Proche-Orient
Les Palestiniens se préparent aussi au retrait
(Photo : AFP)
Le retrait unilatéral de la bande de Gaza, tel que l’envisageait dans un premier temps Ariel Sharon, n’aura finalement pas lieu. Contraint et forcé, notamment par son grand allié américain, le Premier ministre israélien s’est finalement résigné à coordonner le désengagement de ce Territoire avec l’Autorité palestinienne. Les responsables en charge de la sécurité des deux parties se sont donc rencontrés à plusieurs reprises et les négociations ont visiblement été âpres puisque plusieurs de ces réunions se sont soldées sur un constat d’échec. Israël a ainsi repoussé une requête palestinienne visant à obtenir davantage d’armes et de munitions pour assurer la sécurité dans les secteurs évacués au prétexte que «Gaza était saturé d’armes». Seul bémol, ces armes sont aux mains des groupes radicaux comme le Hamas et le Jihad islamique et non entre celles des forces de sécurité palestiniennes soumises à la forte pression de Tsahal durant les cinq années qu’aura duré la deuxième Intifada. L’Etat hébreu pourrait toutefois revoir sa position, la demande palestinienne ayant reçu le soutien de Washington. Et plusieurs responsables israéliens, dont le vice-Premier ministre Shimon Peres, ont en outre jugé légitime cette revendication. «On ne peut pas à la fois exiger de l’Autorité palestinienne qu’elle lutte contre le terrorisme et refuser de lui en donner les moyens», a-t-il notamment déclaré.
Car tout le monde s’accorde aujourd’hui à reconnaître que le Hamas et le Jihad islamique sont bien mieux équipés que la police palestinienne. Un récent rapport publié par un cercle d’études et de réflexions basé aux Etats-Unis –le Strategic Assessments Initiative– a d’ailleurs mis en doute la capacité des forces de sécurité palestiniennes à gérer ces groupes armés une fois la bande de Gaza évacuée. Selon ce document en effet, ces forces sont sous-équipées et leur action est entravée par la corruption ainsi que par les doublons et les rivalités au sein de la chaîne de commandement. Sans être aussi catégorique, le général William Ward –chargé par l’administration Bush de coordonner les opérations de sécurité lors du retrait israélien– a lui aussi reconnu que les troupes palestiniennes étaient certes «insuffisantes» mais en cours d’amélioration. «Ces forces de sécurité tentent d’émerger d’une structure fractionnée, corrompue et mal organisée, comportant des baronnies et des centres de pouvoir éclatés, sans chaîne de commandement claire par rapport à l’autorité centrale», a-t-il justifié en mettant en avant le fait qu’il s’agit là d’«un travail de longue haleine».
Des moyens dérisoires mais une volonté de réussirMême au sein de la hiérarchie palestinienne, on reconnaît que les moyens dont disposent la police et les services de sécurité sont dérisoires. «Nos besoins ne sont couverts qu’à hauteur de 20% et aucune balle tirée n’est remplacée», a récemment déploré un porte-parole du ministère de l’Intérieur, Taoufik abou Khoussa. «Un équipement correct nous permettrait de mieux faire notre travail et le manque de munitions et d’armes affaiblira certainement nos capacités mais nous sommes déterminés à faire notre job dans la mesure du possible», a-t-il souligné. La confiance affichée par ce responsable est partagée à tous les niveaux de l’Autorité palestinienne. En visite d’inspection la semaine dernière dans un centre d’entraînement de la police, le Premier ministre Ahmed Qoreï a affirmé que son gouvernement était parfaitement en mesure d’administrer dans le calme la bande de Gaza une fois achevé le retrait israélien. «Que l’occupation cesse et vous verrez que nous serons capables d’administrer nous-mêmes nos affaires. Nous assumerons nos responsabilités et nous espérons que notre performance impressionnera le monde entier», a-t-il assuré.
Et c’est dans cette perspective de reprise en main de la bande de Gaza après le départ d’Israël que trente-quatre officiers égyptiens sont arrivés mercredi dans ce territoire. Leur mission, aider à la réhabilitation des services de sécurité palestiniens. «Ils vont aider la police et la Sûreté nationale et resteront à Gaza jusqu’à la fin du retrait», a expliqué un responsable. L’Egypte est en effet un partenaire de premier ordre dans le plan d’évacuation qui doit débuter le 17 août et s’étaler sur plusieurs semaines. Elle aura notamment en charge le couloir «Philadelphie», cette frontière de quatorze kilomètres qui séparent l’Egypte de la bande de Gaza. Les autorités du Caire ont à cette effet conclu cette semaine un accord avec l’Etat hébreu pour le déploiement d’une force de 750 gardes-frontière qui aura en charge la sécurité dans cette région avec pour principale mission d’empêcher la contrebande d’armes vers les Territoires palestiniens. Le Premier ministre palestinien Ahmed Qoreï a confirmé mercredi qu’aucune présence israélienne ne serait maintenue au terminal de Rafah actuellement contrôlé côté palestinien par l’Etat hébreu qui le ferme régulièrement pour des raisons de sécurité. Or ce terminal est l’unique point de passage pour les habitants de la bande de Gaza désirant se rendre en Egypte, devenue pour eux un point de transit obligatoire pour se rendre à l’étranger.
par Mounia Daoudi
Article publié le 03/08/2005 Dernière mise à jour le 10/08/2005 à 13:21 TU