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Epidémie

SRAS : la chasse à la civette est ouverte

Le malade chinois hospitalisé depuis le 20 décembre dans un hôpital de Canton est bien atteint du syndrome respiratoire aigu sévère (SRAS). L’Organisation mondiale de la Santé et les autorités chinoises ont confirmé ce diagnostic. Pour le moment, il s’agirait d’un cas isolé et la contamination par un autre humain porteur du SRAS n’est pas envisagée. Par contre, la civette qui pourrait être le vecteur du virus, est montrée du doigt et les autorités chinoises ont décidé d’abattre ces petits mammifères, dont la viande est très appréciée dans la province de Guangdong, au sud de la Chine.
D’ici le 10 janvier, 10 000 civettes devraient être passées de vie à trépas dans la région de Canton. Le gouvernement chinois a décidé d’appliquer le principe de précaution en éliminant ces mammifères à fourrure de la taille d’un chat qui sont soupçonnés, depuis la première épidémie de SRAS entre novembre 2002 et juillet 2003, d’être les vecteurs du virus. Les analyses réalisées pour déterminer si le jeune homme de 32 ans suivi à l’hôpital numéro 8 de Canton depuis plus de dix jours était bien atteint de pneumonie atypique, ont ravivé les craintes concernant ce mammifère couramment vendu dans les marchés aux animaux sauvages de la région. Elles ont, en effet, mis en évidence une similarité entre la séquence génétique du coronavirus détecté chez le malade, qui semble avoir muté depuis la dernière épidémie, et celui dont la civette est porteuse. Ajouté au fait que la plupart des membres de l’entourage du malade mis en quarantaine semblent être indemnes (une trentaine sont d’ailleurs déjà rentrés chez eux), l’hypothèse d’un cas isolé lié à une contamination d’origine animale a été vite privilégiée.

Du coup, le gouvernement de la province a pris la décision de fermer les marchés aux animaux sauvages et de procéder à la capture de toutes les civettes en circulation dans les élevages, les marchés et les restaurants, qui doivent être tuées dans les prochains jours. Il s’agit «d’une mesure d’urgence destinée à empêcher une nouvelle épidémie». Les civettes ont donc d’ores et déjà commencé à être abattues selon une procédure définie par les autorités sanitaires chinoises. Les animaux sont d’abord regroupés dans des cages puis noyés dans des bassins contenant des produits désinfectants. Les cadavres sont ensuite incinérés.

Eviter un commerce clandestin

Malgré les précautions annoncées officiellement par les Chinois, l’Organisation mondiale de la Santé (OMS) a émis quelques réserves sur les conditions dans lesquelles est réalisé l’abattage systématique des civettes. Elle craint, en effet, que des contaminations aient lieu par contact avec le sang des petits mammifères qui pourraient être porteurs du virus, à l’occasion de ces opérations. D’autre part, l’OMS préconise de réaliser des tests sur d’autres animaux car la culpabilité de la seule civette n’a pas été confirmée. Roy Wadia, le porte-parole de l’organisation à Pékin, a d’ailleurs expliqué qu’il fallait davantage de recherches pour déterminer «quel animal est l’origine de la contamination et comment le virus a été transmis à l’homme». L’OMS estime aussi que la campagne d’abattage des civettes telle qu’elle a été engagée par les autorités chinoises, fait courir le risque d’inciter les marchés d’animaux sauvages à opérer dans la clandestinité. La viande de civette est, en effet, très prisée dans la région de Guangdong d’où est partie l’épidémie de SRAS et l’arrêt de sa commercialisation, qui a déjà eu lieu pendant quelques temps en 2003, pourrait de nouveau provoquer la grogne des vendeurs d’animaux et des consommateurs. Et donc créer des conditions propices au développement d’un marché parallèle. Ce qui rendrait encore plus difficile la gestion d’une éventuelle propagation du virus.

Par contre, l’OMS a fait part de sa satisfaction face à l’attitude globale des autorités chinoises concernant le SRAS. La collaboration est, cette année, bien meilleure et les informations circulent, ce qui représente une nette amélioration. Le système de surveillance a été amélioré. Aux frontières de la province de Guangdong, mais aussi dans les aéroports et les gares, la température des voyageurs est contrôlée pour identifier toute personne potentiellement contaminée et éviter une éventuelle propagation du virus.

Car une résurgence de l’épidémie n’est pas exclue. Pour le moment, et même si le malade chinois est le troisième à être détecté depuis la fin officielle de l’épidémie en juillet 2003 (les deux premiers étaient des chercheurs contaminés à l’occasion de manipulations de laboratoire à Singapour et Taïwan), aucun spécialiste n’a estimé que c’était le cas. Mais si une nouvelle flambée épidémique venait à se déclarer, l’OMS affirme qu’il serait désormais possible de maîtriser la propagation du virus. Julie Hall, la responsable de l’équipe qui travaille sur le SRAS au sein de l’organisation, a ainsi estimé : «Peut-être y aura-t-il quelques cas ou même des groupes de cas. Mais s’ils sont isolés suffisamment tôt, la maladie peut être contrôlée et la chaîne de transmission rompue».



par Valérie  Gas

Article publié le 06/01/2004