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Pétrole

L’ombre de Ioukos sur le prix du baril

Devant le siège du groupe pétrolier russe 

		(Photo : AFP)
Devant le siège du groupe pétrolier russe
(Photo : AFP)
Les démêlés judiciaires du groupe pétrolier russe Ioukos soufflent le chaud et le froid sur le marché mondial. Le prix du baril s’est envolé dès l’annonce par Ioukos de l’arrêt de sa production et s’est replié après le démenti de la justice russe.

Le ministère russe de la justice a dû confirmer officiellement que le numéro un du pétrole russe Ioukos pouvait continuer à produire et exporter son pétrole brut. Des informations contraires, diffusées la veille par le groupe pétrolier lui-même, avaient déclenché un début de panique sur le marché mondial du brut. A New York, le baril a atteint un record à plus de 43 dollars avant de clôturer à 42,90 dollars soit un niveau supérieur à celui du 1er juin dernier qui faisait déjà figure d’envolée à 42,45 dollars. A Londres, les marchés cédaient également à la crainte de pénurie et le prix du baril parvenait à son plus haut depuis 14 ans, à 39,68 dollars.

Après l’annonce rassurante que Ioukos n’était aucunement contraint par la justice de cesser son activité d’extraction et d’exportation, les cours mondiaux se repliaient quelque peu, sans que l’on puisse parler cependant de retour au niveau antérieur. Les analystes continuent de penser qu’il existe une réelle hypothèse de pénurie de pétrole brut sur le marché, tirant les cours vers le haut, même si le pétrolier russe Ioukos maintient sa production de 1,7 million de barils par jour et en exporte les trois quarts. La Russie, qui n’appartient pas à l’OPEP, est le deuxième exportateur mondial derrière l’Arabie saoudite.

Si les marchés ont réagi aussi vivement au risque de disparition du pétrole exporté par Ioukos, qui ne représente quand même que 20% du pétrole extrait en Russie c’est que la situation reste extrêmement tendue. L’OPEP a relevé sa production à 30 millions de barils par jour pour tenter d’enrayer la hausse des prix et dispose de peu de capacités supplémentaires. Pendant ce temps la demande reste forte en Chine et aux Etats-Unis. D’ailleurs, l’augmentation de la production du cartel pétrolier a porté les importations américaines à un niveau sans précédent. Les Etats-Unis gonflent leurs stocks de brut et font travailler leurs raffineries à 97%, favorisant ainsi des prix mondiaux élevés.

Le « chantage » de Ioukos

Cela ne devrait pas s’arranger de sitôt car, selon l’Agence internationale de l’énergie (AIE), la demande mondiale de pétrole va progresser de plus de 3% en 2004 et à peu près d’autant en 2005. Dès lors, la convention nationale démocrate qui doit désigner John Kerry comme candidat à la Maison-Blanche a beau jeu d’inscrire à son programme électoral que pour « sauvegarder notre liberté et assurer l’avenir de notre Nation nous devons mettre fin à notre dépendance à l’égard du pétrole du Moyen-orient ».  

Obnubilés par la peur de manquer de pétrole les spéculateurs sont cependant aisément tombés dans le panneau tendu par le groupe pétrolier russe Ioukos. Celui-ci est sous le coup d’une procédure judiciaire pour non-paiement d’impôts et se voit réclamer 3,4 milliards de dollars d’arriérés fiscaux. Un bras de fer s’est engagé entre les responsables du groupe et les autorités russes et l’annonce de la cessation d’activité par Ioukos visait à la dramatisation. Le ministre russe de la justice, Iouri Tchaïka, a dénoncé « le chantage » de Ioukos afin de pousser le pouvoir à un compromis.

En effet l’arrêt de la production de Ioukos ne ferait pas plus l’affaire du gouvernement russe que des dirigeants de la société, en raison de l’importance nationale de l’économie des hydrocarbures. Bien au contraire on prête au gouvernement russe l’intention de reprendre le contrôle du groupe, après en avoir évincé les actuels dirigeants.



par Francine  Quentin

Article publié le 29/07/2004 Dernière mise à jour le 29/07/2004 à 12:29 TU