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Immigration

Sans-papiers : ouvrir la porte, mais pas trop

Entre sa volonté de procéder à l’expulsion des familles sans-papiers  et sa décision de permettre le réexamen des dossiers de ces mêmes familles, Nicolas Sarkozy se trouve politiquement dans une situation délicate. 

		(Photo : AFP)
Entre sa volonté de procéder à l’expulsion des familles sans-papiers et sa décision de permettre le réexamen des dossiers de ces mêmes familles, Nicolas Sarkozy se trouve politiquement dans une situation délicate.
(Photo : AFP)
Après avoir voulu stopper la polémique sur l’expulsion des familles sans-papiers d’enfants scolarisés en France, Nicolas Sarkozy va-t-il se trouver au centre d’un débat sur une régularisation massive de ces mêmes familles ? Le délai accordé à ces personnes en situation irrégulière pour se faire connaître et demander des titres de séjour a incité un nombre de clandestins plus important que prévu à déposer des dossiers. Ce qui a fait dire à Yannick Blanc, directeur de la police générale de la préfecture de Paris, que «plusieurs milliers de familles» allaient bénéficier de cette procédure de régularisation. Au grand dam du ministre de l’Intérieur qui a été obligé de faire une mise au point.

Au cas par cas : Nicolas Sarkozy ne veut rien de global, que du particulier concernant les régularisations de parents sans-papiers d’enfants scolarisés en France. Car «l’humanité» n’empêche pas la «fermeté». Le ministre de l’Intérieur l’a dit et redit, «il n’y a pas un pays qui considère qu’on doive donner des papiers définitivement parce qu’un enfant est inscrit à l’école». Et il n’a pas l’intention de faire de la France un Etat précurseur en la matière.

Reste que Nicolas Sarkozy se trouve dans une situation délicate sur ce dossier. Sa volonté de montrer qu’il était capable d’ouverture en ne mettant pas en application au 30 juin, comme prévu initialement, les mesures d’expulsion des familles sans titre de séjour, lui vaut aujourd’hui d’affronter une autre polémique. Certains politiques, comme le président du Front national Jean-Marie Le Pen, dénoncent une procédure de régularisation massive et insistent sur la contradiction dans laquelle se trouve le ministre de l’Intérieur sur cette question. Après avoir fait voter une loi qui met en place une immigration «choisie» et rend plus difficile l’obtention des titres de séjour sur le territoire français, notamment dans le cadre du regroupement familial, Jean-Marie Le Pen l’accuse d’ouvrir «une nouvelle filière d’immigration familiale» en proposant de régulariser des clandestins.

Plus de candidats à la régularisation que prévu

Les propos tenus par le directeur de la police générale de la préfecture de Paris ont contribué à mettre le ministre de l’Intérieur dans l’embarras. Yannick Blanc a affirmé, dans un entretien avec le quotidien Le Monde : «Nous savons que nous allons régulariser plusieurs milliers de familles sans-papiers dans le cadre de la circulaire du 13 juin». C’est, en effet, à partir de ce document qu’a été initiée la procédure qui permet aux clandestins de tenter une régularisation et en définit les critères. Le «scolarisation effective» des enfants, leur naissance ou leur arrivée en France avant l’âge de 13 ans, «la réelle volonté d’intégration» des familles, font partie des conditions en fonction desquelles les cas seront examinés. Et de fait, pour ce responsable de la police, l’affluence enregistrée dès les premiers jours -à Paris, il y a déjà 2 300 rendez-vous fixés avec des familles dont le cas sera étudié- est un signe qui indique qu’au 15 août, date limite pour se manifester, on en sera à plusieurs milliers dans toute la France.

Ces déclarations ont obligé Nicolas Sarkozy à faire une mise au point en déclarant : «Tous ceux qui parlent de chiffres aujourd’hui parlent de sujets qu’ils ne connaissent pas. Les dossiers seront étudiés un par un». Autrement dit, ce n’est pas parce que les familles vont déposer une demande de régularisation qu’elles obtiendront gain de cause. Reste que l’on se situe incontestablement au-delà des proportions envisagées au départ, lorsque le nombre d’environ 700 familles potentiellement concernées par ces mesures circulait.

Un dossier sensible

Politiquement, il est peut-être encore plus difficile pour Nicolas Sarkozy d’apparaître comme le ministre qui ouvre trop la porte que comme celui qui la ferme sans état d’âme. Sa volonté de procéder à l’expulsion des familles sans-papiers dès la fin de l’année scolaire lui avait valu les critiques virulentes des associations de défense des immigrés et de la gauche. Sa décision de permettre le réexamen des dossiers de ces mêmes familles pour faire entrer les situations personnelles en ligne de compte pourrait, a contrario, être considérée comme une attitude trop laxiste si elle aboutit à régulariser un grand nombre de clandestins. Et du coup, cela pourrait faire perdre au ministre de l’Intérieur son crédit auprès des électeurs d’extrême-droite qu’il souhaite ramener dans le giron de la droite républicaine.

En cette année pré-électorale, le candidat Sarkozy n’a pas le droit de se tromper sur le dossier de l’immigration qui risque de faire partie des thèmes majeurs de la campagne pour la présidentielle. Car ils sont nombreux à attendre qu’il trébuche pour récupérer des voix.



par Valérie  Gas

Article publié le 07/07/2006Dernière mise à jour le 07/07/2006 à TU