Niger
La TVA qui met le feu aux poudres
(Photo : AFP )
Après la manifestation de protestation du 15 mars à Niamey, contre la flambée des prix, suivie par plusieurs milliers de personnes, les pouvoirs publics ont choisi la manière forte pour stopper la montée en puissance de « la Coalition contre la vie chère ». Quarante-sept personnes ont été arrêtées dont de nombreux dirigeants de la coalition, accusés de complicité de destruction des biens publics. Mais ils s’en défendent accusant à leur tour des groupes de pilleurs très éloignés de leurs revendications. Trente et une personnes, dont les principaux dirigeants du mouvement contestataire ont été libérées à l’issue de la garde à vue, mais restent sous contrôle judiciaire. Seize autres personnes n’ont pas bénéficié de la liberté provisoire et ont été déférées à la prison de Niamey.
La vive réaction du gouvernement teintée de panique a paradoxalement fourni aux initiateurs des arguments supplémentaires pour la poursuite de leur mouvement. Persuadée de recueillir la sympathie des populations, « la Coalition contre la vie chère » a lancé un nouveau mot d’ordre pour une journée de manifestation dans les rues des principales villes du pays, le 22 mars. La réaction du gouvernement est immédiate : elle interdit les manifestations de rue. La réponse est aussi prompte, les associations appellent à une journée ville morte. Les différents syndicats d’enseignants et de fonctionnaires apportent leur soutien à cette initiative qui se mue alors en une journée de grève générale. Mais les organisateurs du mouvement avaient une grande inquiétude en ce qui concerne le ralliement des professions libérales et surtout des commerçants qui eux tirent un bénéfice certain de l’application de la loi.
Mauvaise coordination des syndicats
La journée du 22 mars qui avait valeur de test a finalement répondu aux attentes des organisateurs, tant les raisons de la grogne semblent légitimes et faciles défendre. Qui pourrait durablement s’opposer à un mouvement de lutte contre la vie chère ? Même pas les commerçants qui évitent d’être mis au ban de la société. Ils déclinent toute responsabilité dans la hausse des prix et accusent aussi l’Etat nigérien d’instaurer une nouvelle taxe qui les oblige à réévaluer les prix à la consommation. Mais pour l’Etat la nouvelle TVA ne devrait pas forcément entraîner les augmentations vertigineuses des prix des produits de première nécessité. Dans cette polémique « la Coalition contre la vie » réclame alors une abrogation pure et simple ou un encadrement sévère de la loi, faute de quoi le sac de 50 kg de riz est passé de 15 000 à environ 18 000 F CFA ( un peu plus de 27 euros) et la baguette de pain de 150 F CFA à 175 voire 200 F CFA.
A Niamey, la journée ville morte a été largement suivie, tout comme à Zinder la deuxième ville du Niger. Mais dans cette ville des manifestants n’ont pu s’empêcher de descendre dans les rues. Ils ont dressé des barricades et incendié de pneus et ont été repoussés par les forces de l’ordre. A Agadez, le mouvement n’a pas été suivi faisant les frais d’une mauvaise coordination des syndicats. Les marchés ont ouvert connaissant les affluences habituelles et les services publics ont normalement fonctionné. Les enseignants étant en vacances de Pâques, le taux de mobilisation n’a pu être mesuré dans leurs rangs. Après cette journée de mobilisation, la Coalition contre la vie chère attend une réponse du gouvernement avant d’envisager ou non la poursuite de son mouvement.
par Didier Samson
Article publié le 22/03/2005 Dernière mise à jour le 22/03/2005 à 16:39 TU