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Bosnie-Herzégovine

Les habits neufs de la division

Ouverture des urnes, le 1er octobre, à Sarajevo. A l'occasion de ce vote, les partis nationalistes «traditionnels» ont largement perdu la main. 

		(Photo: AFP)
Ouverture des urnes, le 1er octobre, à Sarajevo. A l'occasion de ce vote, les partis nationalistes «traditionnels» ont largement perdu la main.
(Photo: AFP)
Les élections générales de dimanche se soldent par une profonde recomposition de la scène politique bosniaque. Selon les résultats encore partiels, l’ancien Premier ministre Haris Silajdzic gagne son pari en emportant la présidentielle, tandis que le Premier ministre de Republika Srpska Milorad Dodik triomphe dans l’entité serbe.

De notre envoyé spécial en Bosnie-Herzégovine

Les trois membres de la nouvelle présidence collégiale de la Bosnie-Herzégovine seront donc Haris Silajdzic, Nebojsa Radmanovic, le candidat des Sociaux-démocrates serbes indépendants (SNSD) de Milorad Dodik, et le Croate Ivo Miro Lazic, du HDZ.

La Bosnie-Herzégovine est composée de deux «entités» : la Fédération croato-musulmane et la Republika Srpska (la République Serbe). 

		(Carte : Nicolas Catonné / RFI)
La Bosnie-Herzégovine est composée de deux «entités» : la Fédération croato-musulmane et la Republika Srpska (la République Serbe).
(Carte : Nicolas Catonné / RFI)

Premier ministre durant la guerre, Haris Silajdzic avait rompu avec le SDA d’Alija Izetbegovic dès 1994. Depuis, il s’est fait le champion d’une Bosnie unitaire, sans entités. Durant la guerre, Haris Silajdzic s’était opposé aux courants durs du SDA, favorables à un «petit État musulman». Alors que tous les acteurs politiques de cette période sont morts, emprisonnés ou en cavale, Haris Silajdzic, l’un des signataires des accords de paix de Dayton, réussit un retour magistral sur le devant de la scène politique. Pour ce faire, il a réussi à opérer la synthèse entre un électorat favorable à une Bosnie intégrale et citoyenne et les courants durs du SDA, hostiles au nouveau président du parti, Sulejman Tihic, un «réaliste» accusé de mollesse et de trahison par les militants les plus radicaux. Haris Silajdzic a d’ailleurs bénéficié tout au long de la campagne d'un soutien ouvert du reis u-l-ulema Mustafa Ceric, mais aussi des milieux islamistes militants.

Le second homme fort qui émerge du scrutin est bien sûr Milorad Dodik, le Premier ministre de la Republika Srpska, qui a fait campagne sur le thème d’un référendum d’autodétermination pour l’entité serbe de Bosnie-Herzégovine. Alors que Milorad Dodik passait pour un «modéré» et a longtemps été l’interlocuteur privilégié de la communauté internationale, il a réussi à supplanter les forces nationalistes traditionnelles, le Parti démocratique serbe (SDS) et le Parti radical (SRS). Son candidat siègera à la présidence collégiale, il contrôlera largement le Parlement de la Republika Srpska, tout en disposant d’un groupe parlementaire qui le rendra également incontournable au Parlement central. Qu’il parvienne ou non à organiser le référendum qu’il a promis à ses électeurs de Republika Srpska, Milorad Dodik se retrouve en position de faiseur de roi à Sarajevo.

Les partis traditionnels débordés

Même si Ivo Miro Lazic, représentant de la vieille garde nationaliste croate d’Herzégovine, est parvenu in extremis à s’imposer dans le camp croate, les partis nationalistes «traditionnels» ont largement perdu la main, qu’il s’agisse du SDA musulman, du SDS serbe ou même du HDZ croate, désormais divisé en deux factions. Ces partis, placés durant des années sous un étroit contrôle de la communauté internationale, ont été «débordés» par des formations nouvelles, mais qui se contentent d’accommoder à une nouvelle sauce les clivages qui déchirent la Bosnie depuis quinze ans. Les frémissements politiques observés ces dernières semaines, notamment dans la jeunesse, n’ont pas trouvé à s’exprimer dans le jeu politique.

Une nouvelle scène politique est en train d’émerger, mais les enjeux du débat politique n’ont guère évolué depuis 1992. La confrontation Silajdzic / Dodik se résume à l’alternative entre l’unité et l’éclatement de la Bosnie-Herzégovine. Les buts de guerre poursuivis par chaque camp de 1992 à 1995 sont donc posés plus ouvertement que jamais sur la table. Alors que les pouvoirs du Haut représentant international sont supposés prendre fin en juin 2007, la Bosnie aura bien du mal, dans ce contexte, à entreprendre les réformes indispensables à la poursuite de son rapprochement européen.



par Jean-Arnault  Dérens

Article publié le 02/10/2006 Dernière mise à jour le 02/10/2006 à 18:08 TU

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Laurent Rouy

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