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Rwanda

A Bruxelles, Kagame s’affirme incontournable

Le président Paul Kagame s’est rendu en visite officielle en Belgique du 10 au 11 mars. A un mois de la célébration du dixième anniversaire du génocide, cette visite a été chahutée par des accusations de responsabilité de Paul Kagame dans l’assassinat de son prédécesseur, Juvénal Habyarimana, le 6 avril 1994.
Paul Kagame a effectué une visite officielle de trois jours en Belgique, à la tête d’une importante délégation. Donald Kabureka, ministre des Finances et Charles Murigande, ministre des Affaires étrangères l’ont accompagné pour cette deuxième visite en moins de deux ans dans le pays colonisateur. Le président rwandais a voulu faire de ce voyage un moment symbolique dans les relations de son pays avec la communauté internationale. Il a d’abord rencontré les plus hautes autorités belges, du roi Albert II au Premier ministre Guy Verhofstadt, en passant par le ministre des Affaires étrangères, Louis Michel. De nombreux responsables de l’Union européenne ont également reçu la visite du président rwandais.

Paul Kagame était aussi à Bruxelles, capitale européenne, pour sensibiliser et mobiliser l’opinion internationale autour de la célébration du dixième anniversaire du génocide des Tutsi du Rwanda. Le président Paul Kagame s’était dit sensible aux «excuses», au nom de la nation belge exprimée par le Premier ministre Guy Verhofstadt lors d’une visite en avril 2000 à Kigali, «pour la passivité observée par son pays lors du génocide». Il lui a rendu la politesse en se rendant à Bruxelles pour annoncer la célébration de ce dixième anniversaire. Par ailleurs le rapprochement entre les deux pays s’est manifesté par la place qu’accordent les autorités belges à Paul Kagame dans le règlement des conflits dans la région des Grands Lacs en Afrique.

La visite de Paul Kagame en Belgique après celle de Joseph Kabila, président de la République démocratique du Congo, du 8 au 11 février dernier, n’est pas due non plus au hasard du calendrier. Le chef de l’Etat rwandais, entend affirmer son autorité, et signifier autant que faire se peut, que la paix dans la région ne peut se négocier en dehors de lui.

Une visite chahutée

C’est dans ce contexte que le Monde, quotidien français, fait des révélations sur l’implication présumée de Paul Kagame dans la destruction de l’avion qui transportait l’ancien président rwandais Juvénal Habyarimana, le 6 avril 1994. Cet attentat avait marqué le début du génocide. Le quotidien français affirme avoir tiré ses informations d’un rapport du juge anti-terroriste Jean-Louis Bruguière, dans lequel Paul Kagame apparaît comme le principal «décisionnaire» et faisant partie d’un groupe d’officiers supérieurs du Front populaire rwandais (FPR). Ce mouvement rebelle tutsi est depuis 1994 au pouvoir au Rwanda.

Paul Kagame a déclaré en réponse que «ces accusations n’étaient pas nouvelles» et a démenti toute implication dans cet attentat. Pour de nombreuses autorités du FPR, la collusion entre les services français est évidente. La publication des conclusions dudit rapport à la veille de la commémoration du dixième anniversaire du génocide et pendant la visite de Paul Kagame en Belgique ne doit rien au hasard. «Certains en France ont du sang sur les mains depuis le génocide au Rwanda. Ils n’ont jamais reconnu cela. Ils n’ont jamais modifié leurs positions. Ils ont continué à attiser différents problèmes au Rwanda. Ils ne nous ont jamais aidé dans notre processus pour reconstruire le pays», a déclaré Paul Kagame.

Enfin, profitant de cette visite du président rwandais en Belgique, l’Alliance pour la démocratie et la réconciliation nationale, Alliance Igihango (pacte de sang en Kinyarwanda), une plateforme de l’opposition rwandaise en exil a demandé aux autorités belges de faire pression sur lui pour qu’il s’engage «sur la voie d’une démocratisation authentique». L’Alliance Igihango qui regroupe plusieurs mouvements politiques dénonce des élections «truquées», la «mainmise du FRP sur les institutions du pays» et réclame la tenue d’un «dialogue inter-rwandais».



par Didier  Samson

Article publié le 12/03/2004