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Etats-Unis

Condoleezza Rice en mission de réconciliation

La secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice a entamé vendredi matin ses entretiens avec le Premier ministre britannique Tony Blair.(Photo : AFP)
La secrétaire d'Etat américaine Condoleezza Rice a entamé vendredi matin ses entretiens avec le Premier ministre britannique Tony Blair.
(Photo : AFP)
La toute nouvelle secrétaire d’Etat américaine a entamé vendredi à Londres une tournée marathon qui doit la mener en une semaine dans huit pays européens et au Proche-Orient. Condoleezza Rice qui a remplacé la semaine dernière Colin Powell à la tête de la diplomatie américaine, a fait savoir avant son départ qu’elle s’appliquerait à resserrer les liens avec l’Europe dont les rapports avec la première administration Bush avaient été sérieusement mis à mal par la guerre contre l’Irak. Elle a également annoncé son intention d’apporter le plein soutien des Etats-Unis au processus actuellement en cours au Proche-Orient. Elle doit d’ailleurs rencontrer le Premier ministre israélien Ariel Sharon ainsi que le chef de l’Autorité palestinienne Mahmoud Abbas juste avant le sommet qui doit les réunir le 8 février prochain à Charm al-Cheikh.

La détente semble bien être le maître mot pour définir la mission que s’est donnée la secrétaire d’Etat américaine pour sa première tournée européenne. Après les propos musclés tenus jeudi par le président Bush contre le régime de Téhéran dans son discours sur l’état de l’Union, Condoleezza Rice a en effet tenu à rassurer les partenaires européens des Etats-Unis sur le délicat dossier du nucléaire iranien au sujet duquel ils ne partagent décidément pas le même point de vue. «La question d’une attaque contre l’Iran n’est tout simplement pas à l’ordre du jour», a-t-elle précisé à l’issue d’un entretien avec le Premier ministre britannique Tony Blair qualifié de «meilleur ami et meilleur allié». «De nombreux outils diplomatiques» sont disponibles et l’administration américaine a bien «l’intention de les utiliser pleinement», a-t-elle même insisté tenant des propos auxquels les Etats-Unis n’avaient que très peu habitué la communauté internationale.  

Mais l’opération de charme lancée à Londres par la nouvelle chef de la diplomatie américaine ne doit cependant pas occulter la dureté des propos qu’elle a tenus, quelques heures auparavant, sur la République islamique dans l’avion qui l’emmenait dans la capitale britannique. «Je pense que nos alliés européens sont d’accord avec notre point de vue que l’attitude du régime iranien en ce qui concerne les droits de l’Homme et à l’égard de sa propre population est quelque chose d’exécrable», avait-elle déclaré aux journalistes qui l’accompagnent. «Je ne pense pas non plus que quiconque estime que les mollahs, qui n’ont pas été élus et qui dirigent ce régime, sont une bonne chose tant pour le peuple iranien que pour la région», avait-elle également ajouté en insistant sur le fait que les Etats-Unis ne voyait pas l’utilité de déployer des efforts diplomatiques pour convaincre l’Iran de renoncer à son programme nucléaire. «Les Iraniens savent ce qu’ils doivent faire. Ils doivent respecter leurs obligations, accepter les inspections, cesser de tenter de dissimuler des activités militaires sous le couvert d’énergie nucléaire à usage civile», avait-t-elle insisté.

En tempérant à Londres ses propos sur l’Iran, la secrétaire d’Etat a sans doute cherché à  convaincre ses interlocuteurs européens qu’après avoir mené pendant quatre ans une politique unilatérale, l’administration Bush comptait désormais s’appuyer sur ses alliés «pour répandre la liberté et la démocratie dans le monde».

A Paris, un discours clé sur les rapports transatlantiques

La nouvelle attitude des Etats-Unis dans le dossier israélo-palestinien est à cet égard très révélatrice de ce multilatéralisme dont Condoleezza Rice se veut le nouveau chantre. Alors que Washington a pendant plus de quatre ans ni plus ni moins qu’ignoré ce conflit en participant largement au gel de la Feuille de route, la secrétaire d’Etat a estimé qu’il y avait aujourd’hui «une vraie possibilité pour un progrès en vue du règlement» de ce dossier. «C'est le défi le plus difficile et le plus urgent auquel est confrontée la communauté internationale», a-t-elle insisté avant de lancer un appel pour soutenir financièrement –les Etats-Unis vont prochainement débloquer 350 millions de dollars– le processus en cours. «Nous devons absolument encourager les pays à apporter leur contribution», a-t-elle insisté soulignant que si l’Union européenne et certains pays du Moyen-Orient s’étaient montrés de bons donateurs, «certains dans la région n’avaient pas été aussi généreux qu’ils auraient pu l’être». Condoleezza Rice a même annoncé qu’elle participerait le mois prochain à la rencontre organisée à Londres par Tony Blair sur les réformes palestiniennes. «Nous espérons au cours de cette réunion faire des avancées significatives vers l'établissement d'une paix durable pour la population des Territoires palestiniens et d'Israël», a-t-elle déclaré.

Concernant le dossier irakien, la chef de la diplomatie américaine a l’intention de mettre en avant la mobilisation qui a été enregistrée aux élections du 30 janvier dernier pour tenter de resserrer les liens avec des pays comme la France ou l’Allemagne qui s’étaient violemment opposés au renversement du régime de Saddam Hussein. «Ces élections donnent à la communauté internationale une nouvelle opportunité de se rassembler pour aider» le peuple irakien, a ainsi affirmé Condoleeza Rice qui a également émis le souhait que les Etats-Unis et l’Europe puissent désormais «s’unir autour d’un programme commun pour les années qui viennent». Une idée que la secrétaire d’Etat ne manquera pas de développer le 8 février prochain à Paris au cours d’une intervention très attendue. Mme Rice doit en effet prononcer à l’occasion de son escale française un discours clé sur les relations euro-américaines. «Elle veut faire ce discours à Paris parce qu'elle pense que c'est l'un des endroits où il y a beaucoup de débats et de discussions sur les Etats-Unis, sur l'Europe, sur nos objectifs communs, sur la manière de réaliser nos projets», avait précisé son porte-parole, Richard Boucher.

En choisissant la France pour cet exercice, la secrétaire d’Etat semble vouloir tourner la page des rapports tendus avec Paris. Un geste symboliquement fort pour quelqu’un qui, il y a encore quelques mois –après la victoire sur Saddam Hussein–, affirmait que Washington se devait de «pardonner la Russie, ignorer l'Allemagne, et punir la France».


par Mounia  Daoudi

Article publié le 04/02/2005 Dernière mise à jour le 04/02/2005 à 17:07 TU