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Epidémie

Grippe aviaire : stopper le virus avant qu’il ne mute

Le nombre de pays touchés par l’épidémie de grippe aviaire ne cesse d’augmenter. Ils sont désormais dix à compter des élevages de poulets infectés et deux à avoir enregistré des contaminations humaines. Face à cette extension ininterrompue de l’épidémie et devant les réticences des gouvernements des Etats concernés à reconnaître l’apparition de cas sur leur territoire, l’Organisation mondiale de la Santé ne cesse de mettre en garde contre les dangers d’une dissimulation des faits et rappelle que pour lutter contre la propagation de ce virus qui a déjà provoqué la mort de dix personnes, comme pour celui du SRAS en 2003, l’échange d’informations et la coordination des actions sont indispensables.
Agir, et vite. Pour les responsables de l’Organisation mondiale de la Santé (OMS), c’est le seul moyen d’éviter que le virus grippal aviaire H5N1, l’une des souches les plus dangereuses, qui frappe actuellement les poulets asiatiques, ne trouve le moyen de combiner ses effets avec celui de la grippe humaine. Car dans ce cas, un nouveau sous-type transmissible d’un homme à l’autre, et non plus seulement d’un volatile à un homme, pourrait apparaître. La progression du virus deviendrait alors terriblement difficile à endiguer. Certainement encore plus que dans le cas du SRAS qui a contaminé des milliers de personnes en 2003 et a fait environ 800 victimes. L’OMS a même prévenu que dans une telle configuration pandémique, le virus de la grippe aviaire mutant aurait le «potentiel de tuer des millions de personnes».

Certains scientifiques affirment, en effet, que le virus de la grippe aviaire pourrait être trois fois plus contagieux que celui du SRAS, par exemple. Mais surtout, il provoquerait une mortalité très importante. Le virologue Lance Jennings, de Christchurch en Nouvelle-Zélande, qui collabore avec l’OMS dans la région Asie-Pacifique, a ainsi déclaré que le taux de mortalité chez les personnes contaminées par le H5N1, qui sévit actuellement en Asie, était «très élevé». Selon lui, trois malades sur quatre seraient susceptibles de décéder des suites de leur infection par ce virus. Ces chiffres restent malgré tout à prendre avec précaution en l’absence, pour le moment, de données sur le nombre exact de personnes contaminées.

Chaque jour de nouveaux foyers

La confirmation de l’entrée de la Chine dans le cercle des pays asiatiques touchés par la grippe aviaire, que l’on soupçonnait déjà depuis plusieurs jours, a encore accentué les craintes d’une explosion de l’épidémie. Des foyers ont été signalés dans trois provinces (Guangxi, Hubei, Hunan) et le propriétaire d’un élevage de canards contaminés a été placé en observation. Jeffrey Gilbert, spécialiste des transmissions des maladies de l’animal à l’homme à l’OMS a déclaré : «Si vous regardez la carte de la Chine, c’est l’équivalent d’infections simultanées dans trois ou quatre pays». Et il semble que le plus grand danger vient de cette apparition, chaque jour, de nouveaux foyers de grippe aviaire. Une telle multiplication montre que malgré les abattages déjà effectués, le virus continue à se propager.

C’est donc pour éviter d’arriver à une catastrophe sanitaire provoquée par un virus devenu incontrôlable que l’OMS mais aussi l’Organisation des Nations unies pour l’Agriculture et l’Alimentation (FAO) et l’Office international des Epizooties (OIE), ont appelé à une mobilisation internationale en faveur de la lutte contre la grippe aviaire, en incitant notamment les pays donateurs à débloquer des fonds et à apporter un soutien technique aux pays touchés par le virus pour qu’ils puissent procéder à l’abattage des volailles et éradiquer la source de contamination. Pour Lee Jong-Wook, le directeur général de l’OMS : «Nous avons la possibilité de combattre la maladie avant qu’elle ne prenne des proportions mondiales, à condition de coopérer et de mettre en commun les ressources nécessaires».

Il est vrai que l’OMS s’est plainte depuis le début de cette crise sanitaire de la mauvaise volonté des Etats touchés et du manque de transparence dans la gestion de la crise. Plusieurs d’entre eux ont été accusés d’avoir délibérément dissimulé la réalité et donc d’avoir reculé inutilement le moment de la prise en charge de l’épidémie. Au risque de multiplier les chances de contaminations humaines. Le Vietnam, l’Indonésie, la Thaïlande, la Chine font partie des pays mis en cause à ce propos.

Les choses semblent néanmoins en voie d’amélioration de ce point de vue puisque plusieurs Etats ont répondu présent à l’invitation de la Thaïlande à participer à une réunion, le 28 janvier à Bangkok, pour renforcer la coopération régionale et internationale. Les représentants de huit des dix pays dont les élevages sont touchés par la grippe aviaire (Chine, Cambodge, Corée du Sud, Indonésie, Japon, Laos, Vietnam et le pays hôte) se sont donc retrouvés avec ceux de deux pays pour le moment indemnes, la Malaisie et Singapour, des organisations internationales (OMS, FAO, OIE), de l’Union européenne et des Etats-Unis, pour discuter des mesures nécessaires pour stopper le virus. Ils ont affirmé leur volonté d’améliorer «la transparence» et la «coopération régionale» en matière d’échange d’informations et de recherche médicale. Ils se sont aussi engagés à étudier la mise en place d’un réseau régional de surveillance vétérinaire. Et dans l’immédiat, ils ont décidé d’appliquer les mesures de contrôle recommandées par l’OMS : abattage, quarantaine et surveillance.

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par Valérie  Gas

Article publié le 28/01/2004