Grippe aviaire
Surveiller l’Asie
(Cartographie: SB/RFI)
Les nouvelles de Chine ne sont pas bonnes. La grippe aviaire vient d’y faire officiellement sa réapparition après deux mois durant lesquels aucun nouveau foyer n’avait été détecté. Les autorités sanitaires ont annoncé cette semaine que le virus H5N1 était à l’origine de la mort de 2 600 volailles dans un élevage de Mongolie intérieure. A en croire les responsables chinois, la situation serait sous contrôle et aucun cas de contamination humaine n’aurait été décelé. Le ministère de l’Agriculture a déclaré que toutes les mesures avaient été prises pour éviter la propagation de la maladie, plus de 90 000 volatiles ayant été abattus à proximité du foyer.
Etant donné la difficulté de procéder à la vérification des faits sur place, ces informations sont à prendre avec les précautions d’usage. La seule chose qui paraît incontestable étant, bien évidemment, que le virus est bel et bien présent dans cette région de Chine. Reste à savoir s’il ne l’est pas aussi ailleurs. Les déclarations du vice-Premier ministre, Hui Liangyu, sont de ce point de vue préoccupantes. Pour la première fois, un responsable chinois a reconnu que la situation était «grave», allant même jusqu’à affirmer que le pays traversait «le pire moment en ce qui concerne la propagation du virus» et qu’il ne fallait pas «sous-estimer les risques».
Quelle situation en Chine ?
De nombreux experts estiment, en effet, que la diffusion de la grippe aviaire en Chine est vraisemblablement plus importante qu’on ne l’imagine. Le précédent du SRAS (syndrome respiratoire aigu sévère) qui s’était répandu dans le pays sans que l’alerte ne soit donnée, a mis en valeur la difficulté d’appréhender l’évolution d’une maladie dans ce pays en raison des réticences de Pékin à accepter le principe de la transparence. Il a aussi montré les lacunes du système sanitaire chinois. Et sur ces deux points, il ne semble pas que depuis 2002 des évolutions flagrantes aient eu lieu.
Malgré tout, la Chine pourrait avoir pris conscience de la nécessité de collaborer avec la communauté internationale. Le ministre de la Santé, Gao Qiang, a d’ailleurs exprimé la bonne volonté de Pékin en déclarant : «La communauté internationale a besoin de coopérer pleinement afin de protéger la santé des habitants de la planète et créer un front efficace et uni pour combattre la propagation internationale de la grippe», et d’ajouter : «Le ministère chinois de la Santé souhaite renforcer la coopération et la communication avec les Nations unies et l’Organisation mondiale de la santé». Dans cette optique, il a d’ailleurs reçu le coordinateur des Nations unies pour la grippe aviaire, David Nabarro.
Eradiquer le virus «à la source»
Au-delà de la Chine, la situation des autres pays asiatiques touchés par la grippe aviaire n’est pas plus rassurante. En Indonésie, en Thaïlande ou au Vietnam, où le virus est présent, la capacité de réactions des gouvernements est aussi très limitée. Le manque de moyens disponibles, comme les déficiences des infrastructures et de l’organisation des systèmes de santé rendent difficile la surveillance des élevages et la prise en charge des infections. Le mode de vie des fermiers, qui vivent au milieu des volailles qu’ils élèvent, contribue aussi à augmenter les risques de contamination humaine. Officiellement, toutes les personnes qui ont, jusqu’à présent, été infectées, ont eu des contacts étroits et directs avec des volatiles porteurs du virus H5N1. Mais des doutes subsistent tout de même sur quelques cas où des membres de la famille d’un malade, qui ne côtoyaient pas directement les volailles, ont tout de même développé les symptômes de la maladie.
Dans ce contexte, l’OMS estime que le danger majeur est qu’un jour ou l’autre la contamination d’homme à homme devienne possible. Et c’est en Asie que la mutation potentielle du virus paraît avoir le plus de chance de se produire à terme. C’est la raison pour laquelle une lutte efficace contre le H5N1 et le danger de pandémie qui lui est lié, passe avant tout par une action dans cette région. Jean-Luc Angot, directeur adjoint de l’Organisation mondiale de la santé animale (OIE), a résumé la situation : «Le meilleur moyen de se prémunir contre un risque potentiel de mutation du virus, c’est de l’éradiquer à la source et notamment dans les pays où ce virus est devenu endémique». En conclusion, il faut aider les Etats asiatiques à lutter contre l’épizootie et la contamination humaine. Cette question sera certainement à l’ordre du jour de la conférence internationale organisée à Ottawa, au Canada, la semaine prochaine, où responsables et experts vont étudier le problème de la coordination des actions à l’échelle mondiale.
par Valérie Gas
Article publié le 21/10/2005 Dernière mise à jour le 21/10/2005 à 18:13 TU