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Géorgie

Pas d’accord sur le retrait des bases russes

La ministre géorgienne des Affaires étrangères, Salomé Zourabichvili.(Photo : AFP)
La ministre géorgienne des Affaires étrangères, Salomé Zourabichvili.
(Photo : AFP)
Le 6 mai, la ministre des Affaires étrangères géorgienne annonce l’absence d’accord avec la Russie concernant le retrait des deux dernières bases russes de Géorgie, legs de l’époque soviétique. Pourtant, le 25 avril, un accord verbal semblait avoir été conclu.

De notre correspondant à Tbilissi

Un pas en avant, deux en arrière. Voilà à quoi ressemblent les négociations entre Tbilissi et Moscou au sujet du retrait des deux dernières bases militaires russes de Géorgie. Le 25 avril, la ministre des Affaires étrangères de Géorgie, Salomé Zourabichvili, bien qu’extrêmement prudente, parle de «progrès concrets». Onze jours plus tard, le 6 mai, elle annonce l’échec des négociations… et la décision de son président, Mikhaïl Saakachvili, de ne pas se rendre à Moscou, le 9 mai, pour les cérémonies du 60e anniversaire de la capitulation nazie.

«Ces bases sont le dernier legs de la domination totalitaire soviétique ici et nous espérons que cette question sera résolue d’une manière civilisée et diplomatique», déclare le président Saakachvili, le 7 mai. Tbilissi réclame depuis des années le retrait des forces russes des bases de Batoumi, à la frontière turque, et d’Akhalkalaki, située au Sud du pays dans une région majoritairement peuplée d’Arméniens ; 3 000 hommes en tout. Seulement.

Le 25 avril, Salomé Zourabichvili parvient à un accord verbal avec Sergueï Lavrov, son homologue russe. Le retrait définitif desdites bases devait se faire par étapes et prendre fin le 1er janvier 2008. M. Lavrov suggère même de commencer le démantèlement dès 2005, une fois que Poutine et Saakachvili auront signé l’accord. Peut-être après le 10 mai, dit-on. «Le diable est toujours dans les détails», déclare, méfiante, Mme Zourabichvili. Elle n’oublie pas qu’en 1999, lors d’un sommet de l’OSCE à Istanbul, la Russie a promis de retirer ses troupes de la république caucasienne…

Une importance plus symbolique que réelle

Outre les détails, l’accord verbal du 25 avril ne règle pas certaines questions. Ou du moins il n’en n’est pas publiquement question. Notamment celle de le somme à verser à la Russie pour les opérations de retrait, celle des centres antiterroristes qui doivent être créés après l’évacuation des bases, idée lancée par la diplomatie géorgienne pour ménager une sortie honorable aux Russes, ou encore la question de l’engagement de la Géorgie de ne pas permettre l’établissement de forces tierces, sous-entendu américaines, sur son territoire. Ce dernier point a certes été discuté auparavant. Au nom de sa souveraineté, Tbilissi refuse de signer un tel document. Pas sûr que Moscou ait bien entendu l’argumentation.

Pourquoi ce revirement du 6 mai ? L’importance desdites bases est plus symbolique que réelle. «Les Russes n’arrivent pas à se faire à l’idée que la Géorgie est indépendante», déplore le politologue Alexandre Rondeli, président de la Fondation géorgienne pour les études stratégiques et internationales.

Pas étonnant que ce soit le ministre de la Défense russe, Sergueï Ivanov, qui, le 4 mai, jette un coup de froid sur l’apparente confiance retrouvée entre les diplomates des deux pays en déclarant qu’il faudrait plus de temps que convenu pour évacuer les bases. Une façon indirecte de dire «non» à l’accord. En quelques mois, les unités de Batoumi et Akhalkalaki pourraient être aisément démantelées.

Pour Cyrille Gloaguen, spécialiste des questions de sécurité russes à l’Institut français de géopolitique Paris-VIII, «la politique étrangère russe est double, voire triple. Le ministère des Affaires étrangères n'est pas le seul à faire de la politique extérieure. Les bases russes en Géorgie n’apportent rien à la Russie. Au contraire en provoquant la dénonciation systématique de Moscou sur la scène mondiale, elles desservent ses intérêts».

Mikhaïl Saakachvili attend beaucoup du soutien de Washington. Peut-être trop. D’où les audaces du Parlement géorgien qui a voté une résolution, le 10 mars, appelant au départ des forces russes avant le 1er janvier 2006. Faute de quoi ces bases seraient déclarées illégales, des visas ne seraient pas délivrés aux militaires russes etc.

Certes, Washington soutient Tbilissi. Le 7 mai, l’ambassadeur américain à Moscou déclare que son pays et les autres membres du Traité des forces conventionnelles en Europe ne devraient pas ratifier la version révisée dudit traité tant que la Russie ne respectera pas son engagement de 1999. Toutefois, le 6 mai, dans un entretien à la chaîne de télévision géorgienne Rustavi 2, George Bush déclare : «Concernant les querelles régionales ou les bases, je peux apporter mon aide. Mais la meilleure façon de traiter cela est de le faire pacifiquement entre la Russie et la Géorgie.» Et si M. Bush n’était pas le deus ex-machina du drame russo-géorgien ?


par Régis  Genté

Article publié le 09/05/2005 Dernière mise à jour le 09/05/2005 à 15:12 TU