Côte d’Ivoire
Charles Konan Banny Premier ministre
(Photo: BCEAO)
A 63 ans, Charles Konan Banny fait une entrée fracassante sur la scène politique ivoirienne, lui qui avait jusqu'à présent consacré toute sa carrière au monde économique et financier. Et ironie de l’histoire, lorsque ce brillant technocrate prend la tête de la BCEAO en 1990, c'est parce que le gouverneur en titre vient justement d'être nommé Premier ministre de Côte d'Ivoire. Quinze ans plus tard, il suit donc les traces d'un certain Alassane Ouattara.
Fils de planteur baoulé, Charles Konan Banny, à peine empoché son diplôme de commerce à l'Essec à Paris, débute sa carrière dans les matières premières, le café et le cacao, les deux piliers de ce qu'on appelle alors le miracle économique ivoirien. En 1976, il entre à la BCEAO à Dakar et après un parcours sans faute, il en devient le gouverneur en 1990. Aux commandes de la Banque centrale ouest-africaine, il doit gérer la dévaluation du franc CFA ou encore la faillite d'Air Afrique. A ce poste, il peaufine sa stature internationale, sa réputation d'homme de caractère et de brillant technicien.
S'il n'a jamais été homme politique, Charles Konan Banny a toujours été proche du Parti démocratique de Côte d’Ivoire (PDCI), l'ancien parti unique, dont son frère, Jean, fut l'un des membres fondateurs. Il n'a d'ailleurs pas que des amis au sein de cette formation, Henri Konan Bédier notamment, le président du mouvement, s'est longtemps méfié de lui.
A l'approche du terme de son mandat à la BCEAO, l'année prochaine, certains de ses amis le poussaient à se lancer dans le course présidentielle. Mais en acceptant le poste à haut risque de Premier ministre, Charles Konan Banny semble pour le moment avoir renoncé à toute ambition présidentielle : l'accord de transition interdit en effet au chef du gouvernement de briguer la magistrature suprême.
Le premier choix de personneLa désignation d’un Premier ministre met en tous cas un terme à plus d’un mois de tergiversations entre les différents protagonistes de la crise ivoirienne. C'est en effet la deuxième fois en moins de trois semaines que le duo Olusegun-Mbeki faisait le voyage à Abidjan. Mais cette fois-ci, les médiateurs africains ne venaient pas avec une liste négociable, mais avec un seul nom. Et leur brève visite dans la capitale économique dimanche n'avait qu’un objectif : communiquer aux parties ivoiriennes la décision de la communauté internationale de nommer Charles Konan Banny. Tout le monde a pris acte. Sans enthousiasme démesuré, le gouverneur de la BCEAO n'étant le premier choix de personne.
Alphonse Djédjé Mady, président du rassemblement des houphouétistes est le seul à s'être ouvertement félicité. Le Front populaire ivoirien (FPI), parti au pouvoir, affirme vouloir juger le nouveau Premier ministre sur ses actes. La rébellion des Forces Nouvelles insiste, pour sa part, sur l'attribution des pleins pouvoirs à Charles Konan Banny. Ce à quoi le porte-parle de Laurent Gbagbo répond que tous les pouvoirs qu'il demandera lui seront délégués.
Aussitôt après l'annonce de la nomination de Charles Konan Banny, l'ensemble de la Côte d'Ivoire a été plongé dans le noir pendant plusieurs heures, à la suite à un très violent orage. «Espérons que ce ne soit pas un mauvais présage», a commenté un acteur de la crise ivoiriennepar Sylvain Biville
Article publié le 05/12/2005 Dernière mise à jour le 05/12/2005 à 13:41 TU