Etats-Unis
John Kerry, champion des Démocrates
Au terme du «Super Tuesday», la journée décisive dans la longue série des primaires pour l'investiture démocrate à la présidentielle américaine, John Kerry émerge comme l'opposant incontesté de George W. Bush. Les deux hommes s'affronteront en novembre. Principaux enjeux : terrorisme et économie.
De notre correspondant à New York
John Kerry a réussi l'impossible. Après avoir végété dans les confins des sondages, il émerge aujourd'hui comme le favori des Démocrates pour la présidentielle de novembre prochain. Il affrontera donc George W. Bush. Incontesté dans son parti, le président américain n'a pas eu à traverser l'épreuve difficile des primaires. Le sénateur du sud John Edwards, le dernier opposant sérieux à faire face à John Kerry, devait annoncer officiellement aujourd'hui son retrait de la course. Lui-même un challenger, il a été littéralement balayé par la vague Kerry, y compris dans ses bastions du sud. Les États de New York et de la Californie ont aussi favorisé l'expérience sur la jeunesse. John Kerry «a mené une campagne énergique, puissante. Il a été un excellent avocat pour les causes dans lesquelles nous croyons tous : plus d'emploi, un meilleur système de santé, un environnement plus propre, un monde plus sûr», a déclaré mardi soir John Edwards, sans aller toutefois jusqu'à mettre un terme officiel à sa candidature.
L'avocat au sourire enfantin et aux accents du sud a créé la surprise au cours des primaires en émergeant comme un des candidats les plus sérieux. Il a surpassé le favori de la première heure, Howard Dean, qui après avoir dynamisé la campagne démocrate contre la guerre en Irak et motivé une nouvelle génération de militants n'a jamais réussi à transformer ce mouvement populaire en vote. Mais pour John Edwards, ce n'est peut-être pas la fin de l'aventure. De nombreux commentateurs estiment qu'il ferait un parfait vice-président aux côtés de John Kerry. Il permettrait de balancer la rigueur et l'image aristocratique du sénateur du Massachusetts, en s'adressant à l'Amérique rurale et aux travailleurs des industries en perte de vitesse comme le textile, dont sa famille est issue.
Avant-goût d'une campagne sanglante
Rayonnant de bonheur aux côtés de son épouse Teresa, l'héritière de la fortune Heinz (le ketchup), enfin débarrassé de ses rivaux Démocrates, John Kerry semblait impatient d'entamer sa campagne contre George W. Bush. «Je suis un combattant, et pendant plus de 30 ans, j'ai été sur les champs de bataille, sur les lignes de front, pour la justice et les valeurs de l'Amérique», a déclaré le vétéran du Vietnam, décoré à plusieurs reprises. Après le raz-de-marée d'hier soir, John Kerry peut se targuer d'avoir remporté 27 des 30 premières primaires, y-compris dans des endroits comme l'Ohio, durement frappé par le chômage et où John Edwards espérait réinventer sa campagne. Il a notamment remporté un franc succès parmi les électeurs noirs. «Le président Clinton était souvent décrit comme le premier président Noir. Je ne serais pas fâché si je pouvais gagner le droit d'être le second», a déclaré John Kerry sur une radio. Seul le Vermont lui a échappé mardi, tombant aux mains de Howard Dean qui en fut le gouverneur, et dont le nom figurait encore sur les bulletins de vote.
Au cours des primaires, le sénateur du Massachusetts a réservé une bonne partie de ses attaques au président Bush. Mais hier soir, il voulait déjà en découdre. «Si George Bush veut faire de la sécurité nationale le thème central en 2004, j'ai pour lui trois mots que je sais qu'il comprend : ‘qu'il y vienne !’ (Bring It On)» (George Bush avait été très critiqué pour avoir lancé la même injonction aux insurgés irakiens qui attaquent les troupes américaines). Son aura de héros du Vietnam et sa longue expérience dans les affaires internationales ont fait de Kerry le candidat idéal pour affronter le président Bush sur son terrain de prédilection : la guerre contre le terrorisme. Beau joueur, le président américain a appelé hier soir John Kerry pour le féliciter de sa victoire.
