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Génocide rwandais

TPIR : Trente ans de prison pour un ancien maire rwandais

La défense de Sylvestre Gacumbitsi a dénoncé ce qu’elle appelle «&nbsp;<I>une justice de vainqueur</I>&nbsp;» à l’issue du jugement.
La défense de Sylvestre Gacumbitsi a dénoncé ce qu’elle appelle « une justice de vainqueur » à l’issue du jugement.
L’ancien maire de la commune de Rusumo (est du Rwanda) a été condamné à 30 ans de prison pour génocide et crimes contre l’Humanité par le Tribunal pénal international pour le Rwanda (TPIR), basé à Arusha en Tanzanie. Il était poursuivi principalement pour le massacre de vingt mille réfugiés Tutsis à la mi-avril 1994, dans la paroisse catholique de Nyarubuye.
De notre correspondant à Arusha

C’est au terme d’un procès remarquable de rapidité que Sylvestre Gacumbitsi a été condamné ce jeudi par le TPIR. Trente-trois jours d’audiences au total, lors desquels quinze témoins à charge et vingt-trois témoins à décharge ont été entendus. La lecture du jugement n’a duré qu’une petite heure et, contrairement à l’usage répandu devant cette institution, l’anxiété des derniers instants aura été de courte durée. Quelques minutes à peine après l’ouverture de l’audience, la juge Andrésia Vaz précise sur un ton sans ambiguïté : « En avril 1994, Gacumbitsi a participé à plusieurs réunions, dont l’objectif était d’attaquer et de massacrer des Tutsis ».

Les conclusions factuelles de la chambre sont en effet accablantes pour l’accusé. Le 15 avril 1994, affirment les trois juges du TPIR, l’accusé Gacumbitsi –accompagné d’autres personnes– est arrivé à la paroisse catholique de Nyarubuye ou s’étaient regroupés des milliers de réfugiés hutus et tutsis fuyant des massacres certes généralisés, mais qui épargnaient encore certaines régions du pays. Un réfugié tutsi s’est alors approché de lui. Gacumbitsi l’a abattu d’un coup de machette. Il a ensuite ordonné aux réfugiés hutus de quitter les réfugiés tutsis et a ainsi donné le coup d’envoi des massacres de Tutsis.

Le dix-neuvième condamné du TPIR

Le lendemain 16 avril, Sylvestre Gacumbitsi est revenu sur les lieux, en compagnie d’autres personnes et ils ont ensemble massacrés les survivants de l’attaque de la veille. Le bilan de l’attaque s’élève selon certaines estimations à vingt milles tués. Pour les juges du TPIR, « Gacumbitsi a été un des meneurs et maître d’oeuvre du Génocide à Rusumo ». « Il a trahi la confiance de ses administrés », ont-ils ajouté.

Poursuivi également pour sa responsabilité dans divers assassinats et viols commis début avril 1994 dans la commune de Rusumo, l’ancien maire a principalement été reconnu coupable d’avoir participé aux massacres de Nyarubuye et d’avoir incité d’autres à y prendre part, ainsi qu’à d’autres massacres. Des cinq chefs d’accusation retenus contre lui, il a été reconnu coupable de trois d’entre eux (génocide, viols qualifiés de crimes contre l’Humanité et extermination, qualifiée de crime contre l’Humanité). Les juges ont décidé de lui infliger une peine de 30 ans de prison.

Instituteur de formation, Sylvestre Gacumbitsi est devenu maire de la commune de Rusumo en 1983 et il a conservé son poste jusqu’en mai 1994 lorsqu’il s’est enfui en Tanzanie. Il a été arrêté en 2001 dans un camp de réfugié du nord du pays et inculpé par le TPIR. Il est le cinquième ancien maire rwandais jugé par le TPIR et le dix-neuvième condamné du tribunal qui a prononcé trois acquittements jusqu’à présent.

La défense de Sylvestre Gacumbitsi, assurée par l’avocat camerounais Me Kouengoua a dénoncé ce qu’elle appelle « une justice de vainqueur » à l’issue du jugement. Elle annonce qu’elle va faire appel de la décision.



par André-Michel  Essoungou

Article publié le 17/06/2004 Dernière mise à jour le 17/06/2004 à 13:18 TU