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Proche-Orient

Qoreï renonce à démissionner

Yasser Arafat et le Premier ministre Ahmed Qorei, le 27 juillet. 

		(Photo : AFP)
Yasser Arafat et le Premier ministre Ahmed Qorei, le 27 juillet.
(Photo : AFP)
Dix jours après avoir claqué la porte à la suite d’une série d’enlèvements qui ont plongé la bande de Gaza dans le chaos, Ahmed Qoreï a finalement accepté de ne pas quitter son poste. Le Premier ministre, qui avait maintenu sa décision malgré le refus de Yasser Arafat d’accepter sa démission, a déclaré espérer désormais pouvoir enfin travailler avec le président palestinien. Mais son maintien en poste ne signifie toutefois pas que la grave crise qui secoue depuis une dizaine de jours l’Autorité palestinienne est enfin réglée.

Le chef de l’Autorité palestinienne a une nouvelle fois eu le dernier mot. A l’issue d’un bras de fer de dix jours, Yasser Arafat est en effet parvenu à convaincre son Premier ministre de ne pas mettre à exécution sa menace de quitter le gouvernement. Ahmed Qoreï, qui réclamait davantage de pouvoirs sur les services de sécurité, est, semble-t-il, parvenu à ses fins. Il aurait à en croire certains responsables palestiniens réussi à obtenir de Yasser Arafat qu’il lâche du lest concernant notamment les services de police et de sécurité intérieure. Les deux hommes, qui ne s’étaient pas revus depuis jeudi dernier, se sont donc longuement rencontrés ce mardi à Ramallah. «Le président Arafat a insisté pour refuser ma démission. Je l'en remercie et je lui suis gré d'avoir renouvelé sa confiance, et nous espérons pouvoir être à la hauteur de ces lourdes et difficiles responsabilités qui nous attendent et que nous partagerons avec lui», a déclaré à l’issue de cette rencontre Ahmed Qoreï. «J’espère qu’à présent nous pourrons travailler ensemble», a-t-il cependant ajouté. Et pour démontrer que désormais tout va pour le mieux, le président et son chef de gouvernement ont publiquement scellé leur réconciliation en se donnant l'accolade, entourés de membres du cabinet et de plusieurs élus. 

La décision du Premier ministre de rester à son poste n’était pas vraiment une surprise. Une délégation de députés, mandatés la semaine dernière par le Conseil législatif palestinien pour tenter de trouver une issue à la crise politique qui opposait le président Arafat à son chef du gouvernement, a en effet affirmé la veille que la démission d’Ahmed Qoreï n’était plus à l’ordre du jour. Ces députés, parmi lesquels la très influente Hanane Achraoui –très critique, elle a récemment appelé le vieux raïs à «cesser son one-man show»– ont plaidé pendant plus de trois heures auprès de Yasser Arafat en faveur d’une réforme de l’Autorité palestinienne. «Nous avons une réunion franche et constructive avec le président et il a accepté d’accélérer les réformes pour mettre un terme à l’anarchie dans les territoires», a notamment expliqué Hanane Achraoui à l’issue de cette rencontre. Selon elle, le chef de l’Autorité palestinienne s’est également engagé à demander au procureur général d’entamer les procédures légales à l’encontre des responsables impliqués dans des faits de corruption. Les manifestations qui ont spontanément éclaté il y a une dizaine de jours dans la bande de Gaza avait pour principal mot d’ordre la dénonciation de la corruption qui mine l’Autorité palestinienne.

Vers un remaniement ministériel

Un autre parlementaire, Hatem Abdel Qader, a pour sa part affirmé que le président Arafat avait accepté de placer le ministère de l’Intérieur sous le contrôle d’Ahmed Qoreï. Le Premier ministre avait en effet été forcé d’accepter en octobre dernier la nomination à ce poste de Hakam Balaawi, un proche du vieux raïs, alors que son choix initial, pourtant approuvé par le comité central du Fatah –le mouvement de Yasser Arafat– s’était porté sur Nasser Youssef, un vétéran du mouvement nationaliste palestinien. Dans ce contexte, un remaniement ministériel paraît inévitable. Ahmed Qoreï s’est toutefois refusé à confirmer une réorganisation de son cabinet, se bornant à déclarer que «tout était sujet à discussion».

Le Premier ministre a également refusé de dire si son gouvernement avait obtenu les prérogatives qu'il réclamait pour contrôler les services de sécurité. «Nous ne sommes pas dans un processus de marchandage avec le président. Nous avons des prérogatives, et elles sont suffisantes. Le problème est que chacun assume ses responsabilités. Il ne s'agit pas d'un partage», a-t-il affirmé. Plusieurs responsables palestiniens ont toutefois indiqué que la loi fondamentale amendée, adoptée par le Conseil législatif palestinien en 2002, et qui fixe les responsabilités du gouvernement et de l'exécutif, sera enfin mise en application et garantira ainsi le contrôle du législatif sur l'exécutif.

Concernant la réforme des services de sécurité palestiniens – le président Arafat a signé la semaine dernière, dans une tentative de désamorcer la crise au sein de l’Autorité palestinienne, un décret entérinant la fusion de la dizaine de branches des services de renseignement en trois agences distinctes–  Ahmed Qoreï a affirmé qu’un projet de loi définissant les champs d’actions de ces différents services serait très bientôt adopté. Il répondait ainsi à l’une des principales revendication des parlementaires palestiniens qui avaient réclamé la semaine dernière «la définition des prérogatives et des structures de ces services, à travers un texte législatif qui fixe et encadre leur mission».

Après des mois d’immobilisme, le gouvernement d’Ahmed Qoreï, qui a également annoncé «l’activation d’un plan de réforme de l’Autorité palestinien» présenté il y a plusieurs mois déjà par le Conseil législatif palestinien, semble aujourd’hui déterminé à aller de l’avant. En aura-t-il réellement les moyens ? Rien n’est moins sur tant la situation sur le terrain semble désormais incontrôlable.



par Mounia  Daoudi

Article publié le 27/07/2004 Dernière mise à jour le 27/07/2004 à 13:43 TU