France
Les salariés répondent à l’appel des syndicats
Photo : AFP
L’union fait la force. Et les syndicats qui ont appelé les salariés à faire grève le 4 octobre, font mine d’y prendre goût. Pour preuve, ils ont prévenu que cette journée de mobilisation n’était pas une fin en soi. Mais plutôt un début. Que le gouvernement ne se méprenne pas et ne tente pas de faire la politique de l’autruche en attendant que l’orage social passe, les syndicats ont décidé de veiller au grain tous ensemble. Bernard Thibault, le secrétaire général de la CGT, a d’ailleurs prévenu : «D’ores et déjà, tous les syndicats se sont mis d’accord pour faire un point de la mobilisation d’aujourd’hui et envisager des suites, si d’aventure nous n’avons pas les réponses appropriées aux revendications qui sont portées par la rue». Même son de cloche à Force ouvrière où Jean-Claude Mailly a mis en garde : «Ou gouvernement et patronat répondent aux questions, ou ils ne le font pas et alors nous verrons la suite».
Depuis le 10 mars, date à laquelle avait été organisée la dernière grande journée de mobilisation des salariés, il semble que le climat social ne se soit pas amélioré. En tout cas, les travailleurs sont toujours suffisamment mécontents pour descendre massivement dans la rue afin de faire entendre leur désaccord avec la politique du gouvernement et exprimer leurs attentes. Et la première d’entre elles concerne le pouvoir d’achat. C’est pourquoi l’un des dossiers sur lesquels les syndicats ont d’emblée annoncé qu’ils entendaient obtenir des avancées concerne le déblocage des négociations salariales par branche, en faveur duquel ils souhaitent une intervention rapide du gouvernement auprès du Medef.
Augmenter le pouvoir d’achat
Ce dossier ne semble pas le plus simple. Laurence Parisot, la nouvelle présidente de l’organisation patronale, ne cesse de défendre le point de vue selon lequel les patrons français voudraient bien augmenter les salaires mais n’en ont pas les moyens. La faute à une croissance «atone» et au manque de flexibilité d’un système où l’on ne veut pas laisser sa chance à un véritable libéralisme économique. Ce qui aboutit simplement à cumuler les inconvénients.
Cette analyse est, bien évidemment, à l’opposé de celle des syndicats qui insistent, pour leur part, sur l’hypocrisie du discours de sociétés cotées en bourse qui font des profits importants tout en expliquant qu’elles ne peuvent pas prendre en compte les attentes salariales de leurs employés ou même, cas extrême, qu’elles sont obligées de mener des programmes de restructuration avec licenciements pour pouvoir gagner encore plus d’argent. Et de citer Hewlett-Packard qui représente l’exemple type de ce genre de situation. Malgré une position de leader sur le marché, cette société a annoncé récemment des centaines de suppressions d’emplois en France au nom de la productivité. Ce qui a provoqué des protestations des employés et des syndicats.
La présence de nombreux salariés du privé dans les cortèges de manifestants aux côtés des fonctionnaires, habitués des défilés, est de ce point de vue révélatrice. Elle montre qu’un cap a été franchi dans l’exaspération sociale et que la précarité à laquelle les travailleurs se sentent soumis les pousse de plus en plus à manifester. Les syndicats se sont d’ailleurs félicités du fait que le 4 octobre, le nombre d’appels à l’arrêt du travail dans les entreprises privées ait été supérieur à celui du 10 mars.
Les salariés du privé manifestent aussi
Il s’agit, en effet, d’une victoire pour les organisations syndicales qui ont fait de la lutte contre le contrat nouvelles embauches, qui a été élaboré pour apporter plus de flexibilité aux entreprises privées, l’un de leurs principaux chevaux de bataille. Cette réforme qui vise, selon le gouvernement, à relancer l’emploi en permettant aux dirigeants de société de licencier un employé sans justification pendant une période de deux ans après son embauche, est présentée comme une atteinte aux droits sociaux par les syndicats. Ceux-ci y voient, en effet, simplement une mesure susceptible de développer la précarité et demandent clairement son retrait au gouvernement.
Face à cette mobilisation, le Premier ministre a voulu réaffirmer son engagement à tout faire pour améliorer les conditions de vie et de travail des Français. Dominique de Villepin a ainsi déclaré : «J’écoute le message que nous adressent les Français… J’entends l’impatience et parfois le découragement de certains de nos compatriotes». Il s’est aussi engagé à «répondre à leurs inquiétudes et à leurs aspirations». Mais surtout, il a appelé toute la classe politique à prendre sa part de responsabilité face à la colère des salariés en affirmant : «Le message adressé par les Français s’adresse à tous : au centre, à la droite, à la gauche, aux entreprises, à l’Etat». Comme si dans le jeu politicien une faute partagée était à demi pardonnée. Reste que c’est bien à lui et à son gouvernement que des questions sont aujourd’hui posées et qu’il devra y répondre d’une manière ou d’une autre.
par Valérie Gas
Article publié le 04/10/2005 Dernière mise à jour le 04/10/2005 à 17:06 TU