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Grippe aviaire

La pandémie est dans tous les esprits

Préparation de l'antiviral Tamiflu dans les laboratoires Roche de Bâle en Suisse.(Photo: AFP)
Préparation de l'antiviral Tamiflu dans les laboratoires Roche de Bâle en Suisse.
(Photo: AFP)
La Grèce pourrait être le premier pays de l’Union européenne touché par la grippe aviaire. Des tests sont en cours pour déterminer si les volailles de l’île de Oinousses, dans la région de Chios, ont été contaminées, comme en Turquie et en Roumanie, par le virus H5N1 responsable de l’épizootie asiatique. Cette progression inexorable de la grippe aviaire contribue à renforcer les craintes concernant la possible mutation du virus et l’apparition d’une pandémie humaine. Dans ce contexte, la question d’une production massive d’antiviraux pour répondre à une demande croissante se pose avec de plus en plus d’acuité. Dans l’attente d’un vaccin efficace contre un virus humanisé, ils représentent en effet les seuls médicaments susceptibles de traiter les malades.

A en croire Markos Kyprianou, le commissaire européen à la Santé, la succession d’apparitions de cas de grippe aviaire dans les pays européens «n’augmente pas la probabilité d’une pandémie». Et pourtant, tout le monde y pense. Après les mises en garde répétées de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), depuis la réapparition de la maladie en 2003 en Asie, la propagation de l’épizootie sur le continent européen ravive les craintes de voir le virus s’humaniser et provoquer une pandémie.

Dans les pays de l’Union européenne, les autorités sont particulièrement vigilantes face à cette menace potentielle. Elles multiplient les réunions pour coordonner les actions de surveillance et de prévention. Il est vrai que le très pathogène H5N1 a réalisé sur le continent une percée inquiétante en quelques jours. Il a été détecté dans plusieurs foyers en Turquie et en Roumanie. Il pourrait aussi avoir atteint Oinousses, une petite île grecque proche des rives turques. Si les analyses en cours confirment que la souche du virus qui a contaminé les dindes grecques est la même que celle qui a ravagé les élevages asiatiques, la grippe aviaire aura donc franchi les frontières de l’Union européenne. En Macédoine, des tests sont aussi en cours pour déterminer la cause de la mort d’un millier de volailles. De même qu’en Croatie, où des oiseaux morts ont été retrouvés près de Zagreb.

La proximité du virus a provoqué des réactions de peur dans la plupart des pays européens où les habitants se sont rués sur les pharmacies dans l’espoir de se procurer du Tamiflu (oseltamivir), un antiviral fabriqué par les laboratoires Roche, utilisé pour le traitement des personnes contaminées par la grippe aviaire. A tel point que les pharmacies se sont, dans bien des cas, retrouvées en rupture de stock. Cette situation a même obligé l’Organisation mondiale de la santé à faire une mise au point pour expliquer l’inutilité d’une telle démarche à l’échelon personnel.

Augmenter la production d’antiviraux

L’antiviral en question n’est, en effet, pas la solution miracle pour éviter une contamination. Il est même dangereux de l’utiliser comme médicament préventif parce que cela pourrait augmenter les risques d’adaptation du virus et favoriser l'apparition de résistances. Le Tamiflu ne peut éventuellement être efficace -cela n’est pas vrai dans 100% des cas- que pour soigner des personnes déjà contaminées ou faisant partie de l’entourage direct d’un patient. Il s’agit d’une «première ligne de défense» contre un virus humanisé destinée à essayer de limiter la propagation durant le laps de temps nécessaire à la mise au point d’un vaccin adapté. Et c’est pour cela que l’OMS recommande aux Etats de constituer des stocks à titre de précaution, de manière à être capable de le distribuer rapidement en cas d’épidémie humaine. L’objectif est de pouvoir traiter 25 % de la population.

De nombreux Etats ont donc passé commande au laboratoire Roche pour se faire livrer du Tamiflu. Face à l’explosion de la demande qui se comptabilise en millions de doses, la firme pharmaceutique suisse qui est détentrice de l’exclusivité sur la fabrication de l’antiviral, a dû s’adapter. Elle a d’abord augmenté sa production et fait part de son intention de mettre en place un nouveau site de fabrication aux Etats-Unis, de manière à compléter un dispositif qui en compte déjà une douzaine dans le monde. Mais le laboratoire a surtout commencé à accepter l’idée d’assouplir sa position sur les brevets. Roche a annoncé qu’il envisageait de desserrer son monopole et d’octroyer des licences de fabrication secondaires en raison de la situation exceptionnelle due à la propagation du virus H5N1 et aux risques qui lui sont liés. Dans cette optique, le groupe va examiner la demande déjà présentée par Taiwan en vue d’obtenir l’autorisation de produire du Tamilflu. Le fabricant indien de médicaments génériques, Cipla, a lui aussi déclaré qu’il souhaitait réaliser une version de cette molécule pour la commercialiser dans les pays en développement. La balle est dans le camp de Roche.


par Valérie  Gas

Article publié le 18/10/2005 Dernière mise à jour le 18/10/2005 à 17:57 TU