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Réchauffement climatique

L’Afrique, une voix marginale

Quatre cents activistes de Greenpeace manifestent à Dania (Floride) contre le réchauffement climatique, le 4 novembre 2006. Six mille participants sont attendus à la conférence de Nairobi.
   

		(Photo: AFP)
Quatre cents activistes de Greenpeace manifestent à Dania (Floride) contre le réchauffement climatique, le 4 novembre 2006. Six mille participants sont attendus à la conférence de Nairobi.
(Photo: AFP)
Pour la première fois, c’est un pays d’Afrique subsaharienne qui accueille la douzième Conférence internationale sur le réchauffement climatique sous l’égide des Nations unies. Nairobi, la capitale du Kenya, attend 6 000 participants. Ces travaux doivent aboutir à des engagements afin de garantir la pérennité et le renforcement des efforts pour lutter contre l’effet de serre et l’émission de carbone qui a des conséquences sur l’avenir de la planète mais aussi l’économie mondiale. Quelle sera la place dans ces négociations du continent africain, première victime de ce phénomène alors qu’il émet beaucoup moins de dioxyde de carbone que les pays industrialisés ? Les Etats-Unis rejettent, en effet, un quart du CO2 mondial et ne font pas partie du protocole de Kyoto, signé en 1997.

De notre correspondante à Nairobi

«Une conférence sur le climat ? Ah oui ? Où ? Ici ? A Nairobi. Ah bon, je n’ai pas lu ça dans les journaux». Ces deux employées d’un magasin du centre ville de la capitale Kenyane haussent les sourcils à l’évocation de la 12ème Conférence sur le réchauffement climatique, qui pour la première fois se tient dans un pays d’Afrique sub-saharienne. Que savent-elles de l’effet de serre ? «Le soleil est plus chaud à cause de la pollution des voitures, cela crée de la poussière et des maladies respiratoires», affirment-elles. Quelques mètres plus loin, Antony, taximan depuis 15 ans, ne savait pas que la fumée qui sort de son véhicule participe à l’émission de dioxyde de carbone, gaz à effet de serre, comme le prouvent de nombreuses études scientifiques depuis les années 80.

«Si vous m’aviez interviewé il y a sept ans, je vous aurais dit qu’au Kenya, les chrétiens pensaient que les inondations ou la sécheresse étaient une punition de Dieu parce qu’ils ne priaient pas assez, et que les Musulmans craignaient qu’Allah ne les sanctionnent parce qu’ils ne respectaient pas la religion. Maintenant, beaucoup savent que cela est dû au réchauffement climatique», affirme Grace Akumu, responsable à Nairobi du réseau africain pour une communauté climatique, qui existe depuis 1991 et regroupe le Kenya, le Soudan, le Nigeria, la Tanzanie, l’Angola, le Cameroun ou le Zimbabwe. Elle est consciente de la tâche gigantesque qui reste encore à effectuer pour sensibiliser l’opinion publique, surtout en Afrique, mais estime que des progrès ont été accomplis.

Cette conférence qui va durer deux semaines offre l’occasion de mener deux rencontres parallèles. En reprenant le jargon cher aux Nations unies, il se déroule, d’une part, le COP 12. C'est-à-dire la 12ème Conférence des parties qui ont signé le traité de Rio en 1992, parmi lesquelles les Etats-Unis et l’Australie. D’autre part, a lieu le MOP 2, la deuxième rencontre des parties qui ont ratifié le protocole de Kyoto, en 1997, effectif depuis février 2005 jusqu’en 2012, et dont ne font pas partie les deux pays occidentaux.

L’Afrique, parent pauvre des financements

«L’Afrique n’émet pratiquement pas de CO2 par rapport aux Etats-Unis, qui représentent un quart des émissions mondiales, ce sont eux qui devraient donner l’exemple aux pays en voie de développement ! » s’insurge Grace. Les conséquences de l’effet de serre touchent en effet de plein fouet l’Afrique. Désertification, dérèglements climatiques (inondations, sécheresse), selon le groupe intergouvernemental d’études sur le climat, créé en 1992, les pluies ont diminué de 25% en trente ans dans le Sahel et la température a augmenté en moyenne de 0,7 degrés en Afrique en un siècle. Pour autant, l’Afrique reste le parent pauvre des projets de développement durable financés par les pays du Nord. D’après les MDP, mécanismes de développement propres, les pays industrialisés peuvent financer des projets pauvres en carbone.

Or les financements ont profité aux trois quarts à la Chine, l’Inde ou le Brésil, l’Afrique n’en récoltant qu’à peine 5%. Cette conférence est donc l’occasion pour l’Afrique subsaharienne de se faire entendre et de réfléchir sur les moyens d’adapter les politiques gouvernementales au changement de climat, notamment en matière agricole, d’irrigation, mais aussi dans le domaine de la construction, des politiques d’urbanisme et de transports publics.

Pour de nombreux observateurs, l’enjeu de cette conférence n’est pas tant d’aboutir à des engagements fermes que l’occasion pour les pays en développement de se positionner dans des négociations longues et complexes. La véritable inconnue demeurant la position américaine. En 1997, les Etats-Unis ont refusé d’adhérer au protocole de Kyoto. En novembre 2008, les élections américaines décideront si la première puissance mondiale se joindra à l’effort mondial pour lutter contre l’effet de serre.

par Stéphanie  Braquehais

Article publié le 05/11/2006 Dernière mise à jour le 05/11/2006 à 20:56 TU