Afrique du Sud
Sida: la volte-face du gouvernement
Rompant avec une politique niant le lien entre le virus VIH et le sida, les autorités sud-africaines ont décidé de lancer un plan d’urgence contre le sida, mais la ministre de la Santé traîne des pieds.
C’est un tournant dans la politique de santé sud-africaine concernant le sida. Vendredi soir, à l’issue d’un conseil des ministres extraordinaire qui s’est tenu 48 heures à peine après la première conférence nationale sur le sida, le gouvernement a annoncé la mise en place d’un «plan opérationnel détaillé» d’accès aux médicaments anti-rétroviraux. Ce plan qui doit être rédigé par le ministère de la Santé d’ici au mois de septembre doit indiquer comment et quand ces médicaments pourront être rendus accessibles à tous dans un pays où un habitant sur neuf est atteint par le virus (soit environ 4,7 millions de personnes).
La décision du gouvernement a été saluée par Nelson Mandela qui s’est dit «comblé de joie par cette annonce». Cette décision a également été saluée par les militants de la lutte anti-sida et notamment par leur figure de proue Zackie Achmat, le porte-parole de TAC (Treatment action campaign), qui parle de «la meilleure nouvelle depuis quatre années très sombres» mais il ajoute «nous attendrons de voir le plan avant de nous réjouir».
Dans un pays où près de 1000 personnes meurent chaque jour du sida, la décision constitue un revirement de la doctrine officielle. En effet, le chef de l’Etat, Thabo Mbeki, avait mis en doute à plusieurs reprises le lien entre le virus VIH et le sida. Le président sud-africain s’était attiré les foudres de la quasi-totalité de la communauté scientifique mondiale mais il avait pourtant refusé de revenir sur ses positions.
Changement radical de position désormais puisque la décision du gouvernement à l’issue du conseil des ministres extraordinaire de vendredi parle «d’urgence» et affirme que le but du plan d’accès aux médicaments anti-rétroviraux «est d’assurer que les 40 millions de sud-africains qui ne sont pas touchés par le sida le restent et que ceux qui sont infectés par le VIH, mais qui n’ont pas encore développé la maladie à un stade avancé poursuivent une vie normale».
La ministre de la Santé jugée inapte à mettre en œuvre le plan anti-sida
Dans l’élaboration de son plan d’accès aux médicaments, le gouvernement sud-africain s’appuiera sur les experts de la fondation Clinton pour l’initiative sur le sida. Selon les autorités sud-africaines, le coût de ce plan devrait être compris entre 75 et 100 millions de dollars. Une somme qui pourrait être financée en partie par le Fonds mondial de lutte contre le sida avec lequel Pretoria vient de signer un accord pour un montant de 41 millions de dollars. Par ailleurs, au cours de sa récente visite dans le pays, le président américain George Bush a promis une aide de 15 millions de dollars sur cinq ans en faveur de l’Afrique pour lutter contre le sida en précisant que l’Afrique du Sud serait l’un des premiers bénéficiaires.
Mais la question du financement de ce plan n’est pas le seul obstacle. Quelques heures seulement après l’annonce officielle du gouvernement, la ministre de la Santé a paru traîner des pieds. Manto Tshabalala-Msimang a mis en avant des difficultés constitutionnelles ou encore des carences en équipements qui risquent d’entraver la réalisation du plan.
Au delà des difficultés réelles comme l’absence de structures de soins dans les zones rurales évoquées par la ministre, personne ne peut oublier que ce médecin de formation a refusé de reconnaître pendant des années l’efficacité des traitements anti-rétroviraux allant jusqu’à parler à leur sujet de «poison» et recommandant aux malades une préparation à base d’ail, d’oignon et d’huile d’olive pour combattre le sida.
Aujourd’hui des voix s’élèvent pour réclamer la démission et même des poursuites judiciaires contre Manto Tshabalala-Msimang. Pour Bantu Holomisa, ancien membre de l’ANC qui a fondé un parti politique d’opposition (l’UDM) et qui reste proche de Nelson Mandela, la ministre doit démissionner: «Si elle chargée de ce programme, il y a peu de chances qu’il réussisse (…) elle personnifie l’échec de la politique du gouvernement en matière de sida».
Au titre de l’opposition toujours, Patricia de Lille, du parti des démocrates indépendants, a demandé que la ministre «soit jugée par le Commission des droits de l’homme en raison de ses refus répétés et obstinés de mettre en place un plan pour venir en aide aux victimes du sida».
