Attentats
Le journaliste vedette d’Al Jazira reste en prison
Le juge Garzon a décidé de maintenir en détention Tayssir Allouni, inculpé avec 34 autres personnes d’appartenance à Al Qaïda.
Mercredi, le célèbre juge antiterroriste Baltasar Garzon a inculpé Oussama Ben Laden et 34 autres personnes soupçonnés d’être membres d’Al Qaïda. Le magistrat, qui compte notamment à son actif l’interpellation à Londres du général Pinochet, l’inculpation d’anciens tortionnaires argentins, a demandé à Interpol de se saisir de Ben Laden. L’organisation policière internationale basée près de Lyon serait sûrement heureuse d’obliger le juge Garzon mais, à ce jour, les services secrets du monde entier s’y sont en vain essayés et il n’est pas sûr qu’ils y parviennent davantage à présent que Garzon a émis un mandat d’arrêt international.
Le magistrat espagnol n’est pas bredouille pour autant car parmi les 35 personnes inculpées figure un individu qu’il a fait mettre en prison le 5 septembre dernier et qui ne semble pas prêt d’en sortir, si l’on en juge par les charges relevées contre lui : Tayssir Allouni, journaliste vedette de la chaîne de télévision satellitaire Al Jazira, est en effet accusé d’être un membre d’Al Qaïda et d’avoir servi de messager et de financier de la cellule espagnole du réseau terroriste islamiste dont il serait, selon Garzon, l’un des «membres les plus éminents».
Tayssir Allouni, journaliste chevronné, était le seul correspondant étranger à Kaboul à l’époque des Taliban et avait pu obtenir des interviews avec Oussama Ben Laden avant les attentats du 11 septembre. Par la suite, c’est à lui qu’ont été remises les premières cassettes clandestines du leader d’Al Qaïda en fuite. Le rôle d’Al Jazira durant la guerre d’Afghanistan irritait à ce point les États-Unis que le bureau de la chaîne à Kaboul a été bombardé en novembre 2001 par l’aviation américaine. Deux ans plus tard, lorsque les forces américaines ont pénétré dans Bagdad, le bureau d’Al Jazira a été détruit par des obus américains, causant la mort d’un jeune reporter de la chaîne. Tayssir Allouni, qui se trouvait dans les locaux, en réchappait. Les Américains n’étaient pas les seuls à être mécontents du travail des correspondants de la chaîne qatarienne. Quelques jours avant la chute de Bagdad, le ministre irakien de l’Information avait menacé d’expulsion Taysir Allouni et son infortuné collègue pour ne pas avoir respecté les interdictions de tournage édictées par le régime de Saddam Hussein.
Allouni, de nationalité espagnole mais d’origine syrienne, travaillait à Grenade, en Espagne au service arabe de l’agence de presse EFE avant de rejoindre Al Jazira. C’est d’ailleurs à son domicile de Grenade, ou vit son épouse, une Espagnole musulmane originaire de Ceuta, qu’Allouni a été arrêté.
Mobilisation des journalistes
Depuis le 5 septembre, ses collègues d’Al Jazira se sont mobilisés en sa faveur. Tandis que la direction de la chaîne exprime son espoir que Tayssir Allouni bénéficie d’un procès équitable, ses collègues arborent un badge à son effigie exigeant sa libération. La Fédération internationale des journalistes (FIJ), qui représente près de 500 000 journalistes à travers le monde, a également protesté contre son arrestation. Pour le secrétaire général de la FIJ Aidan White, «intimider le messager n’est pas la réponse au terrorisme». La presse espagnole a également décidé de se mobiliser en faveur du journaliste d’Al Jazira : la Fédération des associations de presse en Espagne a fourni l’un des avocats qui assistaient Tayssir Allouni lors de sa comparution devant le juge Garzon. Pour le secrétaire général de la Fédération, José Maria Torre Cervignon, «nous n’appuierons jamais l’impunité, si un journaliste a commis un délit, il n’y a pas de raison qu’il bénéficie de privilèges, mais en premier lieu, il y a la présomption d’innocence».
Les avocats du journaliste avaient demandé sa mise en liberté provisoire, arguant notamment de sa mauvaise condition physique. Allouni souffre en effet d’hernies discales et de problèmes cardiaques qui lui ont valu d’être opéré en Irak voici quelques mois. Mais Baltasar Garzon refuse de se laisser impressionner et a décidé son maintien en détention, soulignant que les éléments à charge retenus contre Tayssir Allouni n’ont «rien à voir» avec son activité de journaliste.
