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Somalie

Accueil au mortier pour l'Amisom

(Carte : Silvio M. Segala/ RFI)
(Carte : Silvio M. Segala/ RFI)

Le 6 mars, le début du déploiement à Mogadiscio des quelque 370 soldats ougandais de la Mission de l’Union africaine en Somalie (Amisom) a coïncidé avec de violents combats dans la capitale. A peine débarqués à Mogadiscio, les soldats ougandais ont en effet essuyé des tirs de mortier qui ont visé l’aéroport. Plus tard dans la journée, des combats ont opposé les forces éthiopiennes toujours sur place à des éléments armés non identifiés. Les affrontements de ce type sont quotidiens dans la capitale somalienne, ils ont fait depuis le début de l’année plus de 60 victimes civiles.


De notre correspondante régionale

Mogadiscio est une ville surarmée. Sa topographie est propice aux embuscades des bandes armées. Le gouvernement somalien dénonce également la présence d’ «islamistes liés aux terroristes internationaux». Sur la côte, les pirates en outre ont repris du service. Avant même son arrivée, l’Amisom était déjà menacée de représailles. Or les échecs sanglants des précédentes missions internationales sont dans toutes les mémoires. Illustrée dans La chute du Faucon Noir, le film de Ridley Scott, la débâcle des années quatre-vingt-dix avait coûté la vie à 150 casques bleus. Au plus fort de l’opération Restore Hope, la force internationale comptait 38 000 hommes dont 28 000 Américains. Mais en janvier dernier, après la victoire éclair des troupes éthiopiennes sur les tribunaux islamiques somaliens, le Premier ministre éthiopien, Meles Zenawi, a martelé que «la Somalie ne sera pas un nouvel Irak».

La peur du vide

L’Ethiopie ne veut pas rester en Somalie, elle espère un passage de relais rapide avec l’Union Africaine. Addis Abeba s’est toutefois engagée à ne pas créer une périlleuse situation de vide. Mais les candidats ne se bousculent par pour participer à l’Amisom. L’Ouganda est le premier pays africain à déployer ses forces sous sa bannière, avec quelque 1 500 hommes au total, concentrés dans la partie centrale du pays qui abrite Baïdoa et Mogadiscio. Quatre autres pays se sont engagés à fournir des troupes : le Nigeria et le Malawi à hauteur d'un bataillon (environ 700 soldats), le Ghana avec 300 hommes et le Burundi deux bataillons, qui ne seront pas disponibles immédiatement puisqu'ils doivent d’abord être entraînés. Au total, l’UA veut envoyer 8 000 soldats en Somalie, les engagements actuels correspondent à la moitié de cet effectif.

Selon Said Djinnit, commissaire à la Paix et à la Sécurité de l’UA, «le plus gros défi reste logistique et financier». Les contributions sont diverses, c’est la France qui va entraîner, équiper et acheminer en Somalie les soldats burundais. L’Union européenne donne pour sa part 15 millions d’euros qui seront utilisés pour rembourser les dépenses de l’Ouganda. La Grande-Bretagne apporte 6 millions d’euros, les Etats-Unis, 11. L’Algérie a fourni des transports de troupe et d’autres pays de l’UA, comme l’Angola et l’Afrique du Sud, devraient également apporter une contribution. Mais le maintien de la paix n’est pas le seul secteur en quête de financement.

Le principe de non indifférence

Selon le président somalien, Abdullahi Yusuf, il faut aussi reconstruire les infrastructures, payer les salaires des 10 000 membres des forces de sécurité recrutés par le gouvernement de transition et mettre en place un programme de Désarmement, Démobilisation et Réintégration (DDR) pour offrir un avenir à des combattants qui ont connu quinze ans de guerre civile. Reste que l’Union africaine aura besoin de davantage de moyens pour tenir les six ou sept mois au terme desquels les Nations unies devraient prendre le relais. Durant cette période, c’est aux soldats de la paix de créer les conditions du dialogue politique. L’ouverture d’une conférence de réconciliation nationale est prévue à Mogadiscio à partir du 16 avril. Sans véritable dialogue, a prévenu récemment le président exécutif de l’UA, Alpha Oumar Konaré, l’Amisom sera considérée par les Somaliens comme une force d’occupation. Si le dialogue échoue, l’UA risque l’enlisement, et le pays le retour au chaos.

Avec ce déploiement organisé en quelques semaine, l’UA a fait mentir les sceptiques et réussi son pari. «Nous faisons ce que nous devons avec ce que nous avons», a expliqué Said Djinnit. Selon lui, le déploiement rapide d’opérations de maintien de la paix correspond à la mission de l’UA, en vertu du principe de non-indifférence. L’organisation n’est certes pas dotée de moyens pour les opérations d’envergure qui restent l’apanage des Nations unies. Il s’agit plutôt de préparer le terrain à l’arrivée des casques bleus, en prenant «plus de risques que l’Onu». Pour cela, l’UA compte mettre sur pied des brigades en attente, positionnées dans les 5 régions du continent (nord, est, sud, centre, ouest), mobilisables rapidement. Un projet embryonnaire dont la nécessité se fait cruellement sentir.



par Virginie  Gomez

Article publié le 07/03/2007 Dernière mise à jour le 07/03/2007 à 10:03 TU