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Côte d'Ivoire

Réquisitoire pour une enquête

(Logo: Amnesty International)
(Logo: Amnesty International)
Amnesty international publie un rapport sur les derniers événements survenus en Côte d’Ivoire, le 25 mars dernier. L’organisation internationale de défense des droits de l’Homme recueille de nombreux témoignages qui demandent à être élucidés.

«Répression aveugle et disproportionnée d’une manifestation interdite» est le titre de ce rapport qui reprend des témoignages concordant de plusieurs victimes. Leurs allégations ont servi de base de travail à l’organisation de défense des droits de l’homme, qui appelle également à la constitution d’une commission d’enquête, afin d’élucider tous les points abordés et les faits incriminés. Mais au-delà des faits rapportés Amnesty international constate que la répression d’une manifestation, fut-elle interdite, avec des armes automatiques et des tirs à balles réelles, était disproportionnée.

Amnesty international, ne juge pas du bien fondé ou non de la manifestation du 25 mars, ni du risque encouru par les partis politiques manifestants, mais rappelle qu’il s’attache, dans tous les cas au respect des droits humains. C’est pourquoi l’organisation reconnaît le droit des forces de sécurité de se défendre «lorsqu’elles sont attaquées ou lorsqu’elles estiment que l’ordre public est menacé». Mais, rappelle l’organisation, «l’usage de la force doit être proportionné et les représentants des forces de l’ordre ne doivent y avoir recours qu’en cas de légitime défense ou pour défendre un tiers». Amnesty international rappelle ces principes pour évoquer le déséquilibre des forces en présence le 25 mars dans les rues d’Abidjan. Hélicoptères, camions surmontés de canons, armes automatiques entraînent inévitablement des dégâts importants, selon l’organisation internationale de défense des droits de l’homme.

De nombreux témoins ont affirmé avoir vu des camions militaires transporter des cadavres vers des destinations inconnues. Une probable fosse collective à N’dotré, près de Yopougon n’a pas été confirmée, mais des indications concordantes conduiraient à la déchetterie d’Akouédo, un quartier d’Abidjan. Des camions militaires auraient été vus et des «traces suspectes de sang» ont éveillé quelques soupçons. «Ces informations n’ont pu être vérifiées», écrit Amnesty international qui précise que les sites incriminés n’ont pu être visités parce que les forces de sécurité ont investi les lieux et ont «interdit ou retardé l’accès des observateurs indépendants, notamment des représentants de la Mission des Nations unies en Côte d’Ivoire (Munici)».

En finir avec l’impunité

Amnesty international estime que le calme apparent dans la ville d’Abidjan est moins dû à une reprise en main effective par les autorités administratives et policières que par la peur qui habite les populations et par les barrages érigés par des habitants de certains quartiers pour assurer la sécurité des leurs. En effet, des arrestations et des enlèvements étaient effectués de nuit par des gens en uniforme et en arme, confirmés par Martin Bléou, le ministre de la Sécurité intérieure qui a fait appel, au nom du gouvernement, aux forces françaises et ouest-africaines pour «des patrouilles mixtes avec les forces ivoiriennes».

Amesty international termine son rapport par des recommandations à toutes les parties prenantes au conflit en Côte d’Ivoire. Au président de la République l’organisation de défense des droits de l’Homme demande la libération «des prisonniers d’opinion», détenus pour avoir exercé leur droit de manifester, et que l’Etat garantisse à tous les citoyens ses droits fondamentaux. Du chef de l’Etat, l’organisation attend également qu’il s’engage à faire ratifier le statut de la Cour pénale internationale. A l’endroit des Forces nouvelles, les recommandations vont dans le sens du droit de regard que la communauté internationale doit avoir sur les zones qu’elles contrôlent. Amnesty international profite de cette situation pour redemander la constitution d’une commission d’enquête sur les «exactions dont les éléments armés de l’ex-Mouvement patriotique de Côte d’Ivoire (MPCI) se sont rendus responsables et notamment le massacre de dizaines de gendarmes et de certains de leurs enfants à Bouaké en octobre 2002». Enfin Amnesty international exige un terme à «l’impunité dont jouissent les éléments armés de toutes les parties au conflit». L’organisation demande à la communauté internationale d’assumer ses responsabilités de «protection de toutes les populations civiles qui vivent en Côte d’Ivoire et qui sont durement touchées par ce conflit».



par Didier  Samson

Article publié le 08/04/2004 Dernière mise à jour le 09/04/2004 à 16:23 TU