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Justice internationale

Le procès Milosevic sous basse tension

Slobodan Milosevic présentera sa stratégie de défense devant le Tribunal pénal international (TPI) de La Haye à partir du 31 août. 

		(Photo : AFP)
Slobodan Milosevic présentera sa stratégie de défense devant le Tribunal pénal international (TPI) de La Haye à partir du 31 août.
(Photo : AFP)
Le second acte du procès de Slobodan Milosevic devait s’ouvrir le 19 juillet. Mais l’accusé, souffrant, est de nouveau absent du prétoire du tribunal pénal international pour l’ex-Yougoslavie (TPIY). Le procès a donc du être reporté pour la sixième fois consécutive. L’ancien chef d’Etat présentera sa stratégie de défense à partir du 31 août.

De notre correspondante à La Haye

Slobodan Milosevic n’est pas prêt à présenter sa défense. Agé de 62 ans, l'accusé souffre, depuis son arrestation il y a trois ans, de problèmes cardiovasculaires aggravés par la tension du procès, selon les différents experts médicaux du centre de détention. Or la seconde partie du procès est la phase la plus délicate pour l’accusé. Après l’audition des 300 témoins du procureur, entendus entre février 2002 et 2004, Slobodan Milosevic doit désormais présenter à la Cour ses éléments à décharge. La procédure en vigueur devant le tribunal international est exigeante. Les parties y mènent leur propre enquête, trouvent, préparent puis présentent leurs propres témoins à la barre. Slobodan Milosevic a longtemps espéré une mise en libération provisoire, une détention en résidence surveillée ou même du temps. A défaut, il s’est vu attribuer un bureau dans l’enceinte de la prison de Scheveningen.

Dans les semaines à venir, le bras de fer engagé par Slobodan Milosevic contre ses juges depuis le début du procès en février 2002 pourrait prendre un tour nouveau. L’ex homme fort de Belgrade, refuse toujours de prendre des avocats. Mais les juges espèrent aujourd’hui mettre l’accusé au pied du mur. L’ancien président serbe devrait prendre un avocat, estiment-ils en substance, dans une ordonnance rendue début juillet, car « sa santé est telle qu’il pourrait ne pas être capable d’assurer lui-même sa défense et que la bonne marche du procès pourrait s’en trouver affectée ». Les services du greffe auraient déjà pris contact avec plusieurs conseils. Or l’ancien chef d’Etat a toujours refusé, sans jamais tergiverser, d’être représenté dans le prétoire. Et il n’est pas certain qu’en modifiant de la sorte la physionomie du procès, les juges ne s’engagent pas tout simplement dans une nouvelle impasse. L’absence d’avocats est une part de la stratégie de défense de l’accusé : une façon de refuser le tribunal et de s’adresser directement à l’opinion publique, ou à l’Histoire. Slobodan Milosevic est accusé de génocide, crimes contre l’humanité et crimes de guerre commis pendant les guerres de Croatie, de Bosnie et du Kosovo, et assure toujours que « personne d’autre ne saurait mieux que moi assurer ma défense ».

Clinton, Schröder, Blair et les autres…

Quoi qu’il en soit, le 31 août, l’ancien président yougoslave pourra se lancer dans l’un de ces désormais traditionnels discours. En quatre heures, il présentera à la Cour sa stratégie de défense. Il disposera ensuite de 150 jours pour interroger ses témoins, dont il a dressé une liste de 1 631 personnes. Milosevic invitera des experts, des proches, des victimes et des négociateurs internationaux ou ses homologues chefs d’Etats. Car s’il compte se défendre en répondant point par point aux témoins du procureur, il devrait aussi et surtout accuser. En juin, il assénait aux juges : « J'ai demandé à ce que vous rendiez une ordonnance à l'adresse des services secrets de la Grande-Bretagne, de la France et de l'Allemagne, pour que me soient communiquées des pièces, et j'ai aussi communiqué une liste de personnes auxquelles j'exige que soit délivrée une ordonnance à comparaître, parmi lesquelles Clinton, Genscher, Clarke, Schröder, Blair... ». Nouvel acte de ce long bras de fer : Les juges veulent faire se plier l’accusé à la procédure et exigent une requête écrite.

Slobodan Milosevic a aussi affirmé haut et fort qu’aucun de ses témoins ne comparaîtrait sous pseudonyme ou à huis clos. Il veut, par opposition avec la présentation du procureur, rendre transparente chacune des phases de sa défense. Car l’ex homme fort de Belgrade use toujours du prétoire pour s’adresser à l’opinion publique mondiale, ou à défaut, serbe. Mais même en Serbie, où certaines des structures passées persistent, le procès ne recueille plus l’intérêt des premiers jours et il n’existe plus qu’une poignée de militants pour revendiquer son héritage. Récemment encore, le malheureux candidat radical de l’élection présidentielle du 27 juin, l’ultra nationaliste Tomislav Nikolic, se targuait du soutien de l’ancien président pour recueillir les voies de ses partisans, mais n’omettait cependant pas de se rappeler les quelques mois de prison infligés par le régime Milosevic.



par Stéphanie  Maupas

Article publié le 19/07/2004 Dernière mise à jour le 19/07/2004 à 13:25 TU