Rechercher

/ languages

Choisir langue
 

Irak

Zarqaoui appelle à s’en prendre aux chiites

Un attentat à la voiture piégée devant une mosquée de Bagdad à la fin des prières de vendredi a laissé une quinzaine de morts et une quarantaine de personnes blessées.(Photo : AFP)
Un attentat à la voiture piégée devant une mosquée de Bagdad à la fin des prières de vendredi a laissé une quinzaine de morts et une quarantaine de personnes blessées.
(Photo : AFP)
A la veille de la célébration de l’Aïd al-Adha, le terroriste le plus recherché d’Irak, le Jordanien Abou Moussab al Zarqaoui, a diffusé sur Internet un message dans lequel il s’en prend ouvertement à la communauté chiite et notamment à l’un de ses plus hauts dignitaires religieux, l’ayatollah Ali Sistani. Dans ce contexte, et après le nouvel attentat contre une mosquée chiite perpétré à Bagdad le 21 janvier, le risque d’affrontement intercommunautaire entre sunnites et chiites, tant redouté dans un pays déjà en proie à une violence exacerbée, croît de jour en jour à l’approche des élections du 30 janvier.

Tuer sans discernement : l’attentat suicide qui a frappé vendredi une mosquée chiite du quartier de Rissala dans le sud-ouest de Bagdad n’avait que cet objectif. Il l’a atteint. Les bilans font état d’au moins quinze morts et une quarantaine de blessés parmi lesquels des femmes et des enfants. Les fidèles qui assistaient à la prière du matin ont vu une voiture débouler, heurter un minibus et exploser au milieu de la foule. En ce jour d’al-Adha, qui marque la fin du pèlerinage des musulmans, de nombreux chiites étaient venus prier et le kamikaze a choisi son moment pour déclencher la bombe alors que le bedeau de la mosquée distribuait des bonbons et des gâteaux devant le lieu de culte.

En quelques semaines, la communauté chiite a été la cible de plusieurs attaques. Le groupe de Zarqaoui est à l’origine de plusieurs d’entre elles et notamment de celle qui a visé le siège du Conseil supérieur de la révolution islamique d’Irak (CSRII), le 18 janvier dernier. Il s’agissait du deuxième attentat suicide contre les locaux de ce parti, qui est l’une des principales formations politiques chiites du pays. Très récemment aussi, deux proches du grand ayatollah Sistani, cheikh Mahmoud al-Madahaïni et son fils, ont été tués dans un quartier du sud de Bagdad, après une prière. Ces exécutions ont été revendiquées par un autre groupe radical, Ansar al-Islam. L’ayatollah Sistani avait d’ailleurs lui-même échappé à une tentative d’attentat en février 2004.

Des attentats en série

Mais la principale attaque contre la communauté chiite a été organisée le 2 mars 2004. Des attentats se sont déroulés de manière quasi-simultanée dans la ville sainte de Kerbala et contre une mosquée de Bagdad. Plus de 170 personnes ont été tuées et 550 blessées dans cet attentat recensé comme le plus meurtrier depuis la chute du régime de Saddam Hussein. L’impact de cette attaque a été particulièrement important parce qu’elle a eu lieu le jour de la fête de l’Achoura, à l’occasion de laquelle les chiites commémorent la décapitation de l’imam Hussayn par le califat omeyyade.

Dans ce contexte, le message d’Abou Moussab al Zarqaoui, diffusé sur internet le 20 janvier, vient une nouvelle fois mettre de l’huile sur le feu entre les chiites et les sunnites. Considéré par les Américains comme le terroriste le plus dangereux d’Irak, responsable de nombreux enlèvements et attentats, cet homme dont le groupe est lié à Al Qaïda, mène la guérilla contre le gouvernement intérimaire et les forces de la coalition dirigée par les Etats-Unis. En s’en prenant sans détour à la communauté chiite, il cherche à provoquer un affrontement communautaire qui pourrait remettre en cause l’organisation des élections ou son résultat.

Les attaques de Zarqaoui qui dénoncent les actions des rafidha (hérétiques), dénomination péjorative désignant les chiites, sont particulièrement violentes. Elles s’en prennent notamment à l’ayatollah Sistani qui est traité de «Satan» et d’«imam de l’infidélité et de l’apostasie». Elles mettent aussi en cause la participation des chiites, aux côtés des Américains, à l’offensive contre Falloujah, la ville-bastion de Zarqaoui et leur «rôle dans les tueries, le pillage, le sabotage et l’effusion de sang des innocents».

Ces attaques ne sont pas gratuites et sont destinées à enflammer le débat autour du poids politique que les chiites pourront obtenir à la suite du scrutin du 30 janvier. Cette communauté qui est démographiquement la plus importante en Irak, pourrait, en effet, se tailler la part du lion au sein de la nouvelle assemblée constituante. D’autant que les autorités politiques et religieuses sunnites ont appelé à ne pas participer à un scrutin organisé sous occupation étrangère.


par Valérie  Gas

Article publié le 21/01/2005 Dernière mise à jour le 21/01/2005 à 17:55 TU