Proche-Orient
Powell s'intéresse à l'accord de Genève
Au grand dépit du gouvernement d'Ariel Sharon, le secrétaire d'État américain a rencontré vendredi deux des avocats de l'accord de Genève, destiné à sortir la feuille de route de l'ornière, en marge des négociations officielles. La rencontre signale l'impatience de Washington à l'égard de son allié israélien.
De notre correspondant à New York
La diplomatie se nourrit de signaux subtils. En rencontrant discrètement au département d'Etat les deux promoteurs de l'accord de Genève, Colin Powell ouvre une brèche dans les relations israélo-américaines. Le soutient sans réserve de l'administration Bush à l'égard du gouvernement d'Ariel Sharon est-il sur le point d'atteindre ses limites ? La question est désormais légitime. «Nous avons été encouragés aujourd'hui par les paroles du secrétaire Powell, de même que nous avons été encouragés hier par les mots du président (Bush)», a déclaré après l'entretien l'ancien ministre de l'information palestinien Abed Rabbo, qui s'exprimait aux côtés du co-auteur de l'accord de Genève, l'ancien ministre israëlien de la justice, Yossi Beilin.
Les deux hommes venaient de passer deux heures au département d'Etat, où ils ont notamment rencontré Colin Powell, le spécialiste du dossier William Burns, ainsi que Elliott Abrams, qui fait partie du Conseil de sécurité nationale du président Bush. La rencontre, entourée d'incertitudes jusqu'à la dernière minute, confère une légitimité supplémentaire à l'initiative de Genève, négociée en marge de la feuille de route par des militants de la paix des deux camps. L'accord, qui se veut un complément de la feuille de route entérinée par le Quartette (États-Unis, UE, Russie et ONU), prévoit le retrait de la plupart des colonies israéliennes, en échange d'un abandon du droit au retour de la plupart des Palestiniens qui ont quitté Israël au moment de sa création, en 1948. Jérusalem serait divisée, et deviendrait la capitale des deux États.
Mise en garde à Sharon
Le gouvernement d'Ariel Sharon est furieux de la rencontre, qui confère une onction américaine à une initiative qu'Israël a tout fait pour tuer dans l’œuf. «Les décisions concernant l’avenir du processus de paix seront prises par le gouvernement élu, et pas par qui que ce soit d'autre, et surtout pas par des individus qui n'ont aucune base politique en Israël», a déclaré à Reuters un officiel israélien. Mais plus rien ne semble de nature à arrêter l'initiative, puisant ses racines dans la société civile. Car le président Bush, en des termes prudemment choisis, a tranché. L'accord de Genève peut selon lui constituer une contribution «constructive», dans la mesure où sont respectés certains principes qu'il a détaillés : «Nous devons combattre la terreur, la sécurité doit être rétablie, et un État palestinien démocratique et libre doit émerger». George Bush ne jette donc pas tout son poids derrière l'accord de Genève, mais il donne sa bénédiction à Colin Powell pour explorer de nouvelles pistes. C'est «une opportunité pour nous de parler à des gens qui partagent notre engagement pour la paix et la stabilité dans la région et sur la façon d'y arriver», a expliqué hier le porte-parole de la Maison Blanche, Scott McClellan.
Après l'opposition violente d'Ariel Sharon au plan, dénoncé comme «un complot» destiné à le «déstabiliser», le président américain adresse ainsi une mise en garde au gouvernement israélien, qui refuse de mettre un terme à l'expansion des colonies en territoire palestinien et à la construction d'une «barrière de sécurité» jugée illégale par l'ONU. Mais alors que l'administration Bush passe en mode de campagne électorale, elle se doit d'agir avec tact et discrétion, pour ne pas s'aliéner l'électorat juif. Colin Powell n'a donné aucune conférence de presse à la suite de la rencontre, qui s'est déroulée loin des caméras. «Nous sortons de cet entretien plus convaincus que jamais que la feuille de route est la marche à suivre» a assuré un porte-parole du département d'Etat selon qui «un accord de paix entre Israéliens et Palestiniens sera décidé uniquement par les gouvernements, il n'y a aucun doute là-dessus». Le vice-secrétaire d'État à la défense, Paul Wolfowitz, un des plus fervents soutiens d'Ariel Sharon, a pour sa part annulé sa rencontre avec Abed Rabbo et Yossi Beilin. Même chose pour la conseillère à la sécurité nationale, Condoleezza Rice, qui a refusé de rencontrer les deux hommes.
Ils ont trouvé une meilleure réception à l'ONU, où Kofi Annan s'est de nouveau entretenu avec eux. Le secrétaire général de l'organisation encourage l'initiative, qui selon lui complète la feuille de route et peut en faciliter l'application, surtout dans sa phase finale -une position partagée par l'Union européenne-, sans toutefois se substituer aux négociations directes entre le gouvernement israélien et l'autorité palestinienne. Ariel Sharon semble de son côté s'isoler un peu plus. Selon un sondage du journal Maariv, seulement 33% des Israéliens sont satisfaits de son action, contre 59% de mécontents, un record depuis sa réélection en février. Ce même sondage montre aussi que seulement 29% des Israéliens soutiennent les accords de Genève, dont les auteurs sont convaincus qu'ils doivent maintenant convaincre les opinions publiques israéliennes et palestinienne du bien-fondé de leur démarche.
