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Allemagne

Dernière ligne droite avant les élections

A&nbsp;deux semaines du scrutin, le chancelier sortant fait paradoxalement figure de challenger fac à son adversaire du CDU, Angela Merkel.(Source : <A href="http://www.bundestag.de" target=_BLANK>Bundestag</A>)
A deux semaines du scrutin, le chancelier sortant fait paradoxalement figure de challenger fac à son adversaire du CDU, Angela Merkel.
(Source : <A href="http://www.bundestag.de" target=_BLANK>Bundestag</A>)
Gerhard Schröder semble avoir peu de chance d'être reconduit pour un troisième mandat. A deux semaines des élections, les concepts d’Angela Merkel ont les plus grandes chances d’être mis en œuvre, et sa victoire pourrait marquer un tournant libéral.

De notre correspondant à Berlin

Lorqu’il arrive au pouvoir en septembre 1998, Gerhard Schröder met fin avec ses alliés écologistes à seize années de règne de son prédécesseur, le chrétien-démocrate et chancelier de la réunification allemande Helmut Kohl. Les électeurs ont le sentiment que le pays stagne sans projets et réformes pour les séduire. La gauche l’emporte.

Sept ans après, un sort comparable menace Gerhard Schröder au soir des élections générales du 18 septembre. Certes, les sociaux-démocrates du SPD ont regagné quelques points dans les sondages mais restent environ dix points derrière les chrétiens-démocrates de la CDU, du jamais vu. Les Allemands rejettent la majorité rouge-verte au pouvoir depuis sept ans et jugent l’opposition conservatrice plus crédible sur les sujets décisifs comme la politique économique et sociale, à l’heure où l’Allemagne bat des records en matière de chômage.

Pourquoi Gerhard Schröder, au plus bas dans les sondages, a-t-il choisi de provoquer des élections anticipées, un an avant le terme de l’actuelle législature ? Les commentateurs continuent de s’interroger. Au soir du 22 mai, la gauche enregistre une énième défaite cinglante dans un de ses fiefs historiques, la plus grande région d’Allemagne, la Rhénanie du Nord Westphalie. Gerhard Schröder prend tout le monde de court et annonce des élections anticipées.

Une procédure complexe car la constitution allemande ne permet pas au chancelier de dissoudre le parlement et ce dernier ne peut pas mettre un terme à son mandat. Un subterfuge est nécessaire. Le 1er juillet, les troupes de Gerhard Schröder refusent la confiance au chancelier, donnant l’apparence d’une crise politique. Le président de la république accepte trois semaines plus tard l’organisation d’élections anticipées. Le tribunal constitutionnel saisi ne pose pas son veto.

Gerhard Schröder a-t-il craint de voir sa majorité s’effriter, notamment en raison des critiques de l’aile gauche de son parti contre une politique de réformes sociales jugée néo-libérale ? A-t-il préféré choisir un suicide politique programmé au vu des sondages catastrophiques à un démontage douloureux et indigne ? Les mémoires du chancelier sortant feront peut-être la lumière sur une décision prise en solitaire par Gerhard Schröder, contre notamment l’avis de ses alliés verts.

Schröder parait fatigué, comme son gouvernement

Un sursaut de la croissance l’an prochain, une baisse timide mais régulière du chômage, les fruits des réformes des assurances sociales auraient pu améliorer le bilan d’ici le terme normal de la législature en septembre 2006 et permettre une deuxième réélection de Gerhard Schröder.

Mais à deux semaines du scrutin, le chancelier sortant fait paradoxalement figure de challenger. Gerhard Schröder veut officiellement encore croire à la victoire et mise sur les nombreux électeurs indécis. Mais malgré des gains minimes dans les sondages, le SPD ne recueillerait aujourd’hui que 32% des voix contre 38,5% il y a trois ans (il faisait alors jeu égal avec la CDU).

Gerhard Schröder n’a pas de nouveaux thèmes et de nouveaux visages à proposer. Le chancelier répète à l’envi que les réformes impopulaires de l’assurance-chômage et de la sécurité sociale étaient justifiées et commencent à porter leurs fruits et qu’elles doivent être poursuivies. Les propositions d’avenir sont maigres, hormis des concessions à l’aile gauche du parti comme une imposition supplémentaire pour les plus riches. Schröder parait fatigué, comme son gouvernement où dominent des sexagénaires peu convaincants. Le chancelier s’est refusé à présenter de nouveaux visages.

Les chrétiens-démocrates, eux, ont vite réagi. L’annonce surprise d’élections anticipées a contraint l’opposition à mettre en sourdine ses querelles. Angela Merkel, longtemps jugée comme un poids plume et une figure de transition par les barons de la CDU s’est imposée. La candidate chrétienne-démocrate marque un tournant dans l’histoire de son parti et du pays. Une femme issue de l’ex-RDA - protestante et sans enfants au sein d’un mouvement marqué par ses racines chrétiennes et son attachement au rôle de la famille - sera sans doute demain la première femme à diriger l’Allemagne.

Quelle politique menera Angela Merkel ?

Du programme de la CDU, on retient surtout deux mesures : l’augmentation de deux points de la TVA (actuellement 18,6%) pour financer une baisse des cotisations chômage et diminuer le coût du travail, très élevé en Allemagne. Les électeurs ne sont pas convaincus mais cette mesure avait aussi pour objectif d’asseoir la crédibilité du parti montrant ainsi que les mesures impopulaires n’étaient pas dévoilées après les élections. D’autres aspects du programme sont d’inspiration plus libérale : un assouplissement de la réglementation sur les licenciements, une assurance maladie dont le montant serait égal pour tous, les plus pauvres bénéficiant d’un transfert fiscal ou une baisse de l’impôt sur le revenu.

Les sociaux-démocrates tirent à boulets rouges sur l’opposition estimant que son programme signifie la fin de l’économie sociale de marché qui a marqué l’Allemagne d’après-guerre. La dénonciation est exagérée mais une victoire d’Angela Merkel pourrait marquer un tournant libéral. Gerhard Schröder, lui, après plusieurs années perdues, s’est décidé pour une réforme du modèle social allemand tout en restant fidèle aux idéaux de justice sociale du SPD.

A deux semaines des élections, les concepts d’Angela Merkel ont les plus grandes chances d’être mis en œuvre. Une hypothèque demeure : la CDU aura-t-elle ou non la majorité absolue avec ses alliés libéraux au soir du 18 septembre ? Le bon score d’un nouveau parti à la gauche du SPD rend le paysage politique plus complexe. Faute de majorité absolue, les chrétiens-démocrates devraient se résoudre à former une grande coalition avec le SPD.


par Pascal  Thibaut

Article publié le 04/09/2005 Dernière mise à jour le 04/09/2005 à 18:43 TU

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