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France

Chirac, président jusqu’au bout

Le président Jacques Chirac dans les studios d'Europe1, le 18 septembre 2006. 

		(Photo : AFP)
Le président Jacques Chirac dans les studios d'Europe1, le 18 septembre 2006.
(Photo : AFP)
Le président de la République française a fait le point sur la situation intérieure et internationale en accordant une interview à la radio privée Europe 1, juste avant de s’envoler vers New York où il doit participer à l’Assemblée générale des Nations unies. Jacques Chirac s’est aussi entretenu avec les chaînes de télévision CNN et al-Arabiya. A quelques mois de l’élection présidentielle, il entend bien montrer son intention de gouverner jusqu’au bout de son mandat et continue de faire planer le doute sur une éventuelle troisième candidature. Histoire de maintenir la pression.

Privé d’Assemblée générale en 2005, Jacques Chirac entend bien se rattraper en marquant le grand raout annuel de l’Organisation des Nations unies en 2006. Cette année, il l’a affirmé à la radio Europe 1, il se sent «dans une forme tout à fait convenable». Oublié donc l’accident vasculaire cérébral qui l’avait contraint, il y a un an, à renoncer pour quelques temps aux voyages en avion et à confier la mission de représenter la France à la tribune de l’ONU à Dominique de Villepin. Pour ce qui sera, peut-être, sa dernière participation à cet événement international, le président français a prévu de faire des propositions importantes sur les dossiers sensibles du moment et de l’avenir.

Il a ainsi annoncé son intention de demander l’organisation d’une conférence internationale consacrée à la reconstruction du Liban, un Etat auquel le président français porte un grand intérêt et qui a subi de gros dommages après l’intervention israélienne destinée à détruire les positions du Hezbollah dans le sud du pays. Le président français veut, d’autre part, demander une réunion du Quartette (Etats-Unis, Russie, Union européenne, ONU) pour essayer de «rétablir la confiance» et «trouver une solution de paix» entre Israéliens et Palestiniens. Jacques Chirac entend aussi lancer un «appel solennel» au président du Soudan, Omar el-Béchir, pour le convaincre d’accepter l’envoi d’une force de l’ONU afin d’essayer de résoudre la crise du Darfour. Et soucieux de garantir l’avenir de la planète, le chef de l’Etat estime qu’il est nécessaire de créer une organisation de l’ONU chargée de la protection de l’environnement et a l’intention de s’engager dans ce sens devant l’Assemblée générale.

Nucléaire iranien : «des solutions par le dialogue»

Mais surtout, le président de la République a affirmé être convaincu de la nécessité de donner la priorité au dialogue dans le dossier du nucléaire iranien. Il a, pour la première fois, suggéré de renoncer à demander à l’Iran de stopper son programme d’enrichissement de l’uranium avant toute ouverture de négociation. Il propose un échange de bons procédés entre les Six pays engagés dans le processus de discussion (Etats-Unis, Chine, Russie, Grande-Bretagne, France, Allemagne) et l’Iran. Après l’ouverture d’une négociation, les premiers renonceraient à saisir le Conseil de sécurité des Nations unis et, en échange, Téhéran accepterait de stopper son programme d’enrichissement durant les pourparlers.

Cette proposition ne va pas dans le sens des attentes des Etats-Unis qui essaient de convaincre leurs alliés d’adopter des sanctions contre le régime iranien. Cette divergence ne remet pourtant pas en cause, selon le chef de l’Etat, «la relation de confiance» qu’entretiennent aujourd’hui la France et les Etats-Unis. Le président Chirac a néanmoins précisé qu’il s’agissait d’une «relation entre égaux qui ne peut être une relation de soumission». Autrement dit, les deux pays ne sont pas obligés d’être d’accord sur tout. Lors de son séjour new-yorkais, le chef de l’Etat français doit d’ailleurs s’entretenir avec son homologue américain, George W. Bush, notamment pour faire le point de la situation au Proche-Orient et en Afrique. Et Jacques Chirac l’a déclaré sur CNN, les deux hommes ont «des analyses communes» sur la plupart des conflits actuels. Après la visite aux Etats-Unis de Nicolas Sarkozy durant laquelle celui-ci avait critiqué la position de la France face à l’intervention militaire en Irak, le président français a donc présenté sa vision des relations entre les deux pays.

Car même s’il est plus que jamais paré des habits de chef de la politique étrangère de la France, Jacques Chirac n’entend pas pour autant renoncer à son rôle d’arbitre de la politique intérieure. Qu’il soit ou non candidat à sa réélection -il ne se prononcera pas sur ce point avant le premier trimestre 2007-, il est, et restera jusqu’à la dernière minute, président de la République. Comme son gouvernement demeurera en ordre de travail jusqu’au bout, lui aussi. Jacques Chirac s’est engagé à y veiller. Le président estime qu’il n’est aucun besoin de se lancer avant l’heure dans la campagne électorale, pour laquelle «deux ou trois mois» suffiront largement.

Pas de «chamailleries», du travail

Du coup, il fera tout pour éviter les «chamailleries» -une formule enfantine destinée à minimiser l’importance des conflits entre Villepin et Sarkozy, numéro un et deux du gouvernement dont les ambitions et les tempéraments ont eu un trop tendance à se heurter. Jacques Chirac a d’ailleurs coupé court à la polémique sur certaines propositions avancées par Nicolas Sarkozy : la carte scolaire ne sera pas modifiée, les régimes spéciaux de retraites non plus. Sur le dossier très sensible de la fusion Suez-GDF, le président de la République a de nouveau plaidé en sa faveur, en expliquant la nécessité stratégique pour la France de disposer d’un pôle gazier concurrentiel à l’international.

Le gouvernement a été nommé pour travailler et avancer sur certains dossiers prioritaires qui disposent aussi, il est vrai, d’un fort potentiel électoral. Il n’est donc pas question de lever le pied. Au menu concocté par le chef de l’Etat figurent toujours en tête de liste la lutte contre le chômage et l’amélioration du pouvoir d’achat. Le chef de l’Etat n’hésite pas à manier la carotte fiscale et à promettre de nouvelles baisses des impôts sur le revenu si «la croissance le permet». Car la cagnotte engrangée grâce à l’accroissement des recettes doit, quant à elle, il l’a confirmé, servir à réduire la dette. Concernant le grand chantier du dialogue social, le président de la République a manifesté son désir de ne pas laisser la France accumuler du «retard». La crise provoquée par la tentative de faire passer en force la réforme du contrat première embauche (CPE) a fait son effet. Le chef de l’Etat veut que toute modification du code du travail soit précisée par la loi. Un président présent, consensuel et toujours au-dessus de la mêlée, c’est l’image que Jacques Chirac veut donner de lui, alors qu’il s’engage dans la dernière ligne droite de son second mandat à l’Elysée.

Retrouvez l'intégralité de l'interview de Jacques Chirac par Jean-Pierre Elkabbach d'Europe1.



par Valérie  Gas

Article publié le 18/09/2006 Dernière mise à jour le 18/09/2006 à 16:57 TU