Un peu plus tôt pourtant, son vice-président Dick Cheney s'en est pris au sénateur du Massachusetts, attaquant ses votes au Congrès «pour tailler dans le budget de la défense, tailler dans le budget de l'intelligence et pour éliminer les principaux programmes d'armement». Ceci est uniquement un avant-goût d'une campagne que les experts annoncent sanglante. Rarement de mémoire récente le pays a été aussi divisé. Les Démocrates sont très remontés contre le président Bush et font de son éviction une priorité absolue. John Kerry a été choisi non pas parce qu'il était réellement leur candidat préféré (le titre revient sans doute à Howard Dean) mais plutôt parce qu'il est perçu comme étant le plus à même de battre l'occupant de la Maison Blanche. «Nous ne nous faisons aucune illusion sur la machine d'attaque républicaine et sur ce que nos opposants ont fait dans le passé et sur ce qu'ils pourraient faire dans le futur» a poursuivi John Kerry, «mais je sais qu'ensemble nous sommes à la hauteur de la tâche». Il a d'ores et déjà été brièvement accusé d'avoir une affaire extra-conjugale, avant que la pseudo-révélation ne s'écroule d'elle-même.
Les Républicains attaquent souvent John Kerry sur l'inconsistance de ses positions -il a voté pour la guerre en Irak avant de la critiquer. Mais le candidat démocrate a marqué des points en promettant d'annuler les réductions d'impôts qui favorisent les plus riches et dont le président Bush a fait le centre de son programme économique. Le sénateur de la côte est fait également campagne sur l'éducation, la santé et l'environnement. Il est pour l'instant en position de force et les sondages le donnent vainqueur contre George Bush, affaibli par les difficultés des troupes américaines en Irak et l'absence des armes de destruction massives annoncées. Mais le président américain ne fait que commencer sa campagne, et il dispose d'une cagnotte de guerre patiemment amassée (près de 140 millions de dollars), qui va lui permettre de payer des millions de dollars de spots télévisés dont les premiers devraient être diffusés dès jeudi.
John Kerry a réussi l'impossible. Après avoir végété dans les confins des sondages, il émerge aujourd'hui comme le favori des Démocrates pour la présidentielle de novembre prochain. Il affrontera donc George W. Bush. Incontesté dans son parti, le président américain n'a pas eu à traverser l'épreuve difficile des primaires. Le sénateur du sud John Edwards, le dernier opposant sérieux à faire face à John Kerry, devait annoncer officiellement aujourd'hui son retrait de la course. Lui-même un challenger, il a été littéralement balayé par la vague Kerry, y compris dans ses bastions du sud. Les États de New York et de la Californie ont aussi favorisé l'expérience sur la jeunesse. John Kerry «a mené une campagne énergique, puissante. Il a été un excellent avocat pour les causes dans lesquelles nous croyons tous : plus d'emploi, un meilleur système de santé, un environnement plus propre, un monde plus sûr», a déclaré mardi soir John Edwards, sans aller toutefois jusqu'à mettre un terme officiel à sa candidature.
L'avocat au sourire enfantin et aux accents du sud a créé la surprise au cours des primaires en émergeant comme un des candidats les plus sérieux. Il a surpassé le favori de la première heure, Howard Dean, qui après avoir dynamisé la campagne démocrate contre la guerre en Irak et motivé une nouvelle génération de militants n'a jamais réussi à transformer ce mouvement populaire en vote. Mais pour John Edwards, ce n'est peut-être pas la fin de l'aventure. De nombreux commentateurs estiment qu'il ferait un parfait vice-président aux côtés de John Kerry. Il permettrait de balancer la rigueur et l'image aristocratique du sénateur du Massachusetts, en s'adressant à l'Amérique rurale et aux travailleurs des industries en perte de vitesse comme le textile, dont sa famille est issue.