En tout cas, Tayssir Allouni n’a rien perdu de ses réflexes professionnels ni, semble-t-il, de son sens de l’humour. Lors de sa comparution, il a en effet demandé au juge Garzon de lui accorder une interview exclusive pour Al Jazira !
Le magistrat espagnol n’est pas bredouille pour autant car parmi les 35 personnes inculpées figure un individu qu’il a fait mettre en prison le 5 septembre dernier et qui ne semble pas prêt d’en sortir, si l’on en juge par les charges relevées contre lui : Tayssir Allouni, journaliste vedette de la chaîne de télévision satellitaire Al Jazira, est en effet accusé d’être un membre d’Al Qaïda et d’avoir servi de messager et de financier de la cellule espagnole du réseau terroriste islamiste dont il serait, selon Garzon, l’un des «membres les plus éminents».
Tayssir Allouni, journaliste chevronné, était le seul correspondant étranger à Kaboul à l’époque des Taliban et avait pu obtenir des interviews avec Oussama Ben Laden avant les attentats du 11 septembre. Par la suite, c’est à lui qu’ont été remises les premières cassettes clandestines du leader d’Al Qaïda en fuite. Le rôle d’Al Jazira durant la guerre d’Afghanistan irritait à ce point les États-Unis que le bureau de la chaîne à Kaboul a été bombardé en novembre 2001 par l’aviation américaine. Deux ans plus tard, lorsque les forces américaines ont pénétré dans Bagdad, le bureau d’Al Jazira a été détruit par des obus américains, causant la mort d’un jeune reporter de la chaîne. Tayssir Allouni, qui se trouvait dans les locaux, en réchappait. Les Américains n’étaient pas les seuls à être mécontents du travail des correspondants de la chaîne qatarienne. Quelques jours avant la chute de Bagdad, le ministre irakien de l’Information avait menacé d’expulsion Taysir Allouni et son infortuné collègue pour ne pas avoir respecté les interdictions de tournage édictées par le régime de Saddam Hussein.
Allouni, de nationalité espagnole mais d’origine syrienne, travaillait à Grenade, en Espagne au service arabe de l’agence de presse EFE avant de rejoindre Al Jazira. C’est d’ailleurs à son domicile de Grenade, ou vit son épouse, une Espagnole musulmane originaire de Ceuta, qu’Allouni a été arrêté.
Mobilisation des journalistes
Depuis le 5 septembre, ses collègues d’Al Jazira se sont mobilisés en sa faveur. Tandis que la direction de la chaîne exprime son espoir que Tayssir Allouni bénéficie d’un procès équitable, ses collègues arborent un badge à son effigie exigeant sa libération. La Fédération internationale des journalistes (FIJ), qui représente près de 500 000 journalistes à travers le monde, a également protesté contre son arrestation. Pour le secrétaire général de la FIJ Aidan White, «intimider le messager n’est pas la réponse au terrorisme». La presse espagnole a également décidé de se mobiliser en faveur du journaliste d’Al Jazira : la Fédération des associations de presse en Espagne a fourni l’un des avocats qui assistaient Tayssir Allouni lors de sa comparution devant le juge Garzon. Pour le secrétaire général de la Fédération, José Maria Torre Cervignon, «nous n’appuierons jamais l’impunité, si un journaliste a commis un délit, il n’y a pas de raison qu’il bénéficie de privilèges, mais en premier lieu, il y a la présomption d’innocence».
Les avocats du journaliste avaient demandé sa mise en liberté provisoire, arguant notamment de sa mauvaise condition physique. Allouni souffre en effet d’hernies discales et de problèmes cardiaques qui lui ont valu d’être opéré en Irak voici quelques mois. Mais Baltasar Garzon refuse de se laisser impressionner et a décidé son maintien en détention, soulignant que les éléments à charge retenus contre Tayssir Allouni n’ont «rien à voir» avec son activité de journaliste.
En tout cas, Tayssir Allouni n’a rien perdu de ses réflexes professionnels ni, semble-t-il, de son sens de l’humour. Lors de sa comparution, il a en effet demandé au juge Garzon de lui accorder une interview exclusive pour Al Jazira !
par Olivier Da Lage
Article publié le 18/09/2003