le sol turc. Souhaité par Ankara et Washington, le réchauffement des relations semble donc être en bonne voie. A condition bien sûr qu’aucun incident ne vienne perturber ce processus. L’arrestation le 4 juillet dans le nord-est de l’Irak par les forces américaines de onze soldats turcs avait ainsi déclenché une vive crise entre les deux pays. Ces membres des forces spéciales turques étaient soupçonnés de fomenter un attentat contre le gouverneur kurde de la ville de Kirkouk. Arrêtés par une centaine de soldats américains, ils avaient ensuite été transportés vers la capitale irakienne. Et la Turquie avait dû redoubler d’efforts pendant quarante-huit heures pour obtenir leur libération. L’affaire s’était finalement bien terminée, les armées turques et américaines exprimant ensuite dans un communiqué commun leurs regrets et s’engageant à mieux collaborer. Le type d’incident dont se passeraient bien les autorités turques à l’avenir, la population, en grande majorité hostile à la présence militaire américaine en Irak, l’ayant vécu comme une véritable humiliation nationale.
par Olivier Bras
Article publié le 22/07/2003