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RD Congo

Confusion et guerre des chefs au CNDP

par  RFI

Article publié le 09/01/2009 Dernière mise à jour le 10/01/2009 à 00:03 TU

La guerre des chefs semble désormais ouverte chez les rebelles du CNDP. Jeudi, le général Ntaganda a réaffirmé avoir destitué le chef Laurent Nkunda, qui hausse le ton mais pourrait bien faire les frais de la réconciliation entre Kigali et Kinshasa.

Le représentant de l'ONU, Olusegun Obasanjo, ici en novembre 2008, continue son travail de médiateur. Il a rencontré le président Kabila ce jeudi avant de repartir pour le Rwanda.(Photo : AFP)

Le représentant de l'ONU, Olusegun Obasanjo, ici en novembre 2008, continue son travail de médiateur. Il a rencontré le président Kabila ce jeudi avant de repartir pour le Rwanda.
(Photo : AFP)

Après avoir minimisé la fronde, Laurent Nkunda semble désormais décidé à hausser le ton contre son chef d'état major. « Cette destitution est une supercherie» affirme le porte-parole du mouvement, qui promet des sanctions contre Bosco Ntaganda et ses accolytes. Selon Bertrand Bisimwa, aucune unité militaire n'a répondu à l'appel du mutin, et aucun responsable politique connu n'a rallié les insurgés.... Mais dans les faits, il semble aujourd'hui bien difficile à Laurent Nkunda de mettre ses menaces à execution depuis son fief du Rutshuru.

La confusion règne au sein du CNDP et il est encore bien difficile de dire qui tient les rênes de la rébellion. Que représente la faction de Bosco Ntaganda ? Combien d'officiers ? Combien de soldats ont rallié le chef d'état major sur les collines du Massissi ? Ces questions restent entières.

Pour l'instant, le général Bosco Ntaganda ne revendique pas la tête du mouvement, mais il prend déjà des engagements significatifs. Le chef militaire de la rébellion s'est ainsi dit prêt à participer, au côté des forces congolaises et rwandaises, au désarmement des FDLR, les rebelles hutus rwandais présents dans l'est de la RDC.

Une déclaration qui est intervenue au moment où James Kabarebe, le chef d'Etat major de l'armée rwandaise, se trouvait à Kinshasa, pour très vraisemblablement discuter de cette question.

La visite de James Kabarebe, un symbole très fort

C'est sans doute la première fois depuis 10 ans que le chef d'état- major rwandais pose à nouveau le pied sur le sol de la capitale congolaise. James Kabarebe a été expulsé le 29 juillet 1998 par feu Laurent Desiré Kabila, qui venait de se brouiller avec ses parrains rwandais. Trois jours plus tard, un communiqué annonçait la création de la rebellion du RCD Goma...

Cette visite concrêtise le rapprochement amorcé entre Kigali et Kinshasa. Le 5 décembre dernier, les deux gouvernements ont signé un accord qui prévoit un plan conjoint pour désarmer les FDLR, les rebelles hutus rwandais installés à l'est du Congo depuis le génocide de 1994. Les détails de ce plan n'ont pas été rendus publics, mais selon les informations de RFI, le plan serait déjà finalisé. Il doit permettre à l'armee rwandaise d'intervenir au Nord Kivu au côé des forces armées congolaises pour traquer les FDLR. Ces opérations pourraient même démarrer très rapidement. En contrepartie, Joseph Kabila obtiendrait la mise à l'écart du chef rebelle du CNDP, ce qui motiverait le putsch mené en ce moment contre Laurent Nkunda par son chef d'état-major, le général Bosco Ntaganda. Devenu manifestement trop encombrant, Nkunda serait sacrifié sur l'autel des intérêts aujourd'hui convergents de Kigali et Kinshasa.

Le schéma est en place, mais il n'est pas sans risque pour tous les acteurs.

 

Retour sur les relations entre le Rwanda et le CNDP

Le Rwanda dément depuis toujours soutenir de quelque facon que ce soit la rebellion du CNDP. Kigali estime que cette une affaire congolo- congolaise... Hier, l'envoyé spécial du président Kagamé pour la région des Grands lacs a redit qu'il n'y avait pas d'implication rwandaise dans le conflit interne qui secoue le CNDP. 

Malgre ces dénégations, le Rwanda semble bel et bien impliqué dans ce qui se déroule en ce moment au Nord Kivu. En tout cas, plusieurs éléments sont convergents. Ces derniers mois Kigali semblait de plus en plus irrité par Laurent Nkunda, jugé trop indépendant et peu docile. Le régime de Paul Kagamé n'aurait guère apprécié que le chef rebelle congolais affiche des ambitions politiques et s'éloigne des revendications de départ, à savoir le désarmement des FDLR, les rebelles hutus rwandais qui insécurisent l'est du Congo et empêchent les réfugiés tutsis congolais de rentrer. Pour Kigali cette revendication est prioritaire pour convaincre le président Kabila de laisser l'armée rwandaise mener des opérations au Nord Kivu pour traquer ces FDLR. En contrepartie, Kinshasa, qui veut en finir avec la rebellion, obtiendrait la tête de Nkunda. Et ce n'est sûrement pas un hasard si le général putschiste Bosco Ntaganda, qui affirme avoir destitué Nkunda, dit aujourd'hui souhaiter participer à la traque des FDLR. « La guerre n'aura plus lieu d'être entre la rebellion et l'armée congolaise, a-t-il déclaré, car nous aurons un ennemi commun ». Selon les sources de RFI, des cadres de l'armée rwandaise ont téléphoné à plusieurs officiers du CNDP pour leur conseiller de rallier le général putschiste.

Devenu trop encombrant pour Kigali et Kinshasa, Laurent Nkunda doit être mis à l'écart, mais le Rwanda sait qu'il devra à tout prix éviter un affrontement fratricide à l'interieur du CNDP, parce que les conséquences pourraient être tragiques.  

A écouter

Interview : Désiré Kamanzi, sur le climat au sein du CNDP

« Le haut commandement militaire a choisi la voie de la non-violence. Laurent Nkunda est libre dans son fief, et bien qu'il soit destitué, il peut rejoindre le mouvement pour faire autre chose. Cette situation ne brise pas l'unité du CNDP ».

09/01/2009