Afrique du Sud
Winnie Madikizela-Mandela condamnée à la prison
Winnie Madikizela-Mandela, ex-épouse de l’ancien président sud-africain et figure emblématique féminine de la lutte contre l'apartheid en Afrique du Sud, a été condamnée vendredi à cinq ans de prison dont un avec sursis, pour fraude aux prêts bancaires. Toutefois sa peine de prison a été ramenée à huit mois d’incarcération et elle devra effectuer 3 ans et 4 mois de travaux communautaires. Winnie Madikizela-Mandela a fait appel de la décision du tribunal. L’appel est suspensif.
De notre correspondante en Afrique du Sud.
«Elle est mon idole», affirmait hier Mercy, une étudiante de Pretoria venue manifester aux portes du tribunal où Winnie Madikizela-Mandela a été condamnée à 5 ans de prison, dont 8 mois fermes. «Elle a fait beaucoup pour nous, c’est une femme puissante qui n’a peur de rien, et je voudrais bien être comme elle». Reconnue coupable de fraude et de vol, l’ancienne femme de Nelson Mandela a immédiatement fait appel du verdict prononcé contre elle. Sa signature, apposée sur du papier à en-tête de la Ligue des femmes du Congrès national africain (ANC), a permis a plusieurs employés fictifs de cette instance d’obtenir pour 1 million de rands de prêts bancaires. Des sommes sur lesquelles une «assurance pour obsèques» avaient ensuite été prélevées par Addy Moolman, un associé de Winnie Madikizela-Mandela, condamné à 7 ans de prison, dont 2 avec sursis.
A l’annonce de ce verdict, le pays s’est pris de passion pour un débat qui s’est déroulé toute la journée sur les ondes de la radio nationale, SAFM. Signe de la fragilité de la réconciliation nationale amorcée par la Commission vérité et réconciliation (TRC), la «mère de la Nation» a été défendue et critiquée avec la même ardeur. De nombreux auditeurs ont dénoncé le «racisme viscéral» d’un système judiciaire toujours contrôlé par des magistrats blancs. Le refus de l’ancien président Pieter Willem Botha de se présenter devant la TRC et l’acquittement, l’an dernier, du docteur Wouter Basson, spécialiste des armes chimiques pendant l’apartheid, ont suscité un nouveau tollé.
Helen Suzman, une voix blanche respectée pour son rôle pendant la lutte contre l’apartheid, a rappelé avec indignation qu’avec son bannissement et ses années d’isolement forcé, pendant l’apartheid, «Winnie a déjà payé à l’avance, et largement, pour tous les crimes qui peuvent lui être reprochés aujourd’hui». Toujours très populaire, la principale intéressée a accusé le choc sans émotion apparente. Prenant acte des conséquences de sa condamnation, elle a mis un point final à sa carrière politique, en annonçant hier sa démission de ses fonctions de députée, de présidente de la Ligue des femmes de l’ANC, et de membre des plus hautes instances exécutives du parti.
Winnie Mandela passe pour une victime
Depuis plusieurs années, l’héroïne de la résistance noire en Afrique du Sud a multiplié erreurs et revers. Ses premiers déboires avec la justice remontent à 1991. Un an après la libération de Nelson Mandela, le régime de l’apartheid l’a traduite en justice pour le meurtre présumé du jeune Stompie Sepei, membre d’un club de football qu’elle avait monté à Soweto. Condamnée à la prison, elle avait ensuite fait appel, et écopé d’une amende. Des révélations sur sa liaison avec l’un de ses gardes du corps avaient alors ébranlé sa relation avec Nelson Mandela. Deux ans avant leur divorce, en 1996, Winnie avait été écartée des cérémonies d’investiture de Nelson Mandela, élu président en avril 1994.
Un an plus tard, elle avait été limogée du poste de second rang qui lui avait été réservé au sein du gouvernement, en tant que vice-ministre des Arts et de la culture. Elle avait été à nouveau écartée du leadership, en 1997, avant un congrès de l’ANC marqué par son retrait de la course au poste de secrétaire général du parti.
Son silence et son refus de demander la moindre amnistie pendant les audiences de la Commission vérité et réconciliation (TRC) avaient un peu plus terni son image, mais pas sa popularité. Outre son absence remarquée au Parlement, plusieurs scandales l’ont éclaboussée. Soupçonnée de se livrer à un trafic de diamants, Winnie Mandela a reçu l’ordre de fermer, l’an dernier, le restaurant qu’elle avait ouvert juste en face de l’ancienne maison familiale des Mandela, transformée en musée à Soweto.
Neuf ans après les premières élections multiraciales, Winnie Mandela passe aux yeux de ses admirateurs pour une victime. Elle est sans doute aussi victime de la normalisation politique accomplie par la «nouvelle» Afrique du Sud. Impensable dans un autre pays d’Afrique, sa condamnation témoigne du fonctionnement indépendant de la justice sud-africaine, tout comme de la détermination du parti au pouvoir à lutter contre la corruption, y compris dans ses propres rangs. Un mois après une peine de 4 ans de prison ferme prononcée contre Tony Yengeni, ancien chef du groupe parlementaire de l’ANC, accusé d’avoir reçu un pot-de-vin, le jugement contre Winnie se veut tout aussi exemplaire.
