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Congo démocratique

Manoeuvres diplomatiques et bruit de bottes

<P>Le ministre des Affaires étrangères de la République Démocratique du Congo, Antoine Ghonda accuse le Rwanda de «<EM>Violation flagrante de l'intégrité territoriale de la RDC</EM>.»</P> 

		(Photo : AFP)

Le ministre des Affaires étrangères de la République Démocratique du Congo, Antoine Ghonda accuse le Rwanda de «Violation flagrante de l'intégrité territoriale de la RDC


(Photo : AFP)
La tension entre Kinshasa et Kigali concernant la présence de troupes rwandaises en territoire congolais a suscité d’intenses manoeuvres diplomatiques aussi bien en RDC que sur le plan régional et international pour éviter de mettre en péril la transition devant mener à des élections en 2005 et la coexistence politique entre factions rivales congolaises.

De notre envoyée spéciale à Kinshasa

Les Américains qui considèrent la RDC comme un pays stratégique non seulement en raison de ses richesses minières et son potentiel en pétrole – du côté des grands lacs justement – mais aussi de sa position géographique dans le cadre de leur lutte contre le terrorisme, ont organisé pour les 5 et 6 mai prochains au Département d’État à Washington une réunion tripartite avec les ministres des Affaires étrangères de la RDC, du Rwanda et de l’Ouganda.

L’Union européenne a aussi voulu calmer le jeu, tout comme l’ONU. Et les Sud africains, selon des sources informées à Kinshasa, ont profité de la présence des Congolais et des Rwandais aux cérémonies d’investiture du président Thabo Mbeki pour favoriser une rencontre entre les ministres des affaires étrangères des deux pays.

Le 24 avril, la MONUC (Mission des Nations unies en RDC) a officiellement confirmé la présence de militaires de l’armée rwandaise à l’intérieur du territoire de la République démocratique du Congo, dans la région du nord Kivu dans l’est du pays. Kinshasa a vivement réagi, le ministre de la Presse et de la Communication Vital Kamerhe n’hésitant pas à affirmer que la «MONUC n’a vu que la pointe d’un iceberg». De son côté le chef de la diplomatie congolaise Antoine Ghonda a convoqué le corps diplomatique pour prendre à témoin la communauté internationale d’une «violation flagrante de l’intégrité territoriale de la RDC par le Rwanda», indiquant que Kinshasa demandait une réunion urgente du Conseil de sécurité de l’ONU.

La presse s’est aussi déchaînée, selon sa coloration politique, certains journaux critiquant non seulement les Rwandais mais aussi le RCD-Goma qu’ils soutiennent, et qui fait partie du gouvernement de transition congolais. A Kigali, cependant, le ton variait entre le démenti catégorique du ministre rwandais des Affaires étrangères Charles Murigande et les déclarations du chef d’Etat major James Kabarebe affirmant que si son armée voulait traverser la frontière, «personne ne serait en mesure de nous arrêter».

L’ONU sur place a immédiatement cherché à calmer le jeu, exhortant les deux pays à coopérer et à dialoguer directement pour régler la question sécuritaire qui préoccupe le Rwanda, c'est-à-dire la présence des ex-FAR et Interahamwe, auteurs du génocide de 1994, en territoire congolais. Le secrétaire général des Nations Unies Kofi Annan a de son côté annoncé officiellement la nomination des quatre experts – américain, canadien, français et camerounais – chargés de contrôler les mouvements d’armes en RDC, ce qui devrait rassurer le président Joseph Kabila et sa mouvance.

La dynamique est en marche

Le représentait de l’Union européenne pour la région des Grands Lacs, Aldo Ajello, présent à Kinshasa, a lui aussi multiplié les contacts avec le président Kabila et ses vice-présidents issus d’autres tendances. Pour lui, il faut absolument poursuivre le processus de mise en place des institutions à tous les niveaux y compris territorial et militaire.

«Nous avons des messages importants (à leur faire passer): nous savons qu’il y a des gens aussi bien ici (à Kinshasa) qu’à Goma qui veulent faire reporter les élections, ce que nous ne devons pas permettre. Mais il faut aussi que les conditions soient remplies pour mener à bien le processus électoral, notamment l’intégration de l’armée», nous a-t-il déclaré. Il estime toutefois que globalement le processus politique marche même s’il y a des accrocs. «La dynamique est en marche», ajoute-t-il.

De son côté, le sénégalais Ibrahima Fall, représentant de l’ONU pour la région des Grands Lacs, lui aussi de passage à Kinshasa, a mis l’accent sur la coopération régionale et internationale pour ramener enfin une paix durable dans cette zone, déchirée par les conflits sur qui pèse l’horreur du génocide de 1994 au Rwanda et des tueries qui ont suivi. «Nous avons voulu tisser une toile d’araignée (de la paix) entre la RDC, le Burundi, le Rwanda et l’Ouganda», nous a-t-il expliqué.

A propos de la conférenceinternationale sur les Grands Lacs dont un premier sommet est prévu en novembre 2004 en Tanzanie – un deuxième devant avoir lieu en mai 2005 au Kenya – il a mis l’accent sur les deux «piliers nécessaires»: «l’appropriation de la conférence par les pays de la région et le partenariat international». Il a également insisté sur les thèmes déjà identifiés, notamment paix et sécurité et développement économique et intégration régionale ainsi que les questions humanitaires et sociales.

Il a précisé que la question des participants à la conférence n’était pas tout à fait réglée, l’Angola et le Congo Brazzaville notamment réclamant plus que le statut de membre «coopté»dont bénéficient les voisins immédiats de la RDC qui ne font pas partie de la zone des Grands Lacs, ainsi que l’Afrique du Sud et le Nigeria.

Un groupe des «amis de la région des Grands Lacs»co-présidé par le Canada et les Pays-Bas a aussi été formé avec 26 pays, dont 23 pays membres de l’OCDE et trois africains – Afrique du Sud, Gabon et Nigeria.



par Marie  Joannidis

Article publié le 30/04/2004 Dernière mise à jour le 30/04/2004 à 10:29 TU