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Athlétisme

Les faux-frères

par Gérard Dreyfus

Article publié le 27/08/2003 Dernière mise à jour le 26/08/2003 à 22:00 TU

Première médaille d’or de son histoire pour le Qatar. Saeed Shaheen Saïf l’a emporté au nez et à la barbe des Kenyans dans une épreuve où depuis 1991 ils étaient imbattables, le 3 000m steeple. A ce détail près que jusqu’au 9 août, Saïf s’appelait encore Stephen Cherono. Et qu’il était Kenyan.
Stephen et Adam s’alignaient dans la même course. Stephen et Adam portaient le même nom patronymique. L’aîné a terminé sur la plus haute marche du podium ; le cadet a pris la cinquième place. Le premier, curieusement, brandissait le drapeau du Qatar ; le deuxième arborait son maillot de toujours, celui du Kenya. Le Kenya, invaincu depuis 1991 dans cette discipline, perdait brutalement de son âme, le «traître » s’imposant devant son ex-compatriote Ezekiel Kemboï. Un authentique crime de lèse-majesté ourdi également par un autre transfuge, Abdullah Khamis Saïfeldin. Le Qatar, moyennant espèces sonnantes et trébuchantes s’est donc payé cette année Cherono, médaille d’or du 3 000m steeple et Albert Chepkurui, alias Ahmad Hassan Abdullah, pour contrer ses frères sur le 5 000 m.

Pétrodollars et champions

Nul ne sait avec exactitude quelle compensation les deux Kenyans ont reçu en échange de leur désertion. Cherono a nié s’être vu promettre une prime d’un million de dollars en cas de victoire. C’est possible ; ce qui est certain c’est qu’il a signé pour une mensualité à vie de 1 000 dollars. La fédération kenyane aurait, disent certains, négocié le départ de ces deux éléments contre la construction d’une piste d’athlétisme dans le pays. Cette affaire n’est pas sans rappeler le «coup» déjà réalisé par les Qatariens à la veille des Jeux Olympiques de Sydney lorsqu’ils avaient «acheté» avec le consentement de leur fédération, quelques haltérophiles bulgares pour porter haut les couleurs de ce pays plus riche de ses pétrodollars que de ses champions.

On friserait le ridicule si d’autres pays –parmi les grands pays européens notamment- ne pratiquaient depuis longtemps, mais de manière moins voyante, de telles pratiques. L’argent fait tourner bien des têtes, en particulier chez ceux qui n’en ont pas. Le Kenya a, dans cette histoire, perdu un des joyaux de sa couronne sportive, sans tout à fait la perdre. Nul ne saurait être dupe.

Ecouter également :

Le Journal du Mondial d’athlétisme (27 août 2003, diffusé à 05h45, durée: 2'43'').

Le Journal du Mondial d’athlétisme (27 août 2003, diffusé à 06h45, durée: 7'36'').