La diplomatie se nourrit de signaux subtils. En rencontrant discrètement au département d'Etat les deux promoteurs de l'accord de Genève, Colin Powell ouvre une brèche dans les relations israélo-américaines. Le soutient sans réserve de l'administration Bush à l'égard du gouvernement d'Ariel Sharon est-il sur le point d'atteindre ses limites ? La question est désormais légitime. «Nous avons été encouragés aujourd'hui par les paroles du secrétaire Powell, de même que nous avons été encouragés hier par les mots du président (Bush)», a déclaré après l'entretien l'ancien ministre de l'information palestinien Abed Rabbo, qui s'exprimait aux côtés du co-auteur de l'accord de Genève, l'ancien ministre israëlien de la justice, Yossi Beilin.
Les deux hommes venaient de passer deux heures au département d'Etat, où ils ont notamment rencontré Colin Powell, le spécialiste du dossier William Burns, ainsi que Elliott Abrams, qui fait partie du Conseil de sécurité nationale du président Bush. La rencontre, entourée d'incertitudes jusqu'à la dernière minute, confère une légitimité supplémentaire à l'initiative de Genève, négociée en marge de la feuille de route par des militants de la paix des deux camps. L'accord, qui se veut un complément de la feuille de route entérinée par le Quartette (États-Unis, UE, Russie et ONU), prévoit le retrait de la plupart des colonies israéliennes, en échange d'un abandon du droit au retour de la plupart des Palestiniens qui ont quitté Israël au moment de sa création, en 1948. Jérusalem serait divisée, et deviendrait la capitale des deux États.
Mise en garde à Sharon
Le gouvernement d'Ariel Sharon est furieux de la rencontre, qui confère une onction américaine à une initiative qu'Israël a tout fait pour tuer dans l’œuf. «Les décisions concernant l’avenir du processus de paix seront prises par le gouvernement élu, et pas par qui que ce soit d'autre, et surtout pas par des individus qui n'ont aucune base politique en Israël», a déclaré à Reuters un officiel israélien. Mais plus rien ne semble de nature à arrêter l'initiative, puisant ses racines dans la société civile. Car le président Bush, en des termes prudemment choisis, a tranché. L'accord de Genève peut selon lui constituer une contribution «constructive», dans la mesure où sont respectés certains principes qu'il a détaillés : «Nous devons combattre la terreur, la sécurité doit être rétablie, et un État palestinien démocratique et libre doit émerger». George Bush ne jette donc pas tout son poids derrière l'accord de Genève, mais il donne sa bénédiction à Colin Powell pour explorer de nouvelles pistes. C'est «une opportunité pour nous de parler à des gens qui partagent notre engagement pour la paix et la stabilité dans la région et sur la façon d'y arriver», a expliqué hier le porte-parole de la Maison Blanche, Scott McClellan.
Après l'opposition violente d'Ariel Sharon au plan, dénoncé comme «un complot» destiné à le «déstabiliser», le président américain adresse ainsi une mise en garde au gouvernement israélien, qui refuse de mettre un terme à l'expansion des colonies en territoire palestinien et à la construction d'une «barrière de sécurité» jugée illégale par l'ONU. Mais alors que l'administration Bush passe en mode de campagne électorale, elle se doit d'agir avec tact et discrétion, pour ne pas s'aliéner l'électorat juif. Colin Powell n'a donné aucune conférence de presse à la suite de la rencontre, qui s'est déroulée loin des caméras. «Nous sortons de cet entretien plus convaincus que jamais que la feuille de route est la marche à suivre» a assuré un porte-parole du département d'Etat selon qui «un accord de paix entre Israéliens et Palestiniens sera décidé uniquement par les gouvernements, il n'y a aucun doute là-dessus». Le vice-secrétaire d'État à la défense, Paul Wolfowitz, un des plus fervents soutiens d'Ariel Sharon, a pour sa part annulé sa rencontre avec Abed Rabbo et Yossi Beilin. Même chose pour la conseillère à la sécurité nationale, Condoleezza Rice, qui a refusé de rencontrer les deux hommes.
Ils ont trouvé une meilleure réception à l'ONU, où Kofi Annan s'est de nouveau entretenu avec eux. Le secrétaire général de l'organisation encourage l'initiative, qui selon lui complète la feuille de route et peut en faciliter l'application, surtout dans sa phase finale -une position partagée par l'Union européenne-, sans toutefois se substituer aux négociations directes entre le gouvernement israélien et l'autorité palestinienne. Ariel Sharon semble de son côté s'isoler un peu plus. Selon un sondage du journal Maariv, seulement 33% des Israéliens sont satisfaits de son action, contre 59% de mécontents, un record depuis sa réélection en février. Ce même sondage montre aussi que seulement 29% des Israéliens soutiennent les accords de Genève, dont les auteurs sont convaincus qu'ils doivent maintenant convaincre les opinions publiques israéliennes et palestinienne du bien-fondé de leur démarche.
par Philippe Bolopion
Article publié le 06/12/2003