Mexique
Avenir incertain pour la droite mexicaine
(photo : AFP)
De notre correspondant à Mexico
Si les élections dans l’État de Mexico sont un thermomètre pour les présidentielles de 2006, le PAN, le Parti d’action nationale, la droite au pouvoir, a du souci à se faire. En effet, les Mexicains de cet État le plus important du pays (13 millions d’habitants – 25 % de l’électorat national), ont résolument tourné le dos au président Vicente Fox en choisissant d’élire le candidat du PRI, le Parti révolutionnaire institutionnel, qu’ils avaient pourtant chassé du pouvoir le 2 juillet 2000.
Avec une campagne intelligente et très coûteuse, le PRI est parvenu à mobiliser toutes les bases rurales et urbaines de son électorat. L’État de Mexico est le bastion du PRI mais il ne lui a pas manqué une seule voix pour battre le candidat du PAN puisque c’est le meilleur score jamais réalisé ici pour l’élection d’un gouverneur. Le PRI avait craint de perdre ces élections car tous les sondages au début de la campagne donnait le PAN gagnent mais il s’est progressivement effondré. Peña Nieto l’a emporté grâce à l’incroyable machine électorale du PRI, qui distribue l’argent à pleines mains et utilise quand il le faut tout son arsenal anti-démocratique (achat de vote, transport d’électeurs, manipulation des listes, etc.) sur lequel l’Institut électoral de l’État a curieusement fermé les yeux. C‘est la huitième élection de gouverneur que le PRI remporte cette année contre deux seulement enlevée par la droite.
Le même jour se déroulait dans le Nayarit une autre élection de gouverneur que le PRI a enlevé de justesse au PRD, le PAN ne parvenant à faire qu’un score de 5,8 % alors qu’il était le gouverneur sortant ! Grâce à ces résultats, le PRI gouverne dans 17 États sur les 31 que compte le pays ce qui lui donne une force considérable pour les présidentielles de 2006. Mais il se garde de chanter victoire car il gagne ces élections grâce au vote sanction que les Mexicains infligent depuis les élections intermédiaires de 2003 au gouvernement Fox.
La montée en puissance de la gauche
Le second enseignement de cette élection est l’avance tranquille du PRD, le parti de centre-gauche, dont la figure emblématique est Andres Manuel Lopez Obrador, le maire de Mexico, qui gagne lui aussi des espaces, en particulier dans les zones urbaines. Lopez Obrador est le candidat le mieux placé dans les sondages pour les présidentielles de 2006, mais ces résultats démontrent que sa renommée de bon gestionnaire de la capitale ne suffit pas et qu’il lui manque un vrai parti. Le PRD rassemble en effet des courants très différents, souvent divergents, peu disciplinés qui ont fait payé à Lopez Obrador le parachutage de sa candidate dans l’État de Mexico. Néanmoins, malgré une campagne austère, elle est parvenue à améliorer le score habituel du PRD. Et dans l’État du Nayarit, la gauche a, là aussi, créé la surprise en parvenant à faire part égale avec le PRI pour la place de gouverneur qui lui a échappé de 12 000 voix.
Le déclin du PAN
En cinq ans, le gouvernement de Vicente Fox n’a pas réussi à être crédible. La lutte contre la pauvreté, la corruption et l’insécurité n’ont pas donné les résultats escomptés. L’état de droit n’a pas été rétabli. Le PAN qui n’a jamais eu de majorité à la chambre n’a pas cherché à établir de relations avec les autres partis, son autoritarisme et son conservatisme ont fini par irriter les Mexicains. Le divorce entre la société et son président s’est accentué lorsque Vicente Fox a tenté de se débarrasser de façon malhonnête de son adversaire politique Lopez Obrador. C’est sans doute la goutte qui a fait débordé le vase et a accéléré le déclin du PAN. Pour tenter de contrecarrer cet effondrement, Vicente Fox s’est investi personnellement dans la campagne électorale de l’État de Mexico. 24 h avant le scrutin, alors que tout prosélytisme est pourtant interdit, il a organisé la fête de la démocratie qui a tourné au fiasco : elle n’a réuni que 8 000 personnes sur les 150 000 attendues malgré un beau discours du prix Nobel Lech Walesa invité à grand prix !
Vicente Fox incapable de mener la transition démocratique que réclame le pays a progressivement dilapidé son capital de sympathie entraînant avec lui son parti qui s’est radicalisée vers l’extrême droite. La bataille des présidentielle de 2006 pourrait donc se jouer entre le PRI et le PRD, la droite ne pouvant espérer qu’un rôle de parti charnière.
par Patrice Gouy
Article publié le 07/07/2005 Dernière mise à jour le 07/07/2005 à 13:07 TU