par Jean-Arnault Dérens
Article publié le 19/03/2008 Dernière mise à jour le 19/03/2008 à 17:29 TU
Les trois pays ont annoncé dans un communiqué conjoint qu’ils allaient procéder à cette reconnaissance, une décision immédiatement dénoncée par Belgrade. Jusqu’à présent, la Serbie a rappelé « pour consultations » ses ambassadeurs de tous les pays ayant reconnu l’indépendance du Kosovo, mais on ignore encore si Belgrade agira de même avec ses voisins.
Cette décision va néanmoins remettre en cause la normalisation en cours des relations régionales. En Croatie, le Parti démocratique indépendant serbe (SDSS), qui participait au gouvernement depuis les élections de l’automne dernier, pourrait choisir de le quitter, ce qui affaiblirait dangereusement la majorité du Premier ministre Ivo Sanader, tout en remettant en cause la réintégration des Serbes dans les institutions politiques du pays. Les Serbes représentent aujourd’hui 4,5% de la population croate, contre 12% en 1991, avant la guerre. Les échanges commerciaux entre la Serbie et la Croatie ont également connu une très forte croissance ces dernières années, qui pourrait être remise en cause.
Un nombre croissant d'incidents interethniques
Vue de Hongrie, la principale question est par contre celle des minorités hongroises de Voïvodine, la province autonome du nord de la Serbie (environ 350 000 personnes). Les nationalistes serbes risquent de considérer les Hongrois de Voïvodine comme « coresponsables » de la décision de Budapest. Ces derniers années, la province a été le théâtre d’un nombre croissant d’incidents interethniques. Les dirigeants hongrois de Voïvodine, Sándor Pál et István Pásztor, refusent néanmoins de lier ces incidents à la situation au Kosovo.
Pour sa part, la Bulgarie a longtemps eu une politique hésitante sur le dossier. Sofia entretient de bonnes relations avec Belgrade, et semblait se rallier à une position hostile à l’indépendance du Kosovo, semblable à celle de la Roumanie. Les courants nationalistes bulgares craignent aussi un effet de « précédent », en pensant à la forte minorité turque du pays. Le parti d’extrême droite, Ataka, a ainsi mené campagne contre toute reconnaissance de l’indépendance du Kosovo.
Hostiles ou réservés
La Slovénie avait déjà reconnu l’indépendance du Kosovo, après un débat parlementaire assez houleux, mais les autres États de la région restent hostiles ou réservés. Membre de l’Union européenne, la Grèce s’oppose à l’indépendance du Kosovo, tandis que le Monténégro, la Macédoine et la Bosnie-Herzégovine préfèrent cultiver une prudente réserve.
Au Monténégro, la minorité serbe (30% de la population) est farouchement opposée à l’indépendance, et les autorités de Podgorica ont choisi d’adopter un profil bas, au moins jusqu’aux élections présidentielles du 6 avril prochain.
En Bosnie-Herzégovine, les autorités de la Republika Srpska, « l’entité serbe » de ce pays divisé, ont fait savoir qu’en cas de reconnaissance de l’indépendance du Kosovo, elles proclameraient leur propre sécession. Pour essayer de préserver sa bien fragile unité, la Bosnie exclue donc toute reconnaissance.
En Macédoine, la question a déjà provoqué une grave crise politique : le Parti démocratique des Albanais a quitté le gouvernement, entraînant sa chute, car celui-ci n’a toujours pas reconnu l’indépendance. Ici, la question du Kosovo est devenue un enjeu dans les délicates relations politiques entre la majorité macédonienne et la minorité albanaise (25% de la population du pays).
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