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Birmanie

Propagande du gouvernement sur l’aide humanitaire

Article publié le 18/05/2008 Dernière mise à jour le 18/05/2008 à 12:17 TU

Deux semaines après le passage du cyclone Nargis, qui a fait près de 134 000 morts et disparus, et malgré la pression et les appels répétés des Occidentaux, la Birmanie reste opposée à l’envoi d’aide humanitaire de nombreux pays. Si les vivres commencent à arriver dans le delta de l’Irrawaddy, ils sont toujours insuffisants par rapport aux énormes besoins du million et demi de déplacés. Pour désamorcer les critiques internationales, le gouvernement a organisé samedi un voyage dans le delta pour quelques diplomates étrangers. Un petit tour en hélicoptère au cœur d’une propagande très bien orchestrée.
Les tentes bleu azur accueillent les déplacés victimes du cyclone Nargis.(Photo : AFP)

Les tentes bleu azur accueillent les déplacés victimes du cyclone Nargis.
(Photo : AFP)


Avec notre envoyé spécial à Rangoon
, Luc Auberger

Les images tournent en boucle sur la première chaîne de télévision. On peut y voir des militaires tout sourire qui déchargent en cadence l’aide humanitaire des avions-cargos. Les soldats sont aidés par les militants de l’USDA, la plus grande organisation paramilitaire au service du gouvernement.

Les images s’attardent volontiers sur le matériel envoyé par les pays asiatiques : la Thaïlande, la Corée du Sud mais surtout la Chine. C’est là qu’interviennent les ambassadeurs étrangers venus ce samedi sur le terrain s’assurer que l’aide parvient bien aux populations.

Mise en scène

Voyage en hélicoptère, guide fourni par l’armée, la visite commence dans un camp modèle où la caméra détaille l’alignement au cordeau des tentes bleu azur qui accueillent les déplacés. Des hommes saluent la caméra avant de remercier leurs bienfaiteurs.

Dans la cuisine, on trouve de tout : du riz, des œufs, des légumes. Tout ce que la majorité des déplacés n’a pas encore reçu. Ici, pourtant ils boivent de l’eau purifiée et mangent sur des tables, surveillées par de jeunes femmes habillées en rose.

Cette mise en scène évidemment ne trompe personne. Pendant que le gouvernement peaufine sa propagande, dans le delta de l’Irrawaddy, des dizaines de milliers de personnes manquent de tout. Et le Mistral, le navire de la marine française, chargé de 1 000 tonnes de fret humanitaire attend toujours l’autorisation d’accoster. Le gouvernement birman accuse la France d’avoir envoyé un bâtiment militaire.

Des négociations sont en cours

Le navire de la marine française, le <em>Mistral,</em>&nbsp;transporte 1&nbsp;000 tonnes de fret humanitaire à destination des victimes du cyclone Nargis.(Photo : AFP)

Le navire de la marine française, le Mistral, transporte 1 000 tonnes de fret humanitaire à destination des victimes du cyclone Nargis.
(Photo : AFP)

L'arrivée du Mistral au large des côtes birmanes revêt un double intérêt au regard des sinistrés. D'une part, il navigue à proximité de la région la plus touchée, et pourrait ainsi fournir des vivres à ceux qui en ont le plus besoin, sans passer par l'aéroport de Rangoon qui a déjà du mal à gérer un trafic aérien rendu plus dense qu'à l'ordinaire en raison des vols humanitaires tolérés par la junte.

D'autre part, le volume d'aide proposé dépasse de loin les possibilités du fret aérien. Figurant parmi les plus gros navires de guerre français, le Mistral, dont les coques ressemblent à celles d'un navire de commerce, transporte à destination de la Birmanie 1 000 tonnes de fret.

A en croire l'état-major de l'armée française, il y aurait là de quoi nourrir 100 000 personnes pendant quinze jours et fournir un abri à 60 000 sinistrés.

Pour l'instant, la majorité des quelques deux millions de personnes touchées par le cyclone, n'a encore vu venir aucune aide. Seulement, l'extrême méfiance des militaires birmans à l'égard de l'aide étrangère, qui plus est embarquée sur un navire militaire, empêche pour le moment la cargaison du Mistral de sortir de ses calles.

Seul point positif, l'état-major français affirme que des négociations sont en cours avec la junte, laissant entendre qu'il ne se heurterait pas à un refus clair et net du régime birman.

A écouter

Manifestation à Paris en faveur des victimes birmanes

« Nous voulons de l’eau, du riz et des vivres. Ce sera le seul slogan de cette manifestation. Mais est-ce bien suffisant face à l’irresponsabilité de la junte? »

18/05/2008 par Jean-Sébastien Soldahini