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France

Chirac lève l’état d’urgence

Lors des violences dans les banlieues, plus de dix mille voitures avaient été brûlées.(Photo : AFP)
Lors des violences dans les banlieues, plus de dix mille voitures avaient été brûlées.
(Photo : AFP)
Le président de la République a décidé de mettre fin à l’état d’urgence, instauré en France le 8 novembre à la suite de la vague de violences qui a touché de nombreuses cités de banlieue. Le recours à cette loi d’exception avait été, le 18 novembre, prorogé pour trois mois par le Parlement. Mais Jacques Chirac a estimé que la situation ne nécessitait pas d’attendre le 21 février pour mettre un terme à une mesure qui avait rassuré les populations mais avait aussi fait l’objet de nombreuses critiques.

Après un réveillon du Jour de l’An sans troubles particuliers, il n’y avait plus de raison de maintenir l’état d’urgence en France. Les quelque 400 voitures brûlées cette année (contre 333 en 2005), lors de la Saint-Sylvestre, n’ont rien d’exceptionnel. De nombreux véhicules sont traditionnellement incendiés durant la nuit du Nouvel An. Et les autorités ont estimé qu’il n’y avait aucun lien entre ces débordements et l’embrasement du mois de novembre dans les banlieues. Le président de la République a donc décidé que l’état d’urgence pouvait être levé sans risque pour la sécurité des citoyens, un mois et demi avant l’expiration du délai prévu par le vote du Parlement, le 18 novembre dernier, qui avait prorogé pour trois mois le recours à la loi de 1955, afin d’aider à ramener le calme dans les cités.

Il est vrai que le recours à cette loi a, dès le départ, été critiqué par les associations de défense des droits de l’homme et certains partis de gauche. De même que son maintien après l’accalmie. Un collectif de 74 professeurs et chercheurs a d’ailleurs déposé plusieurs requêtes devant le Conseil d’Etat pour protester contre la réactivation d’une loi coercitive sans véritable justification, arguant du fait que les violences dans les banlieues ne mettaient pas la France en situation de «péril imminent» et qu’il n’y avait donc aucune raison de prendre une mesure qui portait atteinte à la liberté individuelle des citoyens pour rétablir la sécurité.

Une application limitée

La loi de 1955 a, en fait, été réactivée avant tout pour manifester la volonté du gouvernement de réagir très fermement face aux émeutiers qui ont embrasé les banlieues pendant plus de trois semaines. Un phénomène sans précédent dans les quarante dernières années qui a provoqué une réaction de crainte dans la population. Dans ce contexte, l’instauration de l’état d’urgence visait d’abord à rassurer les Français en adoptant une mesure symboliquement forte. De ce point de vue, le gouvernement a atteint son objectif puisque les citoyens ont majoritairement approuvé cette décision.

Dans la pratique, la loi a été appliquée a minima dans le sens où la plupart de ses dispositions n’ont pas été utilisées. Les couvre-feux ont été limités et ont, en général, concerné les seuls mineurs. Le recours aux perquisitions de nuit ou l’interdiction des réunions, eux aussi autorisés par dans le cadre de l’état d’urgence, n’ont pas non plus été systématiquement mis en place. Loin s’en faut. Seules quelques mesures, comme l’interdiction de la vente de carburant au détail, ont été finalement maintenues jusqu’au réveillon du Jour de l’An, en prévision duquel, tout de même, les forces de l’ordre ont été placées en état d’alerte et le dispositif de sécurité a été renforcé.

Le gouvernement a donc entériné, mardi 3 janvier, la décision du président de la République de lever l’état d’urgence. Jacques Chirac a néanmoins de nouveau justifié, ce même jour, le fait d’avoir eu recours à cette disposition lors de ses vœux au gouvernement, en déclarant qu’elle avait été «indispensable pour donner aux forces de l’ordre les moyens d’agir». Mais il a aussi expliqué, rassurant, que le recours à la loi de 1955 avait dès le départ été envisagé comme une mesure «de précaution, de protection, strictement temporaire». Et surtout, il a une nouvelle fois insisté sur la nécessité de mettre en œuvre une politique efficace pour lutter contre les inégalités sociales dont les habitants des zones défavorisées sont victimes et qui représentent la principale cause des violences dans les cités. Vœu pieux ou réelle volonté politique ?


par Valérie  Gas

Article publié le 03/01/2006 Dernière mise à jour le 03/01/2006 à 18:06 TU