Proche-Orient
Le Jihad islamique dans la ligne de mire d’Israël
(Photo : AFP)
Israël n’a pas attendu pour engager sa riposte après l’attentat suicide de Netanya. Quatorze personnes ont été arrêtées par l’armée en Cisjordanie, dès mardi matin. Parmi eux, le père et les trois frères du kamikaze, Lotfi Amine Abou Saada. Ce jeune de 21 ans originaire du village d’Allar, proche de Tulkarem dans le nord de la Cisjordanie, a, en effet, été désigné comme l’auteur de l’attaque par le Jihad islamique, l’organisation qui en a revendiqué la responsabilité. «Le candidat au martyre Lotfi Amine Abou Saada a réussi à franchir toutes le fortifications sécuritaires sionistes et a fait exploser son corps pur dans une foule d’usurpateurs sionistes à l’entrée d’un centre commercial». Le Jihad islamique a d’ailleurs fait circuler une vidéo dans laquelle on peut voir le jeune homme en tenue militaire armé d’un lance-roquette ou d’un fusil mitrailleur.
Et il ne s’agit que d’un début. Car Israël entend punir les responsables de ce nouveau carnage qui a coûté la vie à quatre personnes et en a blessé une quarantaine d’autres, dont sept se trouvent dans un état très grave. Le bilan aurait pu être encore plus lourd car le kamikaze, repéré par les agents de sécurité, a dû faire exploser sa charge avant de pénétrer dans le centre commercial Hasharon, à l’entrée duquel il se trouvait. Les témoins décrivent une explosion de forte puissance qui a soufflé les vitres de tous les bâtiments à proximité. Ce même centre commercial avait déjà été visé par une autre attaque terroriste le 12 juillet dernier.
Bouclages et démolitions
Le ministre israélien de l’Intérieur, Shaoul Mofaz, a annoncé très vite que des représailles allaient être engagées contre le Jihad islamique. Il a d’ailleurs autorisé immédiatement la reprise des assassinats ciblés contre les cadres de l’organisation terroriste palestinienne et a déposé une demande auprès du conseiller juridique du gouvernement pour autoriser de nouveau les démolitions des maisons familiales des kamikazes suspendues depuis février 2005. Un bouclage total de la Cisjordanie pour «reprendre le contrôle» des secteurs tenus par le Jihad islamique a été engagé. Dans la bande de Gaza, une opération est de la même manière envisagée en représailles à l’attentat mais aussi pour mettre un terme aux tirs de roquettes Qassam contre Israël qui ont lieu à partir de cette zone. Shaoul Mofaz a résumé la détermination des autorités israéliennes en déclarant : «L’infrastructure du Jihad islamique, bien qu’il s’agisse d’une organisation terroriste relativement petite, est très extrémiste et je pense qu’il nous faudrait agir de toute notre force pour les dissuader, et l’une des options est la démolition de maisons… Il s’agit d’une mesure essentielle pour faire savoir à quiconque songeant à reprendre les attentats suicide que cela a un prix».
Pour autant, et malgré les accusations de faiblesse dont il fait l’objet de la part de la droite israélienne, le gouvernement a précisé que sa riposte sera «une démonstration de force, mais pas quelque chose qui échappe à tout contrôle». La cible est, et restera, le seul Jihad islamique. Il s’agit par là d’éviter d’engager des actions contre d’autres organisations comme le Hamas, qui seraient susceptibles de relancer des violences généralisées que la trêve, proclamée en février par Israël et l’Autorité palestinienne, avait considérablement diminuées. Ce qui serait particulièrement préjudiciable alors que des élections anticipées décisives doivent avoir lieu dans quelques mois en Israël.
Abbas condamne l’attentat
Du côté de l’Autorité palestinienne, l’analyse de la situation est identique car l’échéance du 25 janvier, date à laquelle doivent se dérouler les élections législatives, se rapproche. Et Mahmoud Abbas, le dirigeant palestinien, qui a condamné «fermement» l’attentat de Netanya estime qu’il s’agit d’un «acte irresponsable qui intervient au moment où nous préparons les élections» et «porte un grave préjudice au processus de paix israélo-palestinien». Le président de l’Autorité palestinienne a d’ailleurs donné des instructions aux services de sécurité pour «arrêter les responsables de cet attentat». Et dès lundi soir, la police palestinienne a elle aussi commencé à interpeller des membres du Jihad islamique à Jénine, Naplouse, et dans les camps de réfugiés de Balata et Askar.
Cette détermination affichée par les Palestiniens n’a pas empêché les Israéliens de critiquer sans détour l’incapacité de Mahmoud Abbas à mettre en terme au terrorisme contre leur pays en désarmant les groupes extrémistes. Les Américains ont apporté leur soutien à Israël sur ce point. Condoleezza Rice, le secrétaire d’Etat qui effectue actuellement une tournée en Europe, a pris la peine de téléphoner à Mahmoud Abbas pour lui faire part de la position des Etats-Unis et demander que les Palestiniens s’occupent «des organisations terroristes en leur sein, parce qu’il est clair que ce sont des organisations terroristes qui n’ont pas l’intention d’appartenir à un consensus national mais plutôt de continuer à tuer des innocents». Les Etats-Unis ont aussi mis en cause la Syrie qui abrite les bureaux du Jihad islamique et contribue à alimenter le terrorisme contre Israël. Washington a même demandé à Damas de ne plus tolérer la présence de cette organisation sur son territoire.
par Valérie Gas
Article publié le 06/12/2005 Dernière mise à jour le 06/12/2005 à 18:19 TU