«Elle est mon idole», affirmait hier Mercy, une étudiante de Pretoria venue manifester aux portes du tribunal où Winnie Madikizela-Mandela a été condamnée à 5 ans de prison, dont 8 mois fermes. «Elle a fait beaucoup pour nous, c’est une femme puissante qui n’a peur de rien, et je voudrais bien être comme elle». Reconnue coupable de fraude et de vol, l’ancienne femme de Nelson Mandela a immédiatement fait appel du verdict prononcé contre elle. Sa signature, apposée sur du papier à en-tête de la Ligue des femmes du Congrès national africain (ANC), a permis a plusieurs employés fictifs de cette instance d’obtenir pour 1 million de rands de prêts bancaires. Des sommes sur lesquelles une «assurance pour obsèques» avaient ensuite été prélevées par Addy Moolman, un associé de Winnie Madikizela-Mandela, condamné à 7 ans de prison, dont 2 avec sursis.
A l’annonce de ce verdict, le pays s’est pris de passion pour un débat qui s’est déroulé toute la journée sur les ondes de la radio nationale, SAFM. Signe de la fragilité de la réconciliation nationale amorcée par la Commission vérité et réconciliation (TRC), la «mère de la Nation» a été défendue et critiquée avec la même ardeur. De nombreux auditeurs ont dénoncé le «racisme viscéral» d’un système judiciaire toujours contrôlé par des magistrats blancs. Le refus de l’ancien président Pieter Willem Botha de se présenter devant la TRC et l’acquittement, l’an dernier, du docteur Wouter Basson, spécialiste des armes chimiques pendant l’apartheid, ont suscité un nouveau tollé.
Helen Suzman, une voix blanche respectée pour son rôle pendant la lutte contre l’apartheid, a rappelé avec indignation qu’avec son bannissement et ses années d’isolement forcé, pendant l’apartheid, «Winnie a déjà payé à l’avance, et largement, pour tous les crimes qui peuvent lui être reprochés aujourd’hui». Toujours très populaire, la principale intéressée a accusé le choc sans émotion apparente. Prenant acte des conséquences de sa condamnation, elle a mis un point final à sa carrière politique, en annonçant hier sa démission de ses fonctions de députée, de présidente de la Ligue des femmes de l’ANC, et de membre des plus hautes instances exécutives du parti.
Winnie Mandela passe pour une victime
Depuis plusieurs années, l’héroïne de la résistance noire en Afrique du Sud a multiplié erreurs et revers. Ses premiers déboires avec la justice remontent à 1991. Un an après la libération de Nelson Mandela, le régime de l’apartheid l’a traduite en justice pour le meurtre présumé du jeune Stompie Sepei, membre d’un club de football qu’elle avait monté à Soweto. Condamnée à la prison, elle avait ensuite fait appel, et écopé d’une amende. Des révélations sur sa liaison avec l’un de ses gardes du corps avaient alors ébranlé sa relation avec Nelson Mandela. Deux ans avant leur divorce, en 1996, Winnie avait été écartée des cérémonies d’investiture de Nelson Mandela, élu président en avril 1994.
Un an plus tard, elle avait été limogée du poste de second rang qui lui avait été réservé au sein du gouvernement, en tant que vice-ministre des Arts et de la culture. Elle avait été à nouveau écartée du leadership, en 1997, avant un congrès de l’ANC marqué par son retrait de la course au poste de secrétaire général du parti.
Son silence et son refus de demander la moindre amnistie pendant les audiences de la Commission vérité et réconciliation (TRC) avaient un peu plus terni son image, mais pas sa popularité. Outre son absence remarquée au Parlement, plusieurs scandales l’ont éclaboussée. Soupçonnée de se livrer à un trafic de diamants, Winnie Mandela a reçu l’ordre de fermer, l’an dernier, le restaurant qu’elle avait ouvert juste en face de l’ancienne maison familiale des Mandela, transformée en musée à Soweto.
Neuf ans après les premières élections multiraciales, Winnie Mandela passe aux yeux de ses admirateurs pour une victime. Elle est sans doute aussi victime de la normalisation politique accomplie par la «nouvelle» Afrique du Sud. Impensable dans un autre pays d’Afrique, sa condamnation témoigne du fonctionnement indépendant de la justice sud-africaine, tout comme de la détermination du parti au pouvoir à lutter contre la corruption, y compris dans ses propres rangs. Un mois après une peine de 4 ans de prison ferme prononcée contre Tony Yengeni, ancien chef du groupe parlementaire de l’ANC, accusé d’avoir reçu un pot-de-vin, le jugement contre Winnie se veut tout aussi exemplaire.
par Sabine Cessou
Article publié le 25/04/2003