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Francophonie

Faire avancer la science en français

Michèle Gendreau-Massaloux, recteur de l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF) 

		Photo AFP
Michèle Gendreau-Massaloux, recteur de l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF)
Photo AFP
L’Agence universitaire de la francophonie a décidé de s’engager dans le combat pour la science en français. Cette agence multilatérale qui regroupe près de 500 établissements d’enseignement supérieur et de recherche pourvus de filières en français, est aux premières loges pour initier une dynamique qui incite tous les acteurs impliqués, Etats, universités, chercheurs, professeurs, étudiants, à faire de la science l’un des chantiers prioritaires de la promotion de la diversité culturelle.
Le problème de la fuite des cerveaux qui a été récemment mis sur le devant de la scène médiatique par le conflit entre les chercheurs et le gouvernement français, touche gravement et depuis longtemps, les Etats du Sud. Sans laboratoires, sans moyens, sans débouchés dans leur pays, la plupart des étudiants, professeurs, chercheurs préfèrent s’expatrier pour trouver au-delà de leurs frontières un avenir professionnel. Une situation que Michèle Gendreau-Massaloux, recteur de l’Agence universitaire de la Francophonie (AUF), aimerait faire évoluer.

C’est dans cette optique qu’un certain nombre de programmes ont été initiés depuis 2001. La création de pôles d’excellence régionaux qui s’intègre dans un vaste «Plan d’action pour l’Afrique» lancé en 2003 grâce à l’attribution de crédits conséquents après le Sommet de la Francophonie de Beyrouth, en fait partie. Certes, sur les 16 universités choisies dans les pays francophones pour abriter ces centres, toutes ne se situent pas en Afrique subsaharienne. Mais ce continent est tout de même le principal bénéficiaire du programme puisque 9 universités d’accueil y ont été choisies (Cameroun, Congo, Rwanda, Bénin, Burkina Faso, Côte d’Ivoire, Mali, Sénégal, Togo).

Des travaux «utiles»

L’objectif est de créer dans ces pôles des unités de recherche qui mènent des travaux «utiles» pour le développement du pays qui les accueille mais aussi pour l’ensemble de la région dans laquelle ils se situent. Car la vocation régionale de ces institutions est prioritaire dans l’esprit de Michèle Gendreau-Massaloux. Les équipes réunies dans les pôles d’excellence doivent, en effet, engager des collaborations avec des universités de la même zone géographique pour mener à bien des programmes communs. Elles peuvent aussi faire appel aux compétences des universités du Nord membres du réseau de l’AUF pour les soutenir. L’idée étant de créer une dynamique entre les chercheurs et les établissements.

Le programme des pôles d’excellence bénéficie de financements francophones importants parce qu’il a vocation à permettre d’offrir des débouchés aux scientifiques issus des pays du Sud et donc à éviter la fuite des cerveaux. Mais aussi parce qu’en même temps, il peut aider à créer des unités de recherche susceptibles de faire avancer les travaux dans des domaines qui n’intéressent pas les chercheurs des laboratoires des pays industrialisés et qui revêtent, par contre, un intérêt primordial pour le développement des Etats africains notamment. La recherche sur un vaccin contre le paludisme fabriqué et vendu à bas prix, offre un exemple de thème prioritaire en Afrique mais peu motivant pour des équipes américaines ou européennes, puisqu’une découverte sur cette maladie n’aurait pas de rentabilité immédiate.

En finançant des équipes de recherche de haut niveau en Afrique, l’AUF veut aussi participer à la promotion de la diversité culturelle et linguistique. Dans le domaine scientifique, plus qu’ailleurs peut-être, l’anglais est dominant. Et le fait de donner des financements et des ambitions à des équipes de chercheurs qui travaillent en français est aussi un moyen de faire vivre la science dans cette langue. Pour Michèle Gendreau-Massaloux, l’objectif de la politique de l’AUF est de montrer que la «science peut s’écrire au Sud» et en même temps qu’elle peut s’écrire «en plusieurs langues», parce qu’elle est aussi influencée «par les cultures dont elle émane».

Ces ambitions vont dans le bon sens mais elles risquent de se heurter à un obstacle de taille qui a provoqué, en France même, une situation de «paupérisation» de la recherche dénoncée depuis des mois par les scientifiques : le manque de moyens financiers. Avec seize pôles d’excellence répartis dans l’ensemble du monde francophone, la perspective de pouvoir offrir à un nombre significatif de chercheurs originaires du Sud la possibilité de travailler dans leurs pays est bien lointaine. Alors même que les scientifiques français vont de plus en plus chercher aux Etats-Unis des conditions de travail qu’ils ne trouvent plus dans l’Hexagone.



par Valérie  Gas

Article publié le 30/03/2004 Dernière mise à jour le 30/03/2004 à 14:00 TU