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Cameroun

Paul Biya face à une opposition éclatée

Au pouvoir depuis 1984, Paul Biya, le président sortant camerounais se prépare pour un nouveau mandat présidentiel.  

		(Photo : AFP)
Au pouvoir depuis 1984, Paul Biya, le président sortant camerounais se prépare pour un nouveau mandat présidentiel.
(Photo : AFP)
A 71 ans, dont 22 de pouvoir, le président sortant veut briguer un second septennat le 11 octobre. La Coalition pour la reconstruction et la réconciliation nationales (CRRN) a vu se briser son rêve de présenter un « candidat unique » : John Fru Ndi, du Social democratic front (SDF), déclarera une candidature concurrente à celle de Adamou Ndam Njoya, désigné par leurs pairs.

De notre correspondant à Yaoundé.

La scène politique camerounaise  n’est pas près de rompre avec sa réputation de théâtre de pseudo suspens. Pouvoir et oppositions n’auront pas fait démentir les scénaristes inspirés par l’histoire électorale du pays. L’annonce, mercredi à la mi-journée, de l’intervention radiotélévisée du président Biya a fait circuler, pendant de longues heures, les rumeurs les plus farfelues dont certaines faisaient état de son éventuel retrait des affaires, en souvenir du 4 novembre 1992, date de la démission de feu Ahmadou Ahidjo, son prédécesseur. A 20h, ce mercredi, le chef de l’Etat est apparu détendu à la télévision d’Etat pour annoncer sa candidature à l’élection présidentielle du 11 octobre prochain. Dans la matinée déjà, son dossier de candidature - vraisemblablement le premier reçu- avait été déposé auprès du ministère de l’Administration territoriale et de la Décentralisation sans que, comme le prévoyaient certains, une réunion du Comité central ou du Bureau politique ne se soit tenue, à l’effet d’investir officiellement le candidat du Rassemblement démocratique du peuple camerounais (RDPC, au pouvoir). On a donc dû se contenter de considérer que Paul Biya, reconduit à la tête du RDPC le 7 juillet 2001 pour une période de 5 ans, était de facto,  le « candidat du parti aux élections présidentielles », selon les textes de base.

Mais à vrai dire, on se doutait bien que le scénario des scrutins de même nature de 1992 et 1997 se répéterait : depuis deux ans, le pays a vécu au rythme des « motions de soutien et de déférence », des « appels » à briguer un second septennat adressés à  Paul Biya, - dont certains étaient  attribués aux militants du parti, d’autres formulés par des enseignants d’universités, d’autres encore lancés par d’anciens footballeurs internationaux - et largement amplifiés par les médias d’Etat. Comme pour les échéances antérieures, Paul Biya a dit répondre à ces appels, justifié sa candidature par un bref bilan de son septennat, sur un air de campagne avant la lettre. « Pour l’essentiel, la démocratie est effective. Nous avons renoué avec la croissance. Les équipements publics se sont multipliés. Le rayonnement international est une réalité. La paix, l’unité et la stabilité sont assurées. Le temps est maintenant venu de regarder plus loin, de viser plus haut.(…) C’est pourquoi , répondant à vos appels, j’ai décidé de me porter candidat à l’élection présidentielle. Je vous demande donc de me renouveler votre confiance, afin que dans la stabilité et la paix, nous puissions avancer dans la voie de la démocratie et du progrès », a dit le désormais candidat officiel à sa succession. Laissant à la radio et la télévision d’Etat, le soin de préciser le bilan esquissé du septennat finissant. Comme en 1992 et 1997.

Le chairman claque la porte

Aux premières de la journée de mercredi, déjà, les forces d’opposition, réunies au sein de la Coalition pour le reconstruction et la réconciliation nationales (CRM), se choisissaient, au milieu des malentendus et des controverses, Adamou Ndam Njoya, le leader de l’Union démocratique du Cameroun (UDC), comme porte-étendard, candidat ayant réuni, selon un « jury » interne ad hoc, les 15 critères récemment arrêtés d’un commun accord. Cette désignation survenait après deux jours d’interminables conciliabules et de vives discussions, dont en particulier celle qui avait trait à une éventuelle investiture de Edouard Akame Mfoumou, membre du Comité central du RDPC, actuel président de la compagnie aérienne nationale (Cameroon airlines), ancien ministre d’Etat chargé de l’Economie et des Finances, réputé proche de Paul Biya, mais visiblement en disgrâce.

Le choix de Adamou Ndam Njoya a beau refléter un laborieux mais authentique consensus, il n’est pas accepté par John Fru Ndi, arrivé en troisième position des préférences de la CRRN. Résultat : le chairman du Social democratic front, investi depuis le week-end dernier, a claqué la porte de ce regroupement, et décidé de se porter officiellement candidat de son parti à l’élection présidentielle. Le scénario de l’éclatement de la coalition , envisagé dès le début de cette aventure il y a un an, est accompli. Dans l’attente d’un improbable rapprochement entre Adamou Ndam Njoya et John Fru Ndi, en vue d’une stratégie commune, les autres leaders de la CRRN ont déjà fixé le cap de leur campagne : « l’ambition de notre équipe , une équipe d’hommes et de femmes patriotes, démocrates, républicains et compétents, est de refonder cette démocratie afin de remettre notre pays sur la voie d’un réel développement durable qu’autorisent notre potentiel et nos ressources humaines et naturelles », ont-ils dit, en lançant « un solennel appel à l’ensemble des partis politiques, des associations et du peuple tout entier pour un rassemblement historique ». L’histoire jugera.



par Valentin  Zinga

Article publié le 16/09/2004 Dernière mise à jour le 16/09/2004 à 10:47 TU