Politique française
Raffarin : concilier réforme et pacte social
(Photo AFP)
A l’issue de la déclaration de politique générale de Jean-Pierre Raffarin devant l’Assemblée nationale, les députés étaient dotés d’un programme législatif qui ne devrait guère leur laisser de loisir d’ici la fin de l’année. En une intervention d’une demi-heure seulement le Premier ministre a annoncé toute une série de projets de loi économiques et sociaux à discuter, pour bon nombre d’entre eux, «dans les prochaines semaines».
«Conscient des attentes exprimées» lors des élections régionales et cantonales des 21 et 28 mars, quand les Français ont saisi l’opportunité de scrutins locaux pour manifester leur mécontentement, le Premier ministre a cependant tenu à justifier le bien fondé de son action passée. Au titre des réussites de l’équipe ministérielle précédente il a mis la lutte contre la violence et ses actions en faveur de la justice, de l’armée et des valeurs de la République, dont la laïcité. Jean-pierre Raffarin réaffirme aussi la nécessité de promouvoir l’entreprise et le travail, refusant de laisser «caricaturer» son action depuis deux ans.
Ainsi, il rejette fermement toute idée d’immobilisme, ce que certains commentateurs n’ont pas manqué de prédire, après l’échec électoral récent. Le Premier ministre entend, bien au contraire, «garder le cap» de la réforme et poursuivre l’adaptation de la France à la modernité économique. Pour cela deux priorités: que les Français travaillent davantage et donner toute leur mesure à l’investissement et à la production. A cela s’ajoute une accélération des privatisations.
Priorité à la cohésion socialeQuelle différence, dans ces conditions, entre les perspectives passées du gouvernement Raffarin 2, désavoué, et ce nouveau gouvernement Raffarin 3? Jean-Pierre Raffarin, reconduit par le président de la République malgré son échec, l’exprime clairement: il s’agit de «redonner toute sa force au pacte social». Cela passe par une revalorisation du pouvoir d’achat des plus modestes, un renforcement de la lutte contre le chômage notamment des jeunes, la garantie de l’avenir de l’assurance-maladie et faire face aux nouveaux besoins tels ceux des personnes âgées et des handicapés, révélés cruellement durant la canicule de l’été 2003.
La cohésion sociale aura désormais rang de priorité gouvernementale, grâce à une «politique d’intégration plus ambitieuse», qui rassemble sous la houlette du nouveau super-ministre Jean-Louis Borloo les actions conjointes et cumulatives en faveur de l’emploi, du social et du logement. Une Haute Autorité sera chargée à partir de 2005 d’y veiller.
La feuille de route présentée par le Premier ministre aux parlementaires prévoit une nouvelle loi pour l’initiative économique et des dispositions en faveur de l’entreprise personnelle, un débat sur l’avenir énergétique de la France y compris l’adoption du réacteur nucléaire à eau pressurisée EPR, l’augmentation de 3,7% du salaire minimum en juillet 2004 puis en juillet 2005, une loi de mobilisation pour l’emploi, un droit à la deuxième chance pour les jeunes sortis prématurément du système scolaire, le droit au reclassement pour les salariés des petites et moyennes entreprises, la réforme du service public de l’emploi, une loi d’orientation et de programmation de la recherche avec l’engagement à porter à 3% du PIB l’effort de recherche français en 2010, une loi d’orientation du système éducatif contre l’échec scolaire, un «dialogue nouveau» avec les artistes et intermittents du spectacle. Enfin une Charte de l’environnement recevra valeur constitutionnelle dans l’Hexagone, au même titre que la déclaration des droits de l’Homme.
Jean-Pierre Raffarin n’ignore rien des difficultés qui l’attendent. D’autant que les prévisions économiques qui circulaient dans les heures précédant son intervention faisaient état, pour 2005, d’un déficit budgétaire et d’une dette publique aggravés.
par Francine Quentin
Article publié le 05/04/2004 Dernière mise à jour le 05/04/2004 à 16:59 TU