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Prix du pétrole

Quel impact sur la croissance ?

La plupart des anciens pays communistes sont dépendants des importations énergétiques de la Russie, tout comme plusieurs autres pays européens. Un quart du gaz consommé en Europe vient de Russie. 

		(Photo : AFP)
La plupart des anciens pays communistes sont dépendants des importations énergétiques de la Russie, tout comme plusieurs autres pays européens. Un quart du gaz consommé en Europe vient de Russie.
(Photo : AFP)
Le baril de pétrole a atteint de nouveaux records de prix et l’inquiétude naît dans les pays consommateurs : à combien de dollars le baril la croissance économique peut-elle être remise en cause ? Les analyses divergent.

Tout est bon pour que le marché pétrolier réagisse par une envolée des cours et le prix du baril de pétrole, à New York et Londres franchit régulièrement de nouveaux records. Le 5 août on a dépassé les 44 dollars le baril à New York. Les occasions de s’alarmer ne manquent d’ailleurs pas : démêlés judiciaires de la compagnie russe Ioukos qui soufflent le chaud et le froid, perspectives troublées au Venezuela à l’approche du référendum sur la destitution du président Hugo Chavez, situation menacée des approvisionnements en Irak où pas un jour se s’écoule sans attentats, instabilité possible à moyen terme en Arabie Saoudite.  

Du côté de la demande, l’Agence internationale de l’énergie (AIE) table sur une forte augmentation de 3,2% en 2004, en raison de la reprise économique mondiale et du poids croissant de la Chine dans la consommation globale. Et cela ne devrait pas s’arrêter de sitôt car, vers 2020, la Chine devrait importer 250 millions de tonnes de pétrole brut par an.

Les experts pétroliers n’excluent plus, dans ces conditions, un baril à 50 dollars. Les plus pessimistes parlent même de 80 dollars le baril. Un opérateur sous-entend que l’intervention américaine en Irak pourrait bien avoir pour effet un transfert de richesses des pays consommateurs vers les pays producteurs, faisant ainsi peser sur tous les Occidentaux, et pas seulement sur les Etats-Unis, le prix de la stabilité au Proche-Orient. Dans ce cas, l’élection du candidat démocrate John Kerry, en infléchissant la politique étrangère américaine, favoriserait une baisse des cours du pétrole.

L’économie mondiale est en mesure d’absorber sans trop de dommage un baril à 40 dollars, les conséquences commenceraient à se faire sentir à 50 dollars, surtout si ce prix élevé persistait. Mais d’autres analystes rappellent qu’en termes réels les cours du pétrole ont moins progressé que ceux du lait pendant les 25 dernières années. Les cours actuels sont revenus, en dollars constants, au niveau du premier choc pétrolier de 1973 et demeurent encore assez loin des cours atteints lors du deuxième choc en 1979.  

Des économies moins dépendantes

Un autre changement est intervenu dans les économies des pays consommateurs depuis ces années-là. Elles ont appris à utiliser l’énergie de manière plus efficace, en moindre quantité et la dépendance des économies développées à l’énergie a diminué au fur et à mesure que la proportion des services augmentait. Actuellement les services représentent 80% de l’économie américaine.

Il n’empêche, facteurs objectifs ou pas, les marchés financiers craignent une amputation des marges des entreprises, une remontée des taux d’intérêts et une ponction sur le pouvoir d’achat des ménages. Notamment si les prix du pétrole s’installaient durablement au-dessus de 50 dollars le baril.

Les gouvernements limitent l’impact du renchérissement du pétrole sur la croissance mais ne cachent pas une certaine inquiétude. Le secrétaire au Trésor américain John Snow confirme que les prix élevés du pétrole sont un élément négatif qui nuit à la reprise mais il assure que la croissance américaine reste forte et devrait se poursuivre même à un rythme plus ralenti. Le Japon, qui sort à peine d’une récession de près de dix ans, est attentif aux conséquences des fluctuations du prix du baril et des taux d’intérêts à l’échelle mondiale. Le Japon importe la quasi-totalité de son énergie dont 90% du Moyen-Oient. Le ministre allemand des Finances Hans Eichel ne cache pas ses craintes, alors que le redémarrage économique tant attendu depuis trois ans repose essentiellement sur les exportations.

Or les exportations pourraient connaître un coup de frein en cas de redressement des taux d’intérêts ou de réduction du pouvoir d’achat des consommateurs. Le ministre espagnol de l’Industrie prévoit un impact négatif important sur l’économie de son pays. A Madrid les prévisions de croissance viennent d’être révisées à la baisse pour 2004, à 2,8% contre 3% initialement prévus.

En France, le ministre de l’Economie et des Finances Nicolas Sarkozy estime que le prix du pétrole est certes un sujet d’inquiétude, mais que pour l’instant le prix des matières premières n’a pas entravé le retour de la croissance. Des analystes évaluent à 0,3 ou 0,4 point de PIB le poids négatif sur la croissance française toujours fixée à environ 2,4% cette année. La France met en avant le cours élevé de l’euro par rapport au dollar qui atténue le prix du baril et sa dépendance énergétique en diminution tandis que la consommation des ménages reste dynamique.



par Francine  Quentin

Article publié le 06/08/2004 Dernière mise à jour le 06/08/2004 à 13:56 TU