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Haïti

Nouveau report des élections générales

Un marchand de fruits et de légumes s'est installé, le 22 décembre dernier, devant les affiches électorales de plusieurs candidats à la présidentielle, à Port-au-Prince. (Photo: AFP)
Un marchand de fruits et de légumes s'est installé, le 22 décembre dernier, devant les affiches électorales de plusieurs candidats à la présidentielle, à Port-au-Prince.
(Photo: AFP)

Bis repetita ! Jeudi, le Premier ministre haïtien Gérard Latortue a clamé tout haut ce qui se susurrait depuis quelques semaines à Port-au-Prince: «Les élections prévues pour le 8 janvier seront probablement reportées». C’est donc la cinquième fois que les consultations générales dans ce pays sont repoussées depuis le départ en exil de l’ancien président Jean-Bertrand Aristide, il y a moins de deux ans.


Le Premier ministre Gérard Latortue qui doit remettre «le pouvoir à un exécutif élu le 7 février», comme le prévoit la Constitution, a toutefois nuancé ses propos en indiquant que, même si elles étaient reportées, les élections devraient pouvoir se tenir avant la fin janvier. Un discours qui a l’air du «déjà entendu». Reste qu’à quelque neuf jours du 8 janvier, et avec ces reports récurrents, «la perle des Caraïbes» n’est pas loin de «la dérive et du chaos social», déclare la Fédération internationale des ligues des droits de l’homme (FIDH).

Confusion et désordre

Car malgré l’empressement de la communauté internationale à débloquer une aide massive de 61 millions de dollars pour l’organisation du scrutin, le pays peine à sortir de ses problèmes techniques et de sa confusion; ce qui explique en partie les retards accusés et les atermoiements préélectoraux. Le Comité électoral provisoire (CEP), chargé de l’organisation du scrutin n’a pas encore fini de répertorier, de localiser et d’installer les 8 883 bureaux de vote ainsi que les 809 centres, en dépit de l’échéance toute proche. De même, que seul un tiers des 3,1 millions d’électeurs, sur les 4,5 millions en âge de voter, a obtenu sa carte.

A ce jour, le problème central de la distribution des cartes d’électeurs n’a donc toujours pas trouvé de solution. A cela, s’ajoute la formation balbutiante des 30 000 scrutateurs qui devrait constituer une des clefs de la réussite du scrutin. Le Conseil national d’observation des élections (CNOE) n’a pas manqué de tirer la sonnette d’alarme. Depuis lundi, le CEP est en consultation avec la quasi-totalité des forces politiques du pays en vue de déterminer le choix d’une nouvelle date pour ces élections marquée par une atmosphère de violence.

Faire campagne dans certains quartiers : un arrêt de mort

L’insécurité n’a pas baissé d’un cran depuis le départ en 2004 du président Aristide. Le pays est à la merci des gangs en dépit de la présence de 8 000 hommes de la Mission des Nations unies pour la stabilité de Haïti (Minustah). Les haines enfouies des uns et des autres continuent d’alimenter les affrontements entre les partisans des anciens dictateurs, notamment Duvalier et Aristide. Les antagonismes sont exacerbés entre les différentes composantes, Noirs et Blancs, démocrates et partisans d’un pouvoir autoritaire, nationalistes et pro-américains. L’insécurité est si galopante que faire campagne dans certains quartiers de la capitale équivaut à la signature d’un arrêt de mort.

Dans ces conditions le respect des droits de l’homme relève du mythe comme l’atteste un rapport de l’ONU qui qualifie de «catastrophique» la situation des droits de l’homme en Haïti. Le tableau s’assombrit davantage avec les ravages causés par le passage de cyclones, les inondations (3 000 morts et 300 000 sinistrés lors du passage de Jeanne, le 18 janvier), le chômage, la paupérisation (deux tiers de la population vit avec moins d’un dollar par jour), l’accroissement de la dette publique, le pillage de la Banque centrale, la chute de la productivité, la corruption… Une situation alarmante qui a poussé la FIDH à déclarer au terme d’une mission à Port-au-Prince, que «le pays semble toujours à la dérive et au bord du chaos social, l’impunité est patente, la corruption généralisée».

C’est dans ces conditions qu’une cinquantaine de partis politiques s’apprêtent à négocier le rendez-vous crucial des élections générales qui devraient (pourraient ?) se tenir d’ici à la fin janvier, mais certainement pas le 8 comme initialement prévu. Trente-quatre candidats -pour la plupart inconnus de l'opinion- sont en lice pour la présidentielle et 1 300 candidats pour les 130 sièges à pourvoir au Sénat et à la Chambre des députés.


par Muhamed Junior  Ouattara

Article publié le 30/12/2005 Dernière mise à jour le 30/12/2005 à 16:06 TU

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Anne Corpet

Journaliste à RFI

«Les rumeurs sur le report du scrutin courent depuis plus d'une semaine.»

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