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Sans papiers : la ruée vers les préfectures

Une manifestation des sans papiers à Paris en 2002. Quelque 400 000 immigrés vivraient en situation irrégulière sur le territoire français d'après le gouvernement. 

		(Photo : AFP)
Une manifestation des sans papiers à Paris en 2002. Quelque 400 000 immigrés vivraient en situation irrégulière sur le territoire français d'après le gouvernement.
(Photo : AFP)
Familles d’élèves sans papiers et familles de sans papiers sans enfants scolarisés se ruent tous ensemble dans les préfectures de police dans la plus grande confusion pour déposer des demandes de régularisation. Le ministre français de l’Intérieur a annoncé la volonté de faire passer le nombre des expulsions du territoire français de 20 000 l’an dernier à quelque 25 000 en 2006 (contre 12 000 en 2003). En annonçant qu’une attention particulière serait accordée aux familles d’enfants scolarisés, en vue d’une intégration au cas par cas, une circulaire ministérielle a redonné de l’espoir à tous, avec ou sans enfants, avec enfants scolarisés ou non scolarisés. Toutefois, l’étude au cas par cas va se faire selon des critères très restrictifs.

Des files d’attente interminables d’immigrés se pressent aux portes des différentes préfectures de France, des dossiers sous les bras, et ce depuis plus d’une semaine. Logique : ils ont jusqu’au 13 août, date limite de dépôt des dossiers, pour demander une régularisation. Problème : la circulaire du ministère de l’Intérieur qui a fixé cette limite, fixait également les conditions requises pour y prétendre, selon des critères très restrictifs. Tous n’ont pas compris ou plutôt tous espèrent faire partie des heureux élus potentiels. La pression exercée sur les immigrés en situation irrégulière s’intensifie : le nombre de reconduites à la frontière devrait, selon les objectifs du ministre français de l’Intérieur, Nicolas Sarkozy, passer à 25000 en 2006, contre 12 000 en 2003 et 20 000 en 2005.

Initialement, le gouvernement avait évalué à 2 000, sur plusieurs dizaines de milliers, les personnes susceptibles de répondre aux critères de « clémence » de Nicolas Sarkozy : les familles concernées par une étude au cas par cas des dossiers en vue d’une régularisation sont celles dont un enfant est « né en France ou arrivé en France avant l’âge de 13 ans », des familles « dont les parents vivent en France depuis au moins deux ans, et dont l’enfant est scolarisé depuis septembre 2005 » et dont les « enfants ne parlent pas leur langue d’origine ». Les associations estiment que le ministre s’est mis en situation de devoir régulariser cinq ou six fois plus de monde, notamment sous la pression publique. Mercredi, Mouloud Aounit, responsable du Mouvement contre le racisme et pour l’amitié entre les peuples (MRAP) s’est inquiété pour « ceux qui ne sont pas portés par un collectif et pour les célibataires ». Les conditions sont loin de concerner les quelque 400 000 immigrés en situation irrégulière.

Demandes de régularisation sous escorte

Quid des élèves qui ont suivi un cursus dans les écoles françaises mais qui, devenus majeurs, sont devenus du même coup sans papiers précaires ? Quid également des jeunes parents dont les enfants sont encore trop petits pour avoir intégré l’école, ou de ceux qui attendent leur premier enfant ? « « On ne peut pas régulariser automatiquement tous les parents d’enfants qui sont scolarisés. Parce que cela signifie que les frontières sont ouvertes et qu’il suffit de rentrer avec un enfant , de le scolariser et d’être automatiquement régularisable », a déclaré l’avocat Arno Klasfeld, le médiateur nommé par Nicolas Sarkozy, en s’adressant à un membre de Réseau Education sans frontières (Resf).

Les conditions limitatives ont été clairement stipulées. Pourtant, motivés par un espoir très vif de pouvoir bénéficier de cette vague d’études de dossiers au cas par cas, décidés à demeurer sur le sol français, et angoissés de continuer à vivre cachés, nombre de candidats à la régularisation font le choix de sortir de l’ombre au risque de s’exposer au schéma intransigeant arrestation-centre de rétention-expulsion. Les collectifs et les réseaux associatifs se mobilisent pour leur apporter leur soutien. Samedi, ils ont été des milliers à défiler dans les manifestations à Paris et en province. Mercredi, les collectifs parisiens ont déposé ensemble des milliers de demandes de titres de séjour : après s’être réunis place de l’Hôtel de Ville ils ont rejoint la préfecture de police place de la Cité en scandant « des papiers pour tous ! ».

Faute d’accepter une aide au retour proposée en première instance, un refus de dossier met tout candidat éconduit en situation « expulsable ». Or la porte est étroite pour prétendre à une satisfaction : les collectifs cherchent à obtenir des préfectures des précisions concernant les modalités d’application de la circulaire ; or, d’un département à l’autre les informations les plus contradictoires circulent comme le souligne le Monde : « Dans le Loiret et le Val-de-Marne, ne seraient-ce ainsi concernées que les familles qui ont reçu un arrêté préfectoral de reconduite à la frontière  au cours de l’année 2005-2006. La préfecture du Rhône a affirmé que les dossiers seront étudiés au cas par cas sans quotas, ni d’acceptation ni de rejet.»

 « Nous demandons la régularisation de tous, pas uniquement des familles d’enfants scolarisés. Nous sommes là depuis des années, nous voulons travailler, payer des impôts, et que l’Etat nous donne une chance de participer à l’économie du pays », a déclaré Hossni el-Rherabi, porte-parole d’un collectif de 62 personnes en majorité célibataires qui ont décidé d’observer une grève de la faim depuis lundi pour obtenir la régularisation de 200 papiers.



par Dominique  Raizon

Article publié le 05/07/2006Dernière mise à jour le 05/07/2006 à TU

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(Conception : RFI)

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