Selon un rapport publié récemment par les ministères de la Santé et du Trésor en Afrique du Sud, la mise en place d’un plan d’accès aux anti-rétroviraux pour tous d’ici à 2008 devrait permettre de sauver 1,7 million de personnes et éviterait à 860 000 enfants de devenir orphelins.
Ecouter également :
Fabienne Pompey, le rendez-vous de la rédaction du 11/08/2003
La décision du gouvernement a été saluée par Nelson Mandela qui s’est dit «comblé de joie par cette annonce». Cette décision a également été saluée par les militants de la lutte anti-sida et notamment par leur figure de proue Zackie Achmat, le porte-parole de TAC (Treatment action campaign), qui parle de «la meilleure nouvelle depuis quatre années très sombres» mais il ajoute «nous attendrons de voir le plan avant de nous réjouir».
Dans un pays où près de 1000 personnes meurent chaque jour du sida, la décision constitue un revirement de la doctrine officielle. En effet, le chef de l’Etat, Thabo Mbeki, avait mis en doute à plusieurs reprises le lien entre le virus VIH et le sida. Le président sud-africain s’était attiré les foudres de la quasi-totalité de la communauté scientifique mondiale mais il avait pourtant refusé de revenir sur ses positions.
Changement radical de position désormais puisque la décision du gouvernement à l’issue du conseil des ministres extraordinaire de vendredi parle «d’urgence» et affirme que le but du plan d’accès aux médicaments anti-rétroviraux «est d’assurer que les 40 millions de sud-africains qui ne sont pas touchés par le sida le restent et que ceux qui sont infectés par le VIH, mais qui n’ont pas encore développé la maladie à un stade avancé poursuivent une vie normale».
La ministre de la Santé jugée inapte à mettre en œuvre le plan anti-sida
Dans l’élaboration de son plan d’accès aux médicaments, le gouvernement sud-africain s’appuiera sur les experts de la fondation Clinton pour l’initiative sur le sida. Selon les autorités sud-africaines, le coût de ce plan devrait être compris entre 75 et 100 millions de dollars. Une somme qui pourrait être financée en partie par le Fonds mondial de lutte contre le sida avec lequel Pretoria vient de signer un accord pour un montant de 41 millions de dollars. Par ailleurs, au cours de sa récente visite dans le pays, le président américain George Bush a promis une aide de 15 millions de dollars sur cinq ans en faveur de l’Afrique pour lutter contre le sida en précisant que l’Afrique du Sud serait l’un des premiers bénéficiaires.
Mais la question du financement de ce plan n’est pas le seul obstacle. Quelques heures seulement après l’annonce officielle du gouvernement, la ministre de la Santé a paru traîner des pieds. Manto Tshabalala-Msimang a mis en avant des difficultés constitutionnelles ou encore des carences en équipements qui risquent d’entraver la réalisation du plan.
Au delà des difficultés réelles comme l’absence de structures de soins dans les zones rurales évoquées par la ministre, personne ne peut oublier que ce médecin de formation a refusé de reconnaître pendant des années l’efficacité des traitements anti-rétroviraux allant jusqu’à parler à leur sujet de «poison» et recommandant aux malades une préparation à base d’ail, d’oignon et d’huile d’olive pour combattre le sida.
Aujourd’hui des voix s’élèvent pour réclamer la démission et même des poursuites judiciaires contre Manto Tshabalala-Msimang. Pour Bantu Holomisa, ancien membre de l’ANC qui a fondé un parti politique d’opposition (l’UDM) et qui reste proche de Nelson Mandela, la ministre doit démissionner: «Si elle chargée de ce programme, il y a peu de chances qu’il réussisse (…) elle personnifie l’échec de la politique du gouvernement en matière de sida».
Au titre de l’opposition toujours, Patricia de Lille, du parti des démocrates indépendants, a demandé que la ministre «soit jugée par le Commission des droits de l’homme en raison de ses refus répétés et obstinés de mettre en place un plan pour venir en aide aux victimes du sida».
Selon un rapport publié récemment par les ministères de la Santé et du Trésor en Afrique du Sud, la mise en place d’un plan d’accès aux anti-rétroviraux pour tous d’ici à 2008 devrait permettre de sauver 1,7 million de personnes et éviterait à 860 000 enfants de devenir orphelins.
Ecouter également :
Fabienne Pompey, le rendez-vous de la rédaction du 11/08/2003
par Philippe Couve
Article publié le 11/08/2003 Dernière mise à jour le 09/07/2004 à 15:21 TU