Guinée
Le président va nommer un Premier ministre
(Carte : DK/RFI)
La crise guinéenne semble être en voie de règlement, avec la poursuite des négociations, jeudi après-midi, entre les centrales syndicales et les responsables du régime. Il s’agit de définir la mission du futur Premier ministre, un poste qui n’existe pas actuellement. Le principe de nomination d’un chef du gouvernement était une des revendications prioritaires des syndicalistes. Cependant, les syndicats n’ont pas levé le mot d’ordre de grève, conditionnant la fin du mouvement lancé le 10 janvier, à l’obtention de garanties.
Bemba Soumah
Secrétaire général adjoint de l'Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG)
«Nous sommes en train de préparer la lettre de mission [du Premier ministre] qui sera proposée au chef de l'Etat.»
Selon l’envoyé spécial de RFI à Conakry, Christophe Champin, l’attente est grande concernant les résultats de ces discussions et tout particulièrement «le compte rendu de la commission qui a été désignée mercredi pour dresser la feuille de route du futur Premier ministre. Le contenu de cette feuille de route est essentiel, car les syndicats veulent que ce Premier ministre ait une véritable marge de manœuvre. Alors que jusqu’ici, chaque fois qu’un Premier ministre a tenté de prendre une certaine autonomie à l’égard de la présidence, il a été limogé ou a du jeter l’éponge. Et ce futur chef du gouvernement aura ensuite pour tâche de préparer une modification de la Constitution, puisque son existence même n’est par prévue par la Loi fondamentale».
Toujours selon notre envoyé spécial, le mot d’ordre de grève n’a pas été levé «puisque les syndicats ont posé plusieurs préalables non négociables». Notamment, la démission de l’actuel gouvernement et la nomination d’un Premier ministre et d’un cabinet de consensus, ainsi que des garanties en matière de lutte contre la corruption, la séparation des pouvoirs et la libération de toutes les personnes arrêtées depuis le début du mouvement de grève générale.
Michel Kamano
Président du Conseil économique et social guinéen
«Le chef de l'Etat a accepté le principe d'un Premier ministre, a qui il donnera une lettre de mission.»
La grève générale, lancée il y a 15 jours par la Confédération nationale des travailleurs de Guinée (CNTG) et par l’Union syndicale des travailleurs de Guinée (USTG), était initialement un mouvement de protestation contre la baisse du pouvoir d’achat, la corruption et l’ingérence du chef de l’Etat dans les affaires judiciaires. Selon l’AFP, ce mouvement s’est radicalisé et les syndicats se sont substitués aux partis d’opposition, divisés et marqués ethniquement. Cependant, 14 formations de l’opposition ont manifesté leur soutien aux syndicalistes, qui souhaiteraient également réduire les pouvoirs du président Lansana Conté, 72 ans, au pouvoir depuis 1984 et affaibli par la maladie.
Plus de 50 personnes ont été tuées par les forces de l’ordre depuis le 10 janvier, lors des manifestations. Le 22 janvier a été la journée la plus meurtrière, avec 49 manifestants tués, dont quatre enfants, selon un bilan communique jeudi de source officielle. Notre envoyé spécial souligne qu’il y a eu également 200 blessés recensés et que «le Conseil national de la société civile se mobilise pour trouver des moyens financiers pour payer le traitement de ces blessés. Il a aussi lancé un appel aux citoyens pour qu’ils passent dans les centres de transfusions afin d’offrir leur sang».
La situation était calme jeudi, à Conakry, où la plupart des magasins sont toujours fermés. La circulation a repris dans les grandes artères et de longues files de voitures se sont formées près des rares stations de service ouvertes. L’actuelle crise a provoque une pénurie d’essence.
Il faut noter que des manifestations se sont déroulées ce jeudi en province, notamment à Kankan, la capitale de la Haute-Guinée située à 500 kilomètres à l’est de Conakry. Là, près de 15 000 personnes, notamment des jeunes, ont manifesté contre le président Lansana Conté et ont demandé le «changement». Cette manifestation n’a pas provoqué d’intervention des forces de l’ordre.
par Antonio Garcia
Article publié le 25/01/2007 Dernière mise à jour le 25/01/2007 à 16:46 TU