Côte d'Ivoire
Accra III : un accord a été signé
Le président ivoirien Laurent Gbagbo et son Premier ministre Seydou Diarra. Le chef de l'Etat s'est personnellement engagé à faire adopter les réformes politiques dans les plus brefs délais.
(Photo: AFP)
Après deux jours d’intenses négociations sous l’égide des Nations unies, les différentes parties impliquées dans la crise ivoirienne sont finalement parvenues à un accord visant à relancer le processus de paix. Cet accord, obtenu à l’arraché sous la pression de douze chefs d’Etat de la région et du secrétaire général de l’ONU, Kofi Annan, prévoit un calendrier de réformes politiques ainsi que le désarmement des forces rebelles et des milices armées à partir du 15 octobre prochain.
Le président John Kufuor, hôte de cet énième sommet destiné à trouver une solution à la crise ivoirienne, avait d’entrée de jeu mis la barre très haut en renvoyant les protagonistes à leurs responsabilités. «Il n’y aura pas d’Accra IV», leur avait-il lancé. Aujourd’hui, il peut s’estimer satisfait puisque les différents acteurs de la crise politico-militaire que connaît depuis 22 mois la Côte d’Ivoire ont finalement cédé aux pressions de leurs pairs –douze chefs d’Etats de la région avaient fait le déplacement dans la capitale ghanéenne– et conclu un accord. «Le président de la Côte d’Ivoire et tous les leaders de la Côte d’Ivoire se sont mis d’accord pour rétablir le gouvernement de réconciliation nationale de façon à remettre sur les rails la gestion de leur pays avant des élections libres et équitables l’année prochaine», a ainsi annoncé tard dans la nuit de vendredi à samedi John Kufuor.
«Même si les accords de Marcoussis ont été le cadre de ces négociations, c'est désormais Accra III qui devient la référence.»
Cet accord prévoit la tenue dès la semaine prochaine d’un conseil des ministres en présence des deux représentants des Forces nouvelles, l’ancienne rébellion, et de celui issu de l’opposition, qui avaient été limogés le 19 mai dernier. Il prévoit également l’adoption des réformes politiques prévues par les accords de paix de Marcoussis signés en région parisienne en janvier 2003 et dont certaines, comme notamment celle du code de la nationalité, sont actuellement dans l’impasse à l’Assemblée ivoirienne. La loi sur l’éligibilité, qui empêche pour l’instant l’opposant Alassane Ouattara de se présenter à la présidentielle 2005, devrait à ce titre être très bientôt amendée. L’accord signé à Accra prévoit en effet que le chef de l’Etat, Laurent Gbagbo, doit user de ses pouvoirs constitutionnels pour faire adopter un amendement à l’article 35 de la constitution qui demandait que tout candidat à la présidentielle soit «né de père et de mère ivoirien d'origine». Les accords de paix de Marcoussis prévoyaient une modification pour que la condition nécessaire à toute candidature soit que le postulant soit «né de père ou de mère ivoirien d’origine».
«Le chef de l'Etat ivoirien est renforcé dans ses prérogatives mais désormais sa responsabilité est directement engagée sur l'avancée du processus de réconciliation.»
Menace de sanctions des Nations unies
Ce n’est qu’une fois que les autorités ivoiriennes auront mis en œuvre, à partir de la fin du mois d’août, ces réformes politiques, que le désarmement des rebelles pourra commencer. Prévu par l’accord pour être lancé d’ici le 15 octobre prochain, «
le processus de désarmement, démobilisation, réintégration (DDR)» concernera les forces rebelles qui contrôlent le nord du pays ainsi que tous les groupes paramilitaires et les milices. Les partisans du président Laurent Gbagbo considéraient jusqu’à présent que les rebelles devaient d’abord être désarmés avant que les questions cruciales des accords de Marcoussis soient abordées. L’accord d’Accra, signé par le président ivoirien en personne, leur donne aujourd’hui tort.
«48h d'intenses négociations pour remettre la Côte d'Ivoire sur le chemin de la paix, le jeu en valait la chandelle.»
Obtenu à l’arraché sous la pression de la douzaine de chefs d’Etat présents et du secrétaire général des Nations unies, cet accord ne garantit pas que les protagonistes s’acquitteront de leur devoir. Et c’est sans doute pour cette raison que le secrétaire général des Nations unies n’a pas hésité à brandir la menace de sanctions. «Le Conseil de sécurité des Nations unies se réserve le droit de prendre les mesures nécessaires pour assurer la paix et la sécurité en Côte d’Ivoire», a affirmé Kofi Annan.
«J'ai eu l'impression à la fin de la session que tout le monde était prêt à se mettre à travailler.»
par Mounia
Daoudi
Article publié le 31/07/2004 Dernière mise à jour le 31/07/2004 à 13:04 TU