Avant-goût d'une campagne sanglante
Rayonnant de bonheur aux côtés de son épouse Teresa, l'héritière de la fortune Heinz (le ketchup), enfin débarrassé de ses rivaux Démocrates, John Kerry semblait impatient d'entamer sa campagne contre George W. Bush. «Je suis un combattant, et pendant plus de 30 ans, j'ai été sur les champs de bataille, sur les lignes de front, pour la justice et les valeurs de l'Amérique», a déclaré le vétéran du Vietnam, décoré à plusieurs reprises. Après le raz-de-marée d'hier soir, John Kerry peut se targuer d'avoir remporté 27 des 30 premières primaires, y-compris dans des endroits comme l'Ohio, durement frappé par le chômage et où John Edwards espérait réinventer sa campagne. Il a notamment remporté un franc succès parmi les électeurs noirs. «Le président Clinton était souvent décrit comme le premier président Noir. Je ne serais pas fâché si je pouvais gagner le droit d'être le second», a déclaré John Kerry sur une radio. Seul le Vermont lui a échappé mardi, tombant aux mains de Howard Dean qui en fut le gouverneur, et dont le nom figurait encore sur les bulletins de vote.
Au cours des primaires, le sénateur du Massachusetts a réservé une bonne partie de ses attaques au président Bush. Mais hier soir, il voulait déjà en découdre. «Si George Bush veut faire de la sécurité nationale le thème central en 2004, j'ai pour lui trois mots que je sais qu'il comprend : ‘qu'il y vienne !’ (Bring It On)» (George Bush avait été très critiqué pour avoir lancé la même injonction aux insurgés irakiens qui attaquent les troupes américaines). Son aura de héros du Vietnam et sa longue expérience dans les affaires internationales ont fait de Kerry le candidat idéal pour affronter le président Bush sur son terrain de prédilection : la guerre contre le terrorisme. Beau joueur, le président américain a appelé hier soir John Kerry pour le féliciter de sa victoire.
Un peu plus tôt pourtant, son vice-président Dick Cheney s'en est pris au sénateur du Massachusetts, attaquant ses votes au Congrès «pour tailler dans le budget de la défense, tailler dans le budget de l'intelligence et pour éliminer les principaux programmes d'armement». Ceci est uniquement un avant-goût d'une campagne que les experts annoncent sanglante. Rarement de mémoire récente le pays a été aussi divisé. Les Démocrates sont très remontés contre le président Bush et font de son éviction une priorité absolue. John Kerry a été choisi non pas parce qu'il était réellement leur candidat préféré (le titre revient sans doute à Howard Dean) mais plutôt parce qu'il est perçu comme étant le plus à même de battre l'occupant de la Maison Blanche. «Nous ne nous faisons aucune illusion sur la machine d'attaque républicaine et sur ce que nos opposants ont fait dans le passé et sur ce qu'ils pourraient faire dans le futur» a poursuivi John Kerry, «mais je sais qu'ensemble nous sommes à la hauteur de la tâche». Il a d'ores et déjà été brièvement accusé d'avoir une affaire extra-conjugale, avant que la pseudo-révélation ne s'écroule d'elle-même.
Les Républicains attaquent souvent John Kerry sur l'inconsistance de ses positions -il a voté pour la guerre en Irak avant de la critiquer. Mais le candidat démocrate a marqué des points en promettant d'annuler les réductions d'impôts qui favorisent les plus riches et dont le président Bush a fait le centre de son programme économique. Le sénateur de la côte est fait également campagne sur l'éducation, la santé et l'environnement. Il est pour l'instant en position de force et les sondages le donnent vainqueur contre George Bush, affaibli par les difficultés des troupes américaines en Irak et l'absence des armes de destruction massives annoncées. Mais le président américain ne fait que commencer sa campagne, et il dispose d'une cagnotte de guerre patiemment amassée (près de 140 millions de dollars), qui va lui permettre de payer des millions de dollars de spots télévisés dont les premiers devraient être diffusés dès jeudi.
par Philippe Bolopion
Article publié le 03/03/2004