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France

Un budget «volontariste» ou «virtuel» ?

La première présentation du budget pour le ministre de l'Economie et des Finances Thierry Breton (D) dans le gouvernement de Dominique de Villepin (G). Thierry Breton s’est félicité d’une hausse limitée de l’inflation pour le budget 2006.(Photo : AFP)
La première présentation du budget pour le ministre de l'Economie et des Finances Thierry Breton (D) dans le gouvernement de Dominique de Villepin (G). Thierry Breton s’est félicité d’une hausse limitée de l’inflation pour le budget 2006.
(Photo : AFP)
Le projet de loi de finances présenté par le ministre de l’Economie, Thierry Breton, au Conseil des ministres s’appuie sur plusieurs hypothèses optimistes qui ne font pas l’unanimité, comme par exemple celles d’une croissance supérieure aux prévisions des économistes ou d’une stabilisation des déficits publics. Du coup, il prête le flanc à de nombreuses critiques, à droite comme à gauche, où certains estiment qu’il vise avant tout à faire patienter les Français jusqu’en 2007, année de l’élection présidentielle. Et ce d’autant plus que la principale innovation du budget réside dans une réforme fiscale qui ne prendra effet que l’année prochaine.

L’exercice n’est pas facile. La conjoncture non plus. Pour son premier budget, Thierry Breton n’a pas été gâté. Il a donc joué la carte de la sobriété en affirmant avoir préparé «un projet de budget sérieux» lorsqu’il s’est rendu à l’Assemblée nationale pour le présenter. Le ministre a, en effet, mis en avant sa volonté de respecter les engagements de la France vis-à-vis de Bruxelles en limitant les déficits publics à 2,9% du produit intérieur brut (PIB), de manière à ne pas dépasser la barre des 3% imposée par le pacte de stabilité européen.

Louable, cette ambition paraît néanmoins peu réaliste à de nombreux observateurs puisqu’elle s’appuie essentiellement sur une hypothèse de croissance de 2 à 2,5% qui ne correspond pas du tout aux prévisions des économistes, selon lesquels elle ne devrait pas dépasser les 1,8%. Certes, Thierry Breton affirme que ce chiffre ne tient pas compte de l’impact des réformes importantes engagées par le gouvernement et des efforts pour maîtriser les dépenses publiques (notamment grâce à la suppression de 5 318 postes de fonctionnaires) -une position soutenue par le président Chirac-, mais cette anticipation d’un avenir radieux ne semble pas suffisante pour calmer les critiques des détracteurs du gouvernement.

«Le prix Goncourt de la tartufferie»

Peu amène, le président du groupe socialiste à l’Assemblée nationale, Jean-Marc Ayrault, a décerné à ce projet de loi de finances «le prix Goncourt de la tartufferie». Et de décrire «un condensé de toutes les erreurs et de toutes les impasses des trois années précédentes» au premier rang desquelles figure la surestimation des prévisions de croissance. Le Premier secrétaire du Parti socialiste (PS), François Hollande, a enfoncé le clou en déclarant tout simplement que les prévisions de croissance retenues dans le budget 2006 ne relevaient pas «du volontarisme, mais de la manipulation».

Charles de Courson, porte-parole du groupe UDF (Union pour la démocratie française) dans le débat budgétaire, a lui aussi été cinglant. Il a déclaré que ce projet n’est pas «à la hauteur de la gravité de la situation des finances publiques du pays» et que non seulement on ne réduit pas les déficits publics mais en plus on les «sous-estime». Maurice Leroy, un autre député du parti centriste, a évoqué pour sa part «un budget virtuel» bâti à partir d’«hypothèses complètement irréalistes».

Le projet de loi de finances offre une nouvelle occasion à l’UDF de marquer sa différence avec le gouvernement auquel elle a refusé de participer. François Bayrou, son président, a d’ailleurs, dès avant la présentation officielle du budget, attaqué vivement sa principale réforme qui concerne la fiscalité. Celle-ci prévoit notamment la disparition d’au moins deux tranches d’imposition pour favoriser les classes moyennes et le plafonnement des impôts sur le revenu à 60% (bouclier fiscal). François Bayrou a jugé que la «surenchère perpétuelle à la baisse d’impôts» était «fallacieuse». Il a aussi manifesté avec ironie sa perplexité face à l’annonce de mesures qui ne prendront effet que dans un an : «On ne baisse pas les impôts en 2006 mais, je ne sais pourquoi, en 2007».

Priorité à l’emploi

Le ministre délégué au Budget Jean-François Copé a tenté de minimiser l’impact de ces critiques sur un budget d’attente destiné avant tout à préparer la présidentielle de 2007 en mettant en avant les ambitions de ce projet qui est, pour lui, résolument orienté vers l’avenir. Il a estimé qu’il permet de «créer toutes les conditions pour bâtir la croissance sociale» et représente «la traduction concrète des grands objectifs» sur lesquels le nouveau Premier ministre, Dominique de Villepin, s’est engagé devant les Français. Il a surtout pris soin d’insister sur la priorité de ce budget : dédier les quelque 4,5 milliards d’euros de marge de manœuvre dont disposera l’Etat à l’emploi, en finançant le plan de cohésion sociale et la baisse des charges des entreprises. De ce point de vue, c’est le budget du «sérieux» mais aussi de l’espoir.

par Valérie  Gas

Article publié le 28/09/2005 Dernière mise à jour le 28/09/2005 à 17